On ne voudrait pas faire pleurer dans les chaumières, mais figurer sur la première liste du Goncourt n’est pas toujours une sinécure. Ils étaient 16 cette année, neuf hommes, sept femmes, à être sur la ligne de départ le 5 septembre. Jusqu’au 3 octobre, date de la deuxième sélection du jury, réduisant à huit le nombre des prétendants, que du plaisir !A partir de là, la situation se corse, car tous vont accomplir, en troupeau – les recalés étant priés de faire bonne figure – un véritable tour de France à la rencontre des élèves pour le Goncourt des lycéens (décerné le 23 novembre). Le 25 octobre, tombe la troisième liste, plus que quatre concurrents, mais les 16 continuent leur périple, en prison cette fois-ci, à la rencontre des jurés du Goncourt des détenus.Le 7 novembre, la messe est dite, le 400 mètres se transforme en marathon pour le seul lauréat, Jean-Baptiste Andrea, couronné pour Veiller sur elle. Avant sa consécration, le Cannois de 52 ans avait déjà un carnet de bal bien rempli (une centaine de signatures en librairies de septembre à Noël), et ne passait, nous confie-t-il, que deux jours par semaine auprès de sa femme et de sa chienne Lorca, superbe berger allemand noir. Un rythme qui devrait s’accélérer, librairies, médiathèques, manifestations littéraires, tous convoitant le couronné, même tardivement.Jean-Baptiste Andrea a remporté le Goncourt pour “Veiller sur elle”, une fresque de plus de 500 pages qui mêle l’histoire de l’Italie au XXe siècle, un amour contrarié et la passion pour l’art, publié par une petite maison d’édition, L’iconoclaste.Mieux vaut ne pas avoir de métier trop prenantEnfin, il y a les voyages hors frontières, le lauréat étant “à la merci” d’un sacre par l’un ou plusieurs des 36 “choix Goncourt” internationaux, sans parler des éditeurs étrangers qui auront acheté les droits du roman (ils étaient déjà une quinzaine avant l’obtention du prix) et souhaiteront disposer du Français en chair et en os.Mieux vaut ne pas avoir de métier trop prenant… Ce qui est le cas d’Andrea, dévoué à l’écriture. Reste qu’il faut savoir garder tête froide – les honneurs et le pactole pouvant déstabiliser certains lauréats, comme l’ont si bien relaté Jean Carrière, millésime 1972, dans Le Prix d’un Goncourt ou encore Pascal Lainé (1974) avec Sacré Goncourt.On pense aussi à Yann Queffélec, à son million d’exemplaires vendus des Noces barbares (Goncourt 1985) et à ses millions de francs aussi vite dilapidés que gagnés (il acheta derechef une luxueuse voiture de sport, dont il se servit peu et arrosa, entre autres, nombre de ses amis). Pour aider l’élu de 2023 à tout relativiser, on lui conseille la lecture du Paris des Goncourt (Editions Alexandrines) de Robert Kopp, savoureuse évocation du monde littéraire à l’époque des frères Edmond et Jules de Goncourt et récit des pérégrinations parisiennes des deux héritiers, d’un théâtre à un salon en passant par leur maison d’Auteuil.
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Author : Marianne Payot
Publish date : 2023-11-10 13:30:39
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