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Sanofi et le Doliprane : les ressorts d’un revirement stratégique

Sanofi et le Doliprane : les ressorts d'un revirement stratégique




Séisme dans le monde du médicament. Ce vendredi, Sanofi, fleuron de l’industrie pharmaceutique française, a annoncé se séparer de la division qui produit notamment le Doliprane, marque sexagénaire prisée des Français pour mieux se concentrer sur la recherche de nouvelles cures prometteuse. L’entité, appelée “Grand public” doit devenir autonome et être introduite en bourse à la fin de l’année 2024, a indiqué l’entreprise, sans préciser si elle allait rester actionnaire majoritaire.En se séparant de “Grand public”, Sanofi emboîte le pas à ses concurrents et donne la priorité à la découverte de nouveaux remèdes ciblés. Vendus très chers car ne souffrant d’aucune concurrence et permettant des espoirs thérapeutiques importants, ces médicaments dits “innovants” offrent actuellement les taux de rentabilités les plus importants du marché, mais sont accusés de monopoliser l’intérêt des laboratoires, alors que certains remèdes plus courants mais aux marges plus faibles sont parfois introuvables en pharmacie. Au-delà des capacités de la firme de se muer en faire de lance de l’innovation française, alors qu’elle a raté le virage de l’ARN et des biotechnologies, l’annonce a jeté le trouble sur l’avenir du Doliprane dans l’Hexagone, alors que le gouvernement a promis de relocaliser la filière avant la fin de l’année 2023, pour résorber les pénuries observées depuis la crise sanitaire – de plus en plus de médicaments dits “matures”, comme le paracétamol mais aussi les antibiotiques, la cortisone manque à l’appel. Contrairement à ce qu’à cru une partie de la presse, l’annonce du géant français ne signifie pas, en l’état, que la production du Doliprane va être arrêtée. Reste que la mise sur les marchés financiers de Grand public est en revanche interprété par les syndicats comme un coup porté aux efforts mis en œuvre pour restaurer la souveraineté pharmaceutique hexagonale, d’autant plus que la firme va aussi céder ses forces logistiques au profit de la firme allemande DHL. “A quoi ça sert que l’Etat aide Sanofi à investir si c’est pour que le Doliprane finisse dans les mains de fonds vautours, guidés uniquement par la rentabilité”, déplore ainsi Jean-Louis Peyren, délégué CGT-Sanofi.Pas d’affront à la relocalisation, pour le gouvernementInterrogé par L’Express, Sanofi réfute tout “impact sur la production, l’emploi, l’approvisionnement ou l’investissement sur le territoire”. L’entreprise explique que cette réorganisation, qui a débuté en 2019, vise seulement à clarifier les différentes activités du groupe pour favoriser l’investissement et rattraper son retard dans les médicaments innovants. Preuve en est : la semaine dernière, le groupe a injecté 20 millions d’euros dans son centre de production situé à Lisieux, dans le Calvados. De quoi augmenter de 30 % les livraisons, dans les prochaines années, conformément aux attentes du gouvernement.Mais en l’absence de précision sur le devenir exact de Grand public, l’avenir du Doliprane reste incertain : “Si les produits de Grand public, le Doliprane, mais le Muscosolvan, la Lysopaïne, le Maalox ne sont pas assez rentables pour Sanofi, il y a un fort risque qu’ils ne le soient pas assez pour le marché financier. Et on ne sait pas si les nouveaux investisseurs seront autant à l’écoute que l’entreprise, qui est un partenaire historique de l’État en matière de santé publique. C’est d’ailleurs étonnant que Bercy ait accepté autant d’inconnu”, abonde l’économiste.Précisant à L’Express être en contact “clair et direct” avec le président du conseil d’administration de Sanofi, notamment depuis les annonces, le cabinet de Roland Lescure, ministre de l’industrie, indique quant à lui ne pas voir en la décision de Sanofi un affront fait aux objectifs français : “Les engagements de Sanofi sur le paracétamol ne sont aucunement remis en cause”. Et de préciser : “En cas de projet de vente d’Opella (NDLR : du nom de l’entité juridique derrière Grand public) si l’acheteur est étranger, le projet sera soumis au contrôle des investissements étrangers”.Depuis l’émergence des pénuries de médicaments, des garde-fous ont été pris, pour s’assurer que les changements stratégiques des groupes pharmaceutiques n’abime pas la disponibilité des traitements. Entériné par 49.3 ce lundi, le projet de loi de finance de la sécurité sociale prévoit par exemple de renforcer l’obligation des entreprises d’effectuer des démarches pour trouver un repreneur en cas d’arrêt de commercialisation. Si aucun ne se manifeste, “il sera possible de concéder temporairement l’autorisation de mise sur le marché à un établissement pharmaceutique public pour poursuivre l’exploitation”, ajoute l’entourage de Roland Lescure. Un problème qui ne devrait pas se poser pour la division Grand public de Sanofi. Si les marches sont faibles, le Doliprane reste un best-seller en France et représente à lui seul un quart des ventes de médicaments. Ainsi, l’entité a enregistré une croissance de 8,6 % en 2022. De quoi donner envie aux investisseurs. La balle est dans leur camps.



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Author : Antoine Beau

Publish date : 2023-10-31 17:50:53

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Tags :L’Express

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