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Le français survivrait-il au Canada ou en Suisse avec le statut des langues régionales en France ?

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Il suffit souvent de se mettre à la place des autres pour comprendre leurs points de vue. Aussi vais-je commencer cette semaine par vous demander un petit effort d’imagination :– Imaginez que, demain, dans toutes les écoles du Canada, il faille parler en anglais, et seulement en anglais, y compris au Québec.– Imaginez que, demain, dans toutes les entreprises belges, il faille parler en flamand, et seulement en flamand, y compris en Wallonie.– Imaginez que, demain, dans toutes les assemblées politiques suisses, il faille parler en allemand, et seulement en allemand, y compris à Genève.VOUS SOUHAITEZ RECEVOIR CETTE LETTRE D’INFORMATION ? >>Cliquez iciJ’en suis convaincu : devant une telle perspective, les plus chauds partisans du “tout-français” en France se mueraient aussitôt en militants acharnés de la diversité linguistique. Ils s’opposeraient de toutes leurs forces à ces mesures menaçant la langue de Molière dans ces différents pays. Et leurs craintes n’auraient rien d’illusoire, car, je l’explique ici régulièrement, les langues ne déclinent pas par hasard : elles sont le plus souvent victimes de mesures défavorables décidées par des Etats à leur encontre. L’avenir de la francophonie dépend donc en grande partie des dispositions qui seront prises – ou non – en faveur du français dans l’enseignement, les entreprises, les administrations, les assemblées politiques, etc.Beaucoup d’entre vous m’ont évidemment vu venir, mais j’assume. On vient de le voir : le français ne survivrait pas longtemps au Canada, en Belgique et en Suisse sans être présent de manière significative dans la vie publique. Eh bien, il en va de même pour le breton, le basque, l’alsacien, l’occitan, le picard, le normand, le créole réunionnais et toutes les autres langues de France. “Une langue ne peut fonctionner et se transmettre sainement que si elle peut être la langue de toutes les activités d’une société, des plus familières aux plus publiques, des plus simples aux plus élaborées, des plus humbles aux plus prestigieuses, rappelle le linguiste Patrick Sauzet. L’enfermement des langues régionales dans le quotidien et l’informel a préludé à leur disparition programmée. Combien de temps pense-t-on que le français vivrait, au Québec comme à Paris, s’il était absent de l’école, des médias et de la vie publique, renvoyé à la seule sphère privée ? Pourquoi exiger des langues régionales qu’elles survivent dans des conditions objectivement impossibles ?”Patrick Sauzet a raison. Les langues minoritaires de France ne peuvent se maintenir sans être significativement présentes dans l’ensemble des lieux de la vie publique – au côté du français, qui doit rester notre langue commune – et en particulier dans l’enseignement. Or, non seulement ce n’est pas le cas, mais le Conseil constitutionnel a jugé en 2021 que, à l’école, la méthode dite “immersive”, cette pédagogie qui privilégie l’emploi de la langue minoritaire pendant la plupart des cours pourtant en vigueur dans les lycées français à l’étranger, était contraire à la Loi fondamentale dans les établissements publics pour ce qui concerne les langues dites régionales. Ce faisant, il a condamné la pédagogie jugée la plus efficace pour assurer leur transmission ! Je suis désolé si les lignes qui suivent heurtent certains d’entre vous, mais il faut dire les choses comme elles sont : cela s’appelle un ethnocide, c’est-à-dire une entreprise consistant, pour un peuple donné, à imposer sa langue et sa culture à d’autres peuples, en faisant disparaître les leurs.Une entreprise d’éradication linguistiqueSacrilège ! En écrivant “peuples”, je viens d’aggraver mon cas en employant un pluriel interdit par ledit Conseil constitutionnel. En effet, pour justifier le massacre culturel qu’elle enfante dans les faits, l’institution soutient le curieux raisonnement suivant. 1) Il n’existe en France qu’un seul peuple : le peuple français. 2) Les Basques, les Bretons, les Martiniquais et les autres ne forment donc pas des peuples. 3) En détruisant leurs cultures, on ne détruit en conséquence la culture d’aucun peuple puisque ces peuples n’existent pas. CQFD !Devant tant de mauvaise foi, il m’arrive parfois de perdre mes nerfs et de souhaiter que les homologues des prétendus sages du Palais Royal reprennent cette brillante démonstration au détriment du français au Canada, en Belgique, en Suisse et dans tous les pays de la francophonie. Peut-être alors s’apercevrait-on que nos principes présentés comme “universalistes” ne sont qu’une manière de camoufler une entreprise d’éradication linguistique qui ne dit pas son nom.Et puis je me calme, et j’expose la position qui est véritablement la mienne, celle d’un défenseur de la diversité culturelle. Je commence par souligner que, avec 6 000 langues pour seulement 200 Etats dans le monde, le multilinguisme est la règle et non l’exception. Je continue en insistant sur la différence essentielle entre la notion de “français langue commune” – qui ne pose aucun problème – et celle de français langue unique – synonyme de standardisation et d’appauvrissement culturels. Et je termin en rappelant aux distraits que, depuis sa naissance, la France a toujours été un pays multilingue. Et que cela ne l’a pas empêché d’exister.RETROUVEZ DES VIDÉOS CONSACRÉES AU FRANÇAIS ET AUX LANGUES DE FRANCE SUR ma chaîne YouTubeÀ LIRE AILLEURSCultivons la langue française !Pourquoi dit-on “quatre-vingts” et pas “trois-vingts” ? Pourquoi dit-on “grand-mère” et pas “grande-mère” ? Pourquoi dit-on un “petit [t] ami” et pas un “chat [t] affamé” ? Mon dernier livre, qui vient de paraître, répond à ces questions et à beaucoup d’autres en reprenant de nombreux articles publiés dans cette lettre d’information. Avec un parti pris : montrer que l’on peut s’amuser avec notre langue nationale.Cultivons la langue française !, par Michel Feltin-Palas (Editions Héliopoles).“En français, le masculin fait l’homme, le dominant, il ne ‘fait pas le neutre’”Le 30 octobre, lors de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, Emmanuel Macron avait affirmé que “le masculin [faisait] le neutre”. En réponse, un collectif d’universitaires, de politiques, d’artistes, d’autrices et de militants féministes exprime son désaccord en proclamant : “En français, le masculin fait l’homme, le dominant, il ne ‘fait pas le neutre’.”Connaissez-vous l’infodémie ?Ce nouveau terme désigne la prolifération d’informations souvent trompeuses relatives à un même sujet, notamment sur les réseaux sociaux. Il a pour équivalent anglais “infodemic”. 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Avec pour modèle l’Académie des langues kanak de Nouvelle-Calédonie, dont une délégation vient de se rendre dans la collectivité territoriale amérindienne.Assistez à L’chérémonie d’ermise ed chés Pris ed litérature in picard 2023Le samedi 18 novembre, à 17 heures, aura lieu, à la Comédie de Picardie, à Amiens, L’chérémonie d’ermise ed chés Pris ed litérature in picard 2023. Une cérémonie qui récompensera des auteurs picards. Dont, notamment, Fernand Dendoncker, lauréat du premier prix pour Ein beon matelas, au beon momint ! (Entrée gratuite.)À REGARDERL’incroyable succès des concerts des 50 ans de NadauLe groupe occitan Nadau est largement ignoré des médias parisiens, mais il vient de remplir trois soirs de suite le Zénith de Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques, à l’occasion de ses 50 ans. Une nouvelle date est déjà prévue en février prochain. 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Author : Michel Feltin-Palas

Publish date : 2023-11-14 04:49:13

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