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Immobilier, télétravail, habitants… La nouvelle France de l’après-Covid

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Covid, réchauffement climatique, télétravail : la société bouge… et les Français aussi. Lorsque l’on entame des études supérieures, que l’on cherche du travail, qu’un enfant agrandit la famille ou que la retraite se profile, on change de localité, parfois de région, à la recherche d’une meilleure qualité de vie.Le démographe Didier Breton, professeur à l’université de Strasbourg, chercheur associé à l’Institut national des études démographiques,et le géographe Sébastien Oliveau, maître de conférences à l’université Aix-Marseille, chercheur au laboratoire Mesopolhis, observent de près ces mouvements de population. Pour l’Express, ils livrent leurs dernières observations sur la France d’après-Covid.L’Express : selon une étude de l’Insee, on enregistrerait depuis le Covid “davantage de départs des pôles des grandes métropoles et de l’aire parisienne”. Partagez-vous cette analyse ?Sébastien Oliveau : Même si ces chiffres ne sont pas définitifs, la réponse est oui : depuis l’épidémie, les grandes métropoles perdent de la population. Un bon salaire dans une grande ville mérite-t-il de sacrifier sa qualité de vie et celle de ses enfants ? Avec les confinements, la question s’est posée avec plus d’acuité, et certaines familles ont répondu “non”.Didier Breton : Il suffit de constater l’évolution du marché de l’immobilier. La hausse des taux d’intérêt pénalise tous les territoires, mais les prix baissent davantage dans les métropoles, parce que la demande y est moindre.Les métropoles affichaient avant la crise un solde migratoire positif. La situation s’est-elle retournée ?S. O. : Oui, on y compte désormais plus de départs que d’arrivées. Mais attention aux erreurs d’analyse ! Dans le même temps, on continue à y enregistrer plus de naissances que de décès, notamment parce qu’elles attirent de jeunes actifs. Au total, le solde naturel est supérieur au solde migratoire et elles continuent donc de gagner des habitants.Le pic de la population parisienne remonte aux années 1920L’Ile-de-France est-elle la grande perdante de ce mouvement ?D. B. : Incontestablement. Son solde migratoire était déjà négatif entre 2016-2021, mais le déficit s’est depuis amplifié.S. O. : La capitale perd en effet plus d’habitants que d’autres métropoles, mais il faut rappeler qu’il s’agit d’une tendance ancienne : le pic de la population parisienne remonte aux années 1920 ! Il faut aussi rappeler que Paris se desserre, c’est-à-dire que certains de ses salariés habitent dans l’Oise, dans l’Eure ou dans la Marne, soit en dehors de l’Ile-de-France. C’est pourquoi je préfère parler de rééquilibrage. L’aire urbaine parisienne représente environ 20 % de la population totale du pays. Si cette part diminue un peu, cela n’a rien de dramatique, surtout si cela entraîne une baisse des prix de l’immobilier.Cette tendance à la “démétropolisation” est-elle durable ?S. O. : Il est trop tôt pour le dire car il faut compter avec les phénomènes d’inertie. Nous nous trouvons en fait devant deux hypothèses. Soit ceux qui sont partis étaient prêts depuis longtemps, ce qui signifierait que le mouvement prendra fin rapidement. Soit ces précurseurs ont au contraire donné des idées aux autres et il est alors possible que l’on soit au début d’un phénomène de plus grande ampleur qui va se poursuivre. Seuls les prochains recensements permettront de trancher.On ne peut donc pas en conclure qu’il y a un “exode urbain” depuis l’épidémie…S. O. : Le terme paraît en effet excessif. Les campagnes qui gagnent des habitants, notamment autour de Toulouse, de Rennes, de Montpellier ou de Paris, sont souvent celles qui fonctionnent en lien avec les grandes agglomérations.Précisément : où se sont installées les populations qui ont quitté les métropoles ?S. O. Pour l’essentiel, dans les villes petites et moyennes qui étaient déjà attractives auparavant, en particulier le long du littoral atlantique. Il en va donc de même pour les campagnes situées à proximité des métropoles dynamiques et enfin pour les villes isolées, mais dynamiques, comme Vitré ou Les Herbiers. En ce sens, l’épidémie a surtout amplifié des tendances préexistantes.L’intérieur des terres accueille-t-il davantage d’habitants que par le passé ?D. B. : Non. La “diagonale du vide”, qui court du nord-est au centre des Pyrénées en passant par le Massif central, ne s’est pas résorbée, malheureusement. Et c’est logique car, dans les redistributions de population, les transports jouent un rôle majeur. Changer de lieu de vie est une chose, mais comme les lieux de travail restent globalement les mêmes, il y a une prime évidente pour les territoires bien reliés aux grandes métropoles, que ce soit par le train ou par la voiture.S. O. : Pour le moment, on n’observe pas de mouvements significatifs en Lozère, en Creuse, en Bourgogne ou dans le nord-est du pays. Ces territoires en crise démographique continuent de perdre des habitants – peut-être un peu moins qu’avant.Peut-on dire que le Covid et le télétravail ont modifié le choix du lieu de résidence des Français et que celui-ci est désormais moins déterminé par l’emploi et davantage par des choix de vie personnelle ?D. B. : Cela me paraît évident, et le phénomène est encore plus prégnant chez les jeunes actifs. Le Covid a servi de déclencheur, d’autant qu’avec le télétravail, il est possible de garder son emploi à Paris sans y résider en permanence. Si la semaine de quatre jours devait se développer, la décorrélation entre lieu de vie et lieu de travail pourrait encore augmenter.S. O. : L’effet télétravail est réel, mais il ne doit pas être surestimé, pour deux raisons. En premier lieu, tout le monde ne peut pas télétravailler : les infirmiers, les commerçants, les éboueurs – entre autres – doivent se rendre chaque jour à leur poste de travail. Deuxièmement, certaines entreprises commencent à faire machine arrière dans ce domaine car le tout-télétravail complique les relations entre collègues. Il est donc probable que ce mouvement diminue dans les prochaines années. J’ajoute que le réchauffement climatique pourrait venir bouleverser ces tendances post-Covid. Les canicules seront de moins en moins bien supportées à l’avenir. Cela devrait desservir les régions méditerranéennes et profiter une fois encore au littoral atlantique.Un article du dossier spécial de L’Express “Villes”, publié dans l’hebdo du 16 novembre



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Author : Michel Feltin-Palas

Publish date : 2023-11-13 04:48:51

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Tags :L’Express

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