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Santiago Amigorena réagit à la loi immigration : “On n’évite pas le pire en s’approchant de l’abîme”

Santiago Amigorena réagit à la loi immigration : “On n’évite pas le pire en s’approchant de l’abîme”



“Mon nom est Santiago Amigorena. Je suis né en Argentine. Je suis arrivé en France à l’âge de 12 ans. À mon arrivée, je ne parlais pas un mot de français. À la fin de l’adolescence, j’aurais dû demander une carte de séjour. Je ne l’ai pas fait. Pendant quelque temps, j’ai été ce que bien des années plus tard on appellerait un “sans-papiers”. En 1982, j’ai demandé la nationalité française et j’ai été naturalisé. Aujourd’hui, mon histoire aurait une fin différente. Aujourd’hui, le jeune homme que j’étais serait expulsé.” J’ai écrit ces mots, dans ce même journal, il y a une dizaine d’années. Qu’il est désolant, lorsqu’on vieillit, de voir que les années passent et que les mots sont toujours inutiles !

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Aussi bien en Allemagne en 1933 qu’en Argentine en 1976 ou en Uruguay en 1973, les extrêmes arrivés au pouvoir ont souvent profité des lois votées démocratiquement par les gouvernements qui les avaient précédés. Personne ne peut avoir le moindre doute sur la manière dont l’extrême droite française, si elle ne rate pas le boulevard que lui ouvre Emmanuel Macron, saura profiter de la dernière loi sur l’immigration pour appliquer la politique xénophobe qui l’anime depuis toujours. Comment se fait-il qu’aucun gouvernement, depuis 1983, n’ait jamais compris qu’on n’évite pas le pire en s’approchant pas à pas de l’abîme ?

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Est-ce que cette politique est surprenante ? Non. D’un gouvernement qui n’a jamais rien fait pour les pauvres, pourquoi attendre qu’il fasse quelque chose d’autre que d’exclure les étrangers ?

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Je m’étonne souvent, d’un réjouissant étonnement, de la manière dont la France, ou du moins le Français, a su, au long des siècles, et à l’inverse de l’Espagnol, accueillir des écrivains étrangers. Casanova, Potocki, Beckett, Cioran… La liste n’est pas seulement longue, elle est belle. C’est aussi cette beauté qu’atteint la xénophobie du gouvernement actuel.

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Il y a une dizaine d’années, Français grâce à Mitterrand et écrivant que sous Sarkozy je ne le serais pas devenu, j’éprouvais, je crois, une incertaine crainte, un incertain regret. En ce qui me concerne, Emmanuel Macron aura réussi à modifier ce sentiment : aujourd’hui, si je devais, comme cela pourrait m’arriver, être déchu de ma nationalité, je me dirais simplement que désormais je pourrais éviter la honte d’être français.”

Son dernier roman, La Justice des hommes (POL), est paru à la rentrée.



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Author : Elsa Pereira

Publish date : 2023-12-22 12:44:17

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Tags :Les Inrocks

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