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Faillites d’entreprises : inquiétude autour des PME

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La santé des entreprises françaises est surveillée comme le lait sur le feu. Nouveaux chiffres du mois d’octobre à l’appui, la Banque de France se veut rassurante. “Nous comptons 52 695 défaillances cumulées sur les 12 derniers mois, ce qui reste bien inférieur à la moyenne historique sur 2010-2019, de l’ordre de 59 000 par an”, souligne Emilie Quema, directrice des Entreprises. Et si le taux de croissance de 36 % d’une année sur l’autre peut impressionner, il doit être relativisé. D’abord, parce que le point de comparaison d’octobre 2022 est très bas – les aides publiques durant la période Covid ont apporté un sursis à nombre de sociétés et gelé les défaillances, y compris des plus fragiles. Ensuite, parce que ce rebond ralentit : en mars dernier, la hausse annuelle dépassait 50 %.Plus de 210 000 emplois menacésPas de quoi s’inquiéter alors ? Si le ciel n’est pas encore à l’orage, les nuages gris s’accumulent néanmoins. Avec comme premier motif de préoccupation la taille des intéressés. “Les microentreprises [NDLR : moins de 10 salariés] constituent 90 % des défaillances. Mais ces derniers mois, les entreprises de plus grosse taille, PME voire ETI, sont de plus en plus concernées”, reconnaît Emilie Quema. Le directeur général de Rexecode Denis Ferrand enfonce le clou. “Hors micro-entreprises, le nombre de défaillances dépasse 2019 et même la sortie de crise de 2008-2009, c’est un changement d’ère”. Le cabinet Altares juge que les PME représentent aujourd’hui 8,2 % des défauts, soit 2 points de plus qu’à l’été 2019.Avec un impact économique potentiel d’autant plus douloureux. Pour l’évaluer, la Banque de France estime les emplois “menacés”, compilation du nombre de salariés des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaires. Historiquement, le compteur tourne autour de 170 000. Fin octobre, ils seraient plus de 210 000. “Toutefois, rappelons que plus d’un million d’emplois nets ont été créés entre le quatrième trimestre 2019 et mi-2022, et il n’y a jamais eu autant de gens qui travaillent en France”, nuance Emilie Quema, ajoutant qu’on a dénombré “26 fois plus de créations d’entreprises que de sociétés en cessation de paiement” sur l’année écoulée. Mais au-delà des postes directement menacés, d’autres risques émergent : une PME qui disparaît, ce sont des fournisseurs qui perdent leurs créances passées, leurs revenus futurs, et un tissu local de commerces dont la clientèle de salariés s’évapore.”On entre dans le dur”Tous les yeux sont donc rivés vers 2024 et la crainte de voir la France se heurter à un mur de faillites. Les indicateurs macroéconomiques n’ont pas encore viré au rouge. Pas de récession à l’horizon dans l’Hexagone, contrairement à ses grands voisins, un faible taux de chômage et même une inflation qui décélère. Mais alors que les problèmes d’approvisionnement ou de pénurie de main-d’œuvre ne sont pas tout à fait résolus, les entreprises disent buter sur la demande. “Jusqu’ici, le contexte était propice à un relèvement des prix pour compenser la hausse des coûts. Cette période est terminée, assène Denis Ferrand. A cela s’ajoute l’augmentation des charges financières, qui va mordre les marges de façon spectaculaire : 10 points du résultat brut d’exploitation sont aujourd’hui dévolus au paiement des intérêts des crédits, contre zéro l’an dernier !”L’économiste souligne aussi les tendances préoccupantes de la dernière enquête de Bpifrance auprès des TPE et PME : “Tous les indicateurs se dégradent, sans s’effondrer pour autant. Les délais de paiement sont jugés élevés, une proportion croissante de chefs d’entreprise déclare que l’accès au financement bancaire est difficile, les trésoreries s’érodent… On entre dans le dur”. A la CPME, les remontées des patrons adhérents ne sont guère plus encourageantes, témoigne son président François Asselin. “Dans le secteur du travail temporaire, on observe un ralentissement des embauches, un indicateur avancé. Et l’immobilier, souvent locomotive de l’économie, est sinistré”, déplore-t-il. Le directeur des études d’Altares, Thierry Millon, confirme le dernier point : “Le retournement a été violent avec la remontée des taux. Les agences immobilières et les promoteurs dans le résidentiel ont été en première ligne. Depuis le début de l’été, la hausse des défaillances s’accélère parmi les acteurs du second œuvre, comme les électriciens ou les plâtriers. Le gros œuvre est à son tour à risque, avec des carnets de commandes qui s’épuisent”. L’expert rappelle que la construction, historiquement, concentre un quart des défauts annuels et s’attend à ce que cette proportion augmente en 2024. Autres secteurs sur la brèche : l’automobile – les concessionnaires notamment – ainsi que, dans l’alimentaire, les supérettes et autres épiceries. Thierry Millon constate aussi des “tensions croissantes dans la métallurgie, l’imprimerie, le traitement des déchets…”.Dettes sociales et remboursement des PGEDans cette économie tricolore qui commence à ronronner, l’impossibilité de faire face à une échéance peut intervenir brutalement pour une entreprise confrontée à l’envolée de ses coûts, à des dettes sociales dues à l’Urssaf, ou encore au remboursement de son prêt garanti par l’Etat (PGE), ces crédits bancaires distribués à tour de bras pendant la crise sanitaire pour permettre aux petites sociétés de braver la tempête.La Banque de France suit ce poste pour le compte de Bercy. “143 milliards d’euros de PGE ont été accordés au total, souvent pour une durée de 6 ans. Les dernières échéances arriveront en 2026-2027 mais plus de la moitié des PGE ont déjà été remboursés. On ne constate pas dans nos chiffres de difficulté sur ce sujet, affirme Emilie Quema. Ce dispositif a bien fonctionné, il a aidé les bonnes entreprises au bon moment”. Certes mais, “dans les petites structures, les dirigeants ne se payent plus pour pouvoir rembourser leur PGE. Il y a beaucoup de fragilités”, alerte François Asselin.



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Author : Muriel Breiman

Publish date : 2023-11-15 10:00:00

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Tags :L’Express

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