C’est une règle d’airain des élections européennes : les enjeux nationaux y occupent une place prépondérante. Le millésime 2024 ne fera pas exception. Le président du Rassemblement national Jordan Bardella promet d’en faire “le grand scrutin de mi-mandat” d’Emmanuel Macron. Les partisans du chef de l’Etat ne manqueront pas en retour de défendre le bilan de leur champion. Et Les Républicains (LR) dans tout ça ? La droite jouera sa survie le 9 juin, après sa déroute présidentielle. Mais des nuages intérieurs s’amoncellent au-dessus de sa campagne.L’examen du projet de loi Immigration ranime chez elle la question existentielle de son rapport au macronisme. Partenariat exigeant ou opposition irréductible ? La droite est traversée par des dissensions stratégiques sur le texte. Le Sénat a durci – au lieu de rejeter – la copie gouvernementale au grand dam du patron des députés LR Olivier Marleix, soucieux de s’opposer au ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. L’élu d’Eure-et-Loir a mis en garde la probable tête de liste François-Xavier Bellamy. “Tu vas devoir assumer le même bilan que Macron en matière de politique migratoire européenne. Le pacte européen est un pacte PPE [NDLR : le Parti populaire européen], le président va s’en targuer. Si tu as le même bilan national et qu’on laisse au RN le monopole de l’opposition sur l’immigration, bon courage à toi !”IVG et fin de vieLe philosophe conservateur sait mieux que quiconque qu’une campagne peut être percutée par des sujets nationaux : en 2019, ses propos polémiques sur l’affaire Vincent Lambert – bataille judiciaire autour de l’arrêt des traitements à un patient en état végétatif – ont coûté cher à son camp. L’élu avait mis en garde contre la construction d'”un monde inhumain”, quelques jours avant le vote. De l’avis général, ces sorties ont entraîné la droite sous la barre symbolique des 10 % (8,48 %) et entraîné la démission de son président Laurent Wauquiez.L’histoire se répète. Cinq ans plus tard, François-Xavier Bellamy mènera campagne sur fond d’examen de loi sur la fin de vie et de constitutionnalisation du droit à l’IVG. L’homme n’est guère favorable à ces évolutions sociétales, à rebours de l’opinion publique. Deux thèmes, deux pièges. En janvier 2019, le candidat LR avait semé le trouble en assumant auprès du JDD son opposition à l’IVG, une “conviction personnelle”. Il avait passé le reste de la campagne à se défendre de vouloir remettre en cause la loi Veil.”Plus c’est gros, plus ça passe”La droite le sait : sur ces thèmes, les mots de François-Xavier Bellamy sont disséqués, chaque micro tendu est un chausse-trappe. Tant pis s’il n’a jamais brandi en étendard ses idées conservatrices. Qu’importe s’il insiste sur les sujets européens et tient à défendre son bilan d’eurodéputé, unanimement salué. Quand une image vous est accolée, il est difficile de s’en défaire. “Pourquoi croyez-vous que Macron nous balance cela maintenant ?, s’agace un dirigeant LR. Plus c’est gros, plus ça passe.”François-Xavier Bellamy jure mieux maîtriser son expression publique, expérience oblige. En 2019, il avait pris conseil auprès de Bruno Retailleau pour polir son expression publique. “Il m’avait demandé : ‘Comment tu argumenterais ?'”,se souvient le Vendéen. On avait échangé sur la possibilité de développer une argumentation qui ne trahisse pas les convictions et qu’il ne soit pas pris par une agression par ceux qui portent des convictions différentes.” Cela n’avait pas suffi. La droite attend de voir et craint qu’une sortie de route ne la détourne de l’électorat modéré.
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Author : Paul Chaulet
Publish date : 2023-11-10 12:27:56
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