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Guerre avec le Hamas : l’agenda caché de l’extrême droite israélienne

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Bezalel Smotrich est un enfant des colonies israéliennes en Cisjordanie. Fils de rabbin, cet homme de 43 ans, plutôt élégant et discret, a grandi dans une école talmudique d’une colonie religieuse près de Ramallah, où il a développé son apprentissage de la Torah… et une haine viscérale des Palestiniens.Dans un texte publié en 2017, cet avocat devenu député détaille sur plus de 20 pages son “plan décisif pour Israël” : enterrer tout espoir d’un Etat palestinien, annexer totalement la Cisjordanie, interdire la citoyenneté et le droit de vote aux Palestiniens restés sur place, encourager un maximum d’entre eux à l’exil… En résumé, que seuls les Israéliens aient le droit de peupler les deux régions au cœur de ce que le peuple juif considère comme sa patrie historique : la Judée au sud de Jérusalem, la Samarie au nord.Leur objectif : “le moins possible de Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie”Six ans après la publication de ce pamphlet, Bezalel Smotrich se retrouve à la tête du ministère des Finances israélien, avec un droit de regard spécial sur les activités militaires en Cisjordanie. Fort de ses 10 % aux législatives, son parti suprémaciste a fait alliance avec Benyamin Netanyahou en décembre 2022, obtenant de nombreux postes clés. Avec un programme qui fait froid dans le dos. “Leur objectif a toujours été constant : ils veulent le moins possible de Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, ou au minimum les priver de tout pouvoir politique”, résume Paul Scham, spécialiste d’Israël et professeur à l’Université du Maryland.Aujourd’hui, l’idéologue profite de la confusion née des attaques du Hamas le 7 octobre et de la guerre dans la bande de Gaza pour faire avancer son plan en Cisjordanie. Depuis un mois, ces territoires connaissent une flambée de violence entre soldats, colons et Palestiniens, faisant redouter l’émergence d’un nouveau front pour l’armée israélienne, déjà mobilisée contre le Hamas au sud et menacée par le Hezbollah libanais au nord.Ces affrontements ne doivent pourtant rien au hasard. “Depuis le 7 octobre, Bezalel Smotrich reste silencieux en public, mais en coulisses il est extrêmement actif pour transformer sa vision de la Cisjordanie en réalité, pose Michael Koplow, directeur de recherches au Israel Policy Forum, à New York. Il tente par exemple de faire interdire la récolte des olives en Cisjordanie, afin de pousser les Palestiniens à quitter leurs terres et rendre plus facile l’annexion. Lui et ses alliés se concentrent sur ce territoire, leur priorité historique, et profitent du fait qu’Israël soit focalisé sur les combats à Gaza.”Dans la mise en œuvre de son plan pour la Cisjordanie, Bezalel Smotrich peut compter sur des alliés de poids au sein du gouvernement israélien. Le ministre du Patrimoine, par exemple, l’obscur Amichay Eliyahu, qui a déclaré début novembre qu’envoyer une bombe nucléaire sur Gaza “était une option”. Une déclaration incendiaire bienvenue pour détourner l’attention… Ou encore sur le très influent ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir. Son obsession personnelle : armer un maximum de citoyens juifs pour se défendre contre les Palestiniens et les Arabes supposément favorables au Hamas. “Depuis l’attaque du 7 octobre, Ben-Gvir distribue des permis de port d’armes à la chaîne, poursuit Michael Koplow. Il forme aussi ce qu’il appelle des ‘équipes de défense communautaire’ : il rassemble des civils, leur fournit des armes à feu, puis leur demande d’organiser leurs propres groupes défensifs pour se protéger de leurs voisins. Il le fait à la fois en Israël, dans les quartiers proches des villes à majorité arabe, mais aussi dans les colonies de Cisjordanie.” Pour ses (nombreux) détracteurs, le ministre de la Sécurité nationale crée ainsi un véritable réseau de milices privées, avec d’immenses risques de dérapage.Les ambitions territoriales de l’extrême droite ne s’arrêtent pas à la Cisjordanie. Pour cette frange politique, la seule présence de Palestiniens peut être assimilée à une menace existentielle pour l’Etat hébreu. “Les partis nationalistes religieux disent qu’Israël doit se réinstaller à Gaza, non seulement avec ses forces militaires mais aussi avec ses colonies, souligne Liran Harsgor, politologue à l’université de Haïfa. D’après eux, les colonies contribuent à la sécurité d’Israël en créant des zones tampons. Ils estiment que dès qu’Israël fait évacuer ses colonies, comme dans la bande de Gaza, la terreur s’installe.” Plusieurs colons se portent déjà volontaires pour retourner occuper des territoires près de Gaza, d’où 7500 Israéliens avaient été déplacés en 2005 dans le cadre du retrait militaire décidé par Ariel Sharon.Après le 7 octobre, un risque de propagation de leur idéologie ?Reste que, dans leur grande majorité, les Israéliens continuent d’être opposés à la colonisation des territoires palestiniens. Jusqu’ici, ils préféraient toutefois l’ignorer, détournant les yeux de ce processus illégal au regard du droit international. Comment leurs idées vont-elles évoluer, dans le brouillard de la guerre et des massacres du Hamas ? “Les effets du 7 octobre sur la population israélienne et son état d’esprit se feront sentir sur le très long terme, estime la politologue Liran Harsgor. A court terme, on voit déjà monter un fort sentiment anti-Arabes, que l’extrême droite tente d’exploiter pour gagner du pouvoir. D’un autre côté, ce camp politique fait partie du gouvernement qui a échoué à les protéger et qui chute à un niveau historiquement bas dans les sondages.”Selon une écrasante majorité d’analystes, ce gouvernement ne résistera pas au fiasco sécuritaire du 7 octobre. Pour l’instant, seule l’obstination de Benyamin Netanyahou à se maintenir au pouvoir préserve ces ministres, d’autant que l’administration américaine hausse de plus en plus le ton contre cette frange extrémiste et l’accélération de la colonisation en Cisjordanie. “Netanyahou, dont l’unique objectif est d’échapper à la prison [NDLR : le Premier ministre est poursuivi dans plusieurs affaires de corruption], est pris au piège de l’extrême droite depuis la formation de son gouvernement, pointe Paul Scham. Ces ministres constituent un énorme fardeau pour Israël. On assiste à un désastre humanitaire à Gaza, avec des milliers de Palestiniens tués en un mois, et des ministres se permettent des déclarations complètement dingues… Certains vont croire que c’est la position officielle du gouvernement israélien, ce qui n’est pas le cas, et cela montre un pouvoir en plein désarroi.”Smotrich, Ben-Gvir et autres Eliyahu devraient pouvoir compter sur un sursis de plusieurs mois, jusqu’à la fin de la guerre. Le temps pour eux de créer encore davantage de dégâts, et de faire avancer un peu plus leur “plan définitif” pour Israël.



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Author : Corentin Pennarguear

Publish date : 2023-11-14 04:45:57

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Tags :L’Express

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