Il était facile d’imaginer le bitcoin tomber en disgrâce après les différentes affaires qui secouent l’écosystème dont il est le porte-étendard. Mais ni la chute de Changpeng Zhao – le patron de Binance, la plus grande plateforme d’échange de cryptomonnaies au monde -, ni celle plus retentissante encore de Sam Bankman-Fried – à la tête du rival déchu FTX – n’auront mis à terre le plus célèbre des actifs numériques, lancé en 2008 par le mystérieux Satoshi Nakamoto. Après être tombée à moins de 16 000 dollars l’unité, il y a un an, sa valeur tutoie aujourd’hui les 44 000 dollars. Son sommet historique, autour de 69 000 dollars, datant de novembre 2021, semble désormais dans le viseur.La survie du bitcoin tient en une explication technique, aiment à rappeler les spécialistes. S’il tire parti d’un environnement de confiance, il n’en a pas besoin pour exister. Tant que sa blockchain fonctionne – le support technologique indépendant sur lequel il repose et dont il n’y a pas de raison de penser qu’il peut être détruit ou corrompu -, il sera toujours possible d’effectuer des transactions. FTX ou Binance n’étant que des facilitateurs, le bitcoin peut être fragilisé par leurs actions mais jamais cassé.Sa valeur dépend alors d’une série de facteurs économiques exogènes. Son instabilité, et les risques associés, est peu attractive dans une période de crise, d’inflation ou de remontée des taux d’intérêt, soit peu ou prou les deux dernières années. A l’inverse, il peut devenir un instrument de spéculation quand le cash coule à flots. D’où son essor entre 2020 et 2021, à l’ère du Covid et de l’argent “magique”, comme l’illustrent les deux pics du graphique ci-dessous.Le cours du bitcoin depuis sa créationHalving et ETFLa période en cours ne correspond à aucun de ces critères. La flambée actuelle du bitcoin repose principalement sur la croyance, nullement ébranlée, que cette cryptomonnaie n’en a pas fini de monter. Pour une raison mécanique, d’abord. Comme convenu dans les termes initiaux de la cryptomonnaie, un “halving” (ou réduction de moitié), prévu en 2024, devrait diviser par deux la production de bitcoin. Plus de rareté, donc plus de valeur, et plus de richesse. L’autre explication est d’ordre historique. Même en nageant au milieu des requins ces dernières années, le bitcoin n’a finalement jamais regoûté à ses eaux froides pré-Covid, sous les 10 000 dollars. Ainsi, seule une petite partie des investisseurs ayant parié sur cet “or numérique” lors de ses grandes heures, en 2020 et 2021, est pour le moment perdante. Pour le reste, les mises ont souvent été gagnantes.Les gestionnaires d’actifs l’ont compris : cette longévité est un allié. L’un des plus importants de la planète, BlackRock, pousse actuellement à la création d’un fonds dédié en Bourse, un ETF “spot”, extrêmement simple à piloter pour les investisseurs, qu’ils soient particuliers ou institutionnels. Ce nouvel instrument financier explique en partie l’envolée actuelle du bitcoin, qui pourrait être rejoint dans le monde des ETF par l’Ether, voire d’autres cryptomonnaies. Le bitcoin ne représente après tout “que” 50 % du marché des cryptoactifs, passé de 18 milliards de dollars début 2017 à 1 630 milliards de dollars de capitalisation aujourd’hui.Pour The Economist, le bitcoin, comme les autres cryptomonnaies, reste néanmoins… un cafard. Un parasite à l’impact minime sur l’économie mondiale, chéri par les terroristes et les criminels qui, à la différence des traders, l’adorent pour son caractère obscur et la possibilité qu’il offre de s’affranchir des intermédiaires bancaires traditionnels. Bref, un actif qu’il est urgent de réguler. L’Europe a déjà adopté un texte plutôt sévère, en particulier contre les stablecoins. Les Etats-Unis pourraient également serrer la vis, comme en témoignent les poursuites fédérales contre Binance et l’opposition de la SEC, le gendarme de la Bourse, aux cryptomonnaies. Une chose est sûre : son usage va croissant, lentement mais sûrement. Quelque 17 % des Américains ont déjà utilisé, échangé ou investi dans une crypto aux Etats-Unis, d’après l’Institut Pew Research Center. Chez les jeunes hommes, de 18 à 29 ans, ce taux bondit à 41 %.Tel le cafard, poursuit l’hebdomadaire britannique, cet être qui peut “vivre sans tête” et que la nature a doté d’un “exosquelette flexible qui lui permet de supporter jusqu’à 900 fois son poids corporel”, le bitcoin fait preuve d’une formidable robustesse. Ces défenseurs caressent l’espoir qu’il pourra honorer un jour ses promesses de liberté et d’inclusivité financière, à l’égard, notamment, des éloignés du système bancaire actuel. Devenir respectable, en somme. Loin des scandales.
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Author : Maxime Recoquillé
Publish date : 2023-12-23 06:00:00
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