Pour la première fois en quatre ans, les dirigeants européens se rendent en personne à Pékin pour un sommet Chine – Union européenne (UE). La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, le président du Conseil européen, Charles Michel ont rencontré ce jeudi 7 décembre au matin le président chinois, Xi Jinping, avant de s’entretenir dans l’après-midi avec le Premier ministre Li Qiang.”La Chine est le plus important partenaire commercial de l’UE”, a rappelé Ursula von der Leyen à Pékin face au président chinois, “mais il y a clairement des déséquilibres et différences que nous devons traiter”. “Nous devons répondre ensemble aux défis mondiaux et travailler ensemble pour promouvoir la stabilité et la prospérité dans le monde”, a déclaré de son côté Xi Jinping lors de cette première rencontre avec le duo à la tête de l’Europe.Le commerce, principal point d’achoppementLe dernier sommet, en avril 2022, avait été qualifié de “dialogue de sourds” par Josep Borrell, haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères. Il est vrai que les sujets de discorde sont nombreux et les points de vue semblent irréconciliables. Les intérêts commerciaux divergent et seront le principal sujet de conversation d’après Cyrille Bret, chercheur associé à l’Institut Delors. “La principale politique européenne fédéralisée concerne les sujets économiques, la délégation européenne pourra donc s’engager au nom de l’Union européenne sur ce point”, souligne auprès de L’Express le spécialiste en relations internationales. D’autant plus que le sujet est majeur : le déficit commercial entre la Chine et l’Union européenne s’élevait à environ 400 000 milliards d’euros dont une trentaines de milliards d’euros de déficit pour la France. “C’est un sujet important pour les deux puissances, y compris pour la Chine qui est très dépendante des exportations”, précise Cyrille Bret. Les deux principales puissances commerciales du monde aborderont donc pour la 24e fois, en l’espace de 24 sommets, ces questions majeures. Aucune déclaration ne sera d’ailleurs publiée jeudi à l’issue des entretiens, ont déclaré des responsables de l’UE.”Le sommet va servir à constater les désaccords, les tensions et à faire le point”, tranche Cyrille Bret pour qui l’espoir d’aboutir à un quelconque accord est nul. “L’économie chinoise et son commerce extérieur marquent un ralentissement de croissance. Cela affecte le pacte social en Chine et le pays ne peut pas cesser de subventionner ses industries sans risquer de remettre en cause sa stabilité, analyse le chercheur. De son côté, l’UE commence à peine à essayer de remédier à son déficit commercial et aux stratégies de concurrence déloyale de la Chine.” La période marque donc davantage le début d’un “processus de tension” et d’un rapport de force qu’un stade de résolution des conflits.Un “jeu de dupe” autour de la question ukrainienneLes discussions autour de la stratégie de la Chine vis-à-vis de la Russie et de la guerre en Ukraine seront également un “jeu de dupe” d’après le spécialiste. “Les deux points de vue sont incompatibles. La Chine cherche à développer ses partenariats avec la Russie alors que l’Europe est engagée dans un processus de soutien à l’Ukraine qu’elle considère comme vital pour ses valeurs.” Un rapprochement apparaît donc comme hautement improbable tant les intérêts sont contradictoires.Les questions concernant la protection de l’environnement ne risquent pas non plus d’avancer ce jeudi. “Les atteintes à l’environnement seront abordées uniquement sous l’angle commercial car la politique environnementale n’est pas fédéralisée, rappelle le chercheur également fondateur du média EurAsia Prospective. Il y aura aussi sans doute des éléments de langage concernant l’absence de Xi Jinping à la COP 28.”Faut-il donc considérer ces sommets comme inutiles ? Sûrement pas. “C’est le rôle des formats diplomatiques”, observe Cyrille Bret. Ils servent à mieux comprendre les positions de l’autre, à établir une cartographie des points de désaccord et une hiérarchie de ceux-ci et, finalement, à progresser très graduellement. “Le travail en amont et en aval de ces sommets est également important pour avancer”, précise le chercheur à l’Institut Delors. C’est le temps et la régularité du dialogue qui peut donc produire, à terme, des résultats. “Le fait qu’il y ait un sommet, avec tous les représentants présents physiquement, c’est déjà une étape importante pour la vie quotidienne des Européens, des entreprises et la stature internationale de l’Union européenne.” Un motif de satisfaction mince mais dont les observateurs devront se contenter.
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Publish date : 2023-12-07 05:24:14
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Sommet Chine-UE : des points de vue irréconciliables entre Pékin et Bruxelles ?
