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Tempête Ciarán : le réseau électrique peut-il s’adapter à de telles rafales de vent ?

Tempête Ciarán : le réseau électrique peut-il s’adapter à de telles rafales de vent ?




Le ballet de camions bleus a commencé quelques heures avant la tempête. Des techniciens d’Enedis, le gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, ont filé en renfort vers l’ouest et le nord du pays, pré-mobilisés avant l’arrivée de Ciarán sur les côtes françaises. Les prévisionnistes anticipaient depuis plusieurs jours une tempête d’ampleur : elle a bien eu lieu, tuant deux personnes selon un dernier bilan.Des rafales de vents exceptionnelles ont été enregistrées en Bretagne, avec des records battus à Plougonvelin (193 km/h), Lanvéoc (171 km/h), Brest (156 km/h) ou Lorient (148 km/h). Au petit matin ce jeudi 2 novembre, 1,2 million de foyers étaient privés d’électricité en raison d’arbres tombés sur les lignes, de pylônes ou de câbles arrachés – une majorité d’entre eux en Bretagne (780 000) et en Normandie (255 000). C’est “jusqu’à trois fois supérieur à ce qui a été considéré comme étant la tempête du siècle, en 1999”, a déclaré la présidente d’Enedis, Marianne Laigneau. Dans certains endroits, “le réseau a été haché menu”, a-t-elle insisté.En urgence, Enedis a ainsi activé sa force d’intervention rapide – FIRE, créée après 1999 – constituée de “3 000 salariés et prestataires mobilisés avec les moyens logistiques adaptés, 300 groupes électrogènes et 30 hélicoptères, prêts à intervenir dès que les conditions le permettront, pour rétablir au plus vite l’électricité dans les zones impactées”. Et pour réparer les “13 lignes haute et très haute tension qui se sont arrêtées” la nuit dernière, précise à L’Express le gestionnaire du réseau de transport d’électricité (RTE), ce qui équivaut au besoin électrique de 11 000 foyers.”Pylônes anti-cascades”Les dégâts matériels semblent cependant incomparables à ceux des tempêtes Lothar et Martin de la fin du siècle dernier, quand plus de 1 000 pylônes avaient été touchés et 184 postes électriques mis hors service. La France a depuis retenu de nombreuses leçons de ces épisodes. RTE a en effet procédé à la consolidation de son réseau, avec notamment la création de “pylônes anti-cascades”. Implantés tous les 10 supports, ils sont renforcés afin de résister à une rupture complète des câbles, que celle-ci arrive d’un côté ou de l’autre du support, et d’éviter ainsi un coûteux jeu de dominos sur la ligne. “Des stratégies d’adaptation sont mises en œuvre par les gestionnaires en réponse à la plupart des aléas climatiques actuels, mais aussi en tenant compte du climat futur”, indiquent les auteurs d’une note d’analyse de France Stratégie datant de mars 2022. Elles se sont avérées payantes, confirment-ils, par exemple “lors des tempêtes hivernales en limitant les ruines généralisées de pylônes”.Si Enedis, comme RTE, ont entamé de longs travaux pour limiter les coupures majeures, il reste impossible de sécuriser la totalité des installations. Après chaque tempête, les techniciens et prestataires doivent sillonner les routes départementales pour réparer les portions endommagées du réseau électrique, dont dépendent aussi les transports ou les télécommunications. “La moitié des 9 500 salariés de RTE sont dédiés à la maintenance, ils travaillent tous les jours pour élaguer et vérifier que les lignes ne soient pas trop près de la végétation”, souligne également le groupe.Même si la quasi-totalité des nouvelles lignes sont souterraines, le réseau français demeure largement à l’air libre. Et donc particulièrement exposés lors des tempêtes. Selon les données de RTE en 2022, la France compte près de 100 000 kilomètres de lignes aériennes, contre un peu plus de 7 000 kilomètres de lignes enterrées. Cette fragilité du réseau a souvent été pointée du doigt lors des épisodes de vents violents mais la tendance, malgré les récents investissements, n’est pas à un enfouissement total du réseau : l’opération n’est pas réalisable sur tous les terrains. Et surtout onéreuse. “Pour des logiques de coût, ce n’est pas la solution qui a été retenue et la maintenance est beaucoup plus facile sur de l’aérien”, explique-t-on chez RTE. Une stratégie qui se reflète dans les investissements du gestionnaire du réseau effectués après la tempête de 1999. Le programme lancé à l’époque, et doté d’1,6 milliard d’euros sur 15 ans, a permis d’identifier les lignes stratégiques pour assurer un approvisionnement minimal, mais aussi de consolider mécaniquement les structures afin qu’elles résistent à des rafales de vent allant jusqu’à 180 km/h.Quel sera l’effet des prochaines tempêtes sur le réseau ? Pour tenter d’optimiser leur réponse, les acteurs français de l’électricité parient désormais sur l’anticipation. Chez Enedis, différents projets destinés à mieux comprendre l’impact des tempêtes sur ses infrastructures sont en cours. Le logiciel Windy Smart Grid, utilisé depuis 2020, calcule par exemple des “indicateurs de prise de décision tels que le nombre prévisionnel de pannes causées par une tempête”, relate une étude publiée en août 2022. Utilisé avec succès pour anticiper l’impact de la tempête “Aurore” en octobre 2021, il a permis, selon les auteurs de l’étude, de pré-mobiliser les équipes de réparation deux jours avant le coup de vent. A l’avenir, les camions bleus devraient ainsi avoir un coup d’avance sur la météo.



Source link : https://www.lexpress.fr/environnement/tempete-ciaran-le-reseau-electrique-peut-il-sadapter-a-de-telles-rafales-de-vent-J4NS7DM7VJD2LDBV5WR2UQFFDU/

Author : Valentin Ehkirch, Baptiste Langlois

Publish date : 2023-11-02 18:33:05

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Tags :L’Express

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