67,5 milliards d’euros. C’est le montant cumulé des dividendes versés aux actionnaires en 2023 par les entreprises cotées appartenant à l’indice CAC 40. Une somme permise par leurs résultats financiers de l’année 2022. Une “cagnotte” loin d’être négligeable puisqu’elle représente 48 % des bénéfices cumulés en 2022. C’est la raison pour laquelle le dividende va contribuer, tout comme le cours de Bourse, à la performance financière globale d’une action et à son attractivité.Quand une société est profitable, elle dégage des bénéfices, qui vont être mobilisés pour répondre à différents objectifs. Avant tout, elle peut utiliser cette somme pour son propre compte, en investissant dans du matériel, des procédés, de la recherche et développement ou réaliser des acquisitions. Cette option est privilégiée par les entreprises dites de “croissance”, comme c’est le cas pour une grande majorité des acteurs technologiques. Elle peut aussi rembourser par anticipation une partie de ses emprunts afin de réduire sa dette et améliorer sa solidité financière. Elle peut également décider d’en faire profiter ses salariés, en redistribuant une partie sous la forme d’augmentations de salaires ou de primes. Elle peut encore placer ces profits dans des instruments financiers de court à moyen terme (monétaire, obligataire) pour les garder sous la main. Enfin, elle peut récompenser ses actionnaires en leur versant du dividende. Généralement, les entreprises panachent ces différentes possibilités, en hiérarchisant les priorités en fonction de leurs intérêts stratégiques.Dans un rapport publié en août dernier, le gestionnaire d’actifs Janus Henderson analyse le montant et l’évolution des dividendes distribués à l’échelle mondiale par les plus grandes multinationales. Selon cette étude, ils “ont atteint le chiffre record de 568,1 milliards de dollars sur le deuxième trimestre 2023, soit une hausse globale de 4,9 % par rapport au deuxième trimestre 2022”. Avec une progression de 9,7 % sur un an, ce sont les groupes européens (hors Royaume-Uni) qui affichent la plus forte augmentation sur cette période, devant le Japon (+ 6 %), l’Asie hors Japon (+ 4,5 %) et l’Amérique du Nord (+ 4,2 %). Dans cette classe, les grandes compagnies tricolores jouent les très bons élèves. Leur part représente 30 % des montants versés en Europe, les classant devant les firmes allemandes. “En France, les distributions ont augmenté de 10,3 % sur un an, souligne l’étude. L’énergéticien Engie est le principal contributeur, augmentant son dividende de deux tiers grâce à l’explosion de ses bénéfices, sur fond de hausse des prix de l’énergie.”10 valeursUn signal fort adressé aux actionnairesComment expliquer cette appétence à gratifier les actionnaires ? Plusieurs motifs favorisent cette tendance. “Une entreprise qui verse du dividende lance un signal fort à ses actionnaires dans le sens où elle démontre que son activité est profitable et dégage suffisamment de liquidités pour lui permettre non seulement d’investir, mais aussi de les récompenser financièrement, constate Franklin Pichard, directeur général chez Kiplink Finance. C’est également un moyen d’attirer de nouveaux investisseurs et de les fidéliser sur le long terme afin d’obtenir un socle stable au niveau de la répartition de son capital. Ce qui peut être une bonne arme à la fois pour limiter la volatilité de son cours de Bourse et mieux faire face à une offre d’achat hostile de la part d’un concurrent.”Pour l’investisseur ayant une optique patrimoniale, désireux de garder ses titres pendant plusieurs années, le choix d’intégrer dans son portefeuille une dose de ces valeurs dites de rendement, octroyant régulièrement de juteux dividendes, a tout son sens. Les gestionnaires professionnels ne font d’ailleurs par l’impasse sur ce sujet. “Avant d’investir dans une valeur, nous regardons avec attention quatre grandes composantes, détaille Bastien Guillaud, gérant chez Matignon Finances. Il s’agit à la fois d’identifier la capacité d’un groupe à créer de la croissance, de déterminer sa solidité financière en analysant notamment son taux d’endettement et sa génération de trésorerie, d’évaluer son niveau de valorisation, de savoir s’il est cher ou pas, et enfin d’apprécier les rendements qu’il affiche via le versement d’un dividende et le rachat d’actions.”De belles performances à long termeCar, même si les placements en actions peuvent offrir de belles performances sur le long terme, ils n’en demeurent pas moins risqués. La hausse des résultats d’une entreprise et, par là même, la progression du cours de son action, dépend d’une multitude de facteurs externes – comme la qualité de l’environnement économique -, et internes : sa solidité financière, la pertinence de sa stratégie de développement ou encore de l’intensité concurrentielle. Résultat : à tout instant, un grain de sable peut venir gripper la mécanique, affecter ses performances et faire chuter son cours de Bourse. En sélectionnant quelques valeurs de rendement, vous bénéficiez en quelque sorte d’une assurance qui offre, au-delà de l’évolution de ce dernier, une “prime” financière distribuée régulièrement. Celle-ci est payée la plupart du temps en espèces. Certaines sociétés proposent également un règlement en actions.Pour calculer le rendement d’une action, il suffit de diviser le montant versé pour chaque titre par le cours de celui-ci, puis de multiplier le total par 100 pour obtenir un pourcentage. Ainsi, prenons l’exemple d’Engie qui a octroyé en mai 2023 un dividende de 1,40 euro pour un cours de Bourse de 14,50 euros : son rendement s’élève à 9,7 %.”Mais attention, il ne faut pas systématiquement choisir les groupes qui offrent les rendements les plus élevés, avertit Franklin Pichard. Il faut s’assurer que ceux-ci sont bien liés à une vraie culture d’entreprise récurrente au fil des années et vérifier qu’ils ne sont pas le fruit d’une baisse sensible de leur cours de Bourse.” Il est donc pertinent d’étudier la régularité de l’octroi de dividende d’une valeur boursière sur les années passées pour voir si elle répond à ces critères ou s’il s’agit d’un phénomène passager.Le rendement peut être aussi amélioré si la société procède à des programmes de rachat d’actions. Au cours de cette opération, elle mobilise une partie de ses liquidités pour acquérir en Bourse ses propres titres qu’elle va ensuite détruire, ce qui entraîne une baisse de son capital. Qui dit moins d’actions en circulation dit aussi, pour une même somme distribuée, un montant par titre en progression, donc un rendement plus élevé. TotalEnergies, par exemple, est très actif dans ce domaine. Le groupe a précisé, fin septembre, qu’il comptait mener un vaste programme de rachat d’actions en 2023, d’un montant de 8,5 milliards d’euros. Résultat, si le rendement calculé sur le “dividende pur” est de 6,2 %, il dépasse les 10 % en incluant cette opération.Le profil des compagnies qui versent de beaux dividendes, réguliers dans le temps, est assez ciblé. Il s’agit essentiellement de sociétés “matures”, déjà bien industrialisées et équipées, installées sur leurs marchés et qui ont une activité parfois cyclique mais très rentable, leur permettant de dégager des bénéfices robustes sans être obligés de mobiliser de lourds investissements. Elles ont généralement un bilan solide avec peu de dettes.Le secteur bancaire loin devant les autresEn outre, le rapport de Janus Henderson met en avant les secteurs les plus généreux : la banque arrive loin devant les autres avec 152 milliards de dollars distribués au niveau mondial, devant les biens de consommation (94,5 milliards de dollars), l’industrie (49,5 milliards) et les producteurs de pétrole et d’énergie (41,6 milliards). En France, “ces sociétés sont positionnées sur le secteur bancaire, à l’image de BNP Paribas, et des assurances, avec Axa, analyse Olivier Cornuot, directeur de la gestion collective à Matignon Finances. Dans l’énergie, TotalEnergies est une usine à cash, réalisant des profits significatifs tant que le baril de pétrole se situe au-dessus des 50 dollars. Citons aussi l’énergéticien Engie, acteur majeur qui offre une belle visibilité quant à la progression de ses résultats.”La visibilité est bel et bien l’objectif recherché lorsqu’on met une dose de rendement dans son portefeuille. C’est là opter pour la raison. En effet, ces entreprises ne font pas toujours rêver, car elles n’offrent pas forcément une croissance à deux chiffres, mais elles sont solides et profitables sur la durée.
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Author : Arthur Teo
Publish date : 2023-11-17 12:59:03
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