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Guerre en Ukraine : comment la Russie de Poutine utilise ses prisonniers sur le front

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Nikolaï Ogolobiak ne devait pas connaître la liberté avant 2030 : reconnu coupable de plusieurs crimes satanistes et cannibales, il avait été condamné en 2010 à 20 ans de colonie pénitentiaire par un tribunal russe. Selon le média local 76.ru, l’homme est pourtant rentré chez lui en toute légalité début novembre, dans la province de Iaroslav, à l’est de Moscou. La guerre en Ukraine a changé le sort des prisonniers russes, redevenus des hommes libres après un passage sur le front.Comme d’autres condamnés, Nikolaï Ogolobiak a bénéficié d’une grâce présidentielle, une rétribution pour son engagement dans les rangs de l’armée. D’autres récits se fraient parfois un chemin dans les médias, comme celui de la mère de Vera Pekhteleva, tuée en 2020 par son ex-compagnon. Condamné à 17 ans de prison, il est finalement gracié en avril 2023 après avoir combattu en Ukraine, ce que la famille de la victime apprendra deux mois plus tard. “Je ne comprends pas qui peut laisser ces gens prendre les armes”, confie la mère de Vera Pekhteleva au média indépendant Meduza en juin dernier.Interrogé mercredi 22 novembre, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, l’a pourtant réaffirmé : le gouvernement russe n’a pas l’intention d’infléchir sa position en matière de grâces présidentielles, “liées à une présence en première ligne, à une durée certaine passée en première ligne, liées à une participation à des groupes d’assaut”.100 000 détenus en moinsCette politique, ébruitée depuis l’été 2022, est confirmée officiellement par Vladimir Poutine en juin 2023. En échange de leur enrôlement dans l’armée, l’Etat promet à des détenus de leur éviter un retour en prison, et la remise d’une somme d’argent. Rien de très nouveau en Russie : depuis ses débuts en 2014 etjusqu’en février 2023, l’organisation paramilitaire Wagner avait pris l’habitude de se rendre dans les prisons pour ses campagnes de recrutement.Une méthode qui laisse des traces dans les prisons : selon le média indépendant Mediazona, quelque 23 000 détenus auraient quitté les prisons du pays entre les seuls mois de septembre et octobre 2022. Selon des informations dévoilées par le Washington Post fin octobre, la Russie aurait libéré près de 100 000 prisonniers depuis le début de la guerre en Ukraine. Les autorités ont d’ailleurs fait le choix de ne plus publier de statistiques officielles sur le nombre de détenus.Dans ce dédale de chiffres, et dans un Etat qui a fait de l’opacité son maître-mot, impossible de connaître les parcours de ces prisonniers libérés, et le nombre d’anciens détenus revenus chez eux. L’hypothèse de leur mort avant d’être graciés ne peut d’ailleurs pas être exclue.Eviter la conscription généraliséeRéagissant mercredi à la déclaration de Dmitri Peskov sur la poursuite de cette politique, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé qu'”à ce stade, l’armée russe a fait des prisonniers sa principale source de compensation des pertes sur le champ de bataille”. Malgré les investissements de Vladimir Poutine dans le secteur militaire, “l’opération spéciale [nom donné à l’invasion de l’Ukraine par la Russie] n’a pas réussi comme Vladimir Poutine l’espérait, constate auprès de L’Express le général Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue défense nationale, il a donc fallu compenser les importantes pertes humaines, évaluées à près de 150 000 hommes”.Mais l’acceptabilité du conflit par la population russe est un autre défi du chef d’Etat, qui veut éviter de recourir à une conscription généralisée de la population, et connaître un nouveau départ massif de Russes à l’étranger comme cela avait été le cas à la fin de l’année 2022.Le recrutement des prisonniers fait donc partie d’une série de stratégies mises en place par le Kremlin pour “faire peser l’effort de guerre sur une partie de la population non contestataire”, explique Jérôme Pellistrandi. “Les prisonniers russes envoyés sur le front n’ont pas grand-chose à perdre”, poursuit-il. Afin de recruter dans les régions pauvres, la Russie a également augmenté le niveau de revenu des soldats, tout en indemnisant les familles des combattants blessés ou morts sur le front, jusqu’à des dizaines de milliers d’euros.Mais cette arrivée de condamnés sur le front ukrainien peut aussi avoir un impact sur le comportement des militaires au front. “Cela se traduit par une forme de violence dans le comportement des forces russes”, avance le général Jérôme Pellistrandi. Si, selon lui, le retour de ses prisonniers graciés n’aura pas d’effet conséquent sur l’acceptation de la guerre au sein de la population, leur incorporation dans l’armée pourra néanmoins se traduire à plus long terme sur le niveau de violence dans la société russe, avec un fort “impact psychiatrique sur les vétérans”.



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Publish date : 2023-11-22 16:36:08

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