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Prolonger la vie de votre chien ? Les traitements anti-âge pour animaux arrivent

Un Golden Retriever illustration




L’annonce a été suivie d’une avalanche de missives. Des lettres signées de photos, babines retroussées, narines humides qui s’amoncellent dans les locaux de Loyal, comme si Snoopy, Rocky, Médor et les autres avaient pu lire le communiqué publié le 28 novembre dernier par la firme. La start-up basée à San Francisco, inconnue jusqu’alors, y annonçait être en mesure d’offrir des “années en plus et en bonne santé” à certains chiens grâce à de simples injections.Un discours banal dans une Silicon Valley encline aux promesses les plus folles, sauf que celle-ci semble sur le point de se réaliser : l’entreprise explique dans le même texte que la Food and Drug Administration, le gendarme du médicament américain, a validé ses données d’efficacité. “Il s’agit de la toute première acceptation formelle qu’une thérapie peut être développée et approuvée pour ralentir le vieillissement”, relève l’entreprise.Loyal doit désormais démontrer la sécurité de son produit, ce qui est loin d’être une formalité. Mais l’entreprise considère que ce premier feu vert donné par la FDA ouvre la voie à l’arrivée de thérapies contre le vieillissement, longtemps considérées comme de la science-fiction. “Nous espérons que les premiers chiens concernés pourront en obtenir dès 2026”, détaille Céline Halioua, la fondatrice de Loyal.Une levée de fonds de plus de 38 millions de dollarsEn cas de mise sur le marché, la molécule développée par Loyal, LOY-001, deviendrait le premier traitement ciblant directement les mécanismes du vieillissement, ces différents “ratés” qui s’accumulent avec l’âge dans les cellules et les détériorent. Jusqu’à présent, seules les maladies qui en découlent étaient ciblées. Même chez l’homme, ces recherches ne sont pas aussi abouties, bien qu’elles soient en pleine ébullition ces dernières années.Ancienne biologiste moléculaire, Céline Halioua a fondé Loyal en 2019, alors que les laboratoires du secteur découvraient les uns après les autres qu’il était possible, au moins sur des animaux de laboratoire, de ralentir et d’inverser le vieillissement. Diverses expériences récentes ont ainsi “rajeuni” des vers et des souris sur commande, en modifiant leurs gènes ou en leur injectant des substances qui agissent sur divers dysfonctionnements cellulaires.Privilégiant nos fidèles compagnons alors que de nombreuses start-up américaines se sont mis en tête d’obtenir un élixir de ce type pour leurs maîtres, Loyal a réussi à se faire une place dans le secteur, levant plus de 38 millions de dollars. Un chiffre conséquent pour des thérapies animales. De quoi monter des essais en bonne et due forme. Aucun protocole expérimental ambitieux n’avait jusqu’ici été mis en place, le vieillissement ayant longtemps été considéré comme une fatalité.Ni le prix, ni la composition de LOY-001 – une piqûre à renouveler au moins deux fois par an – n’ont été détaillés. Mais son mécanisme d’action est bien connu : “LOY-001 vise à remédier au surplus de l’hormone de croissance IGF-1”, résume Céline Halioua. La substance, connue pour accentuer le vieillissement chez l’adulte, est produite en très grande quantité chez les chiens de grande taille, ce qui limite leur espérance de vie. Sélection après sélection dans les élevages, les grands chiens ont en effet été taillés pour prendre de la masse. Ils produisent notamment 30 fois plus d’hormones de croissance IGF-1 que les plus petites races. “Cette différence s’explique par la présence de certains gènes, bien utiles pour grandir vite, mais très délétères ensuite, car ils accélèrent la glycation des cellules, une forme de détérioration causée par les sucres consommés que l’organisme peine à réparer avec l’âge”, détaille Thomas Derrien, vétérinaire à l’institut de Génétique et du développement de Rennes.Ainsi, les races de chien les plus grandes vivent en moyenne deux fois moins longtemps que les plus petites, à quelques exceptions près – les carlins et les bouledogues sont petits, mais leur nez aussi, ce qui les handicape. Présents aussi chez l’Homme, ces gènes auraient perduré dans notre espèce malgré leur impact sur l’espérance de vie car la pression sélective s’opère surtout sur les attributs qui permettent d’arriver en vie à l’âge reproducteur, le grand âge étant donc relativement moins “adapté” sur le plan génétique.Les chiens et les humains partagent certaines horloges biologiquesDepuis Rennes, Thomas Derrien participe à l’une des principales études sur le vieillissement canin en France, en partenariat avec Centrale Canine. Le génome de 27 races y est analysé pour comprendre les conséquences des croisements et fournir les clefs pour éviter les effets les plus délétères. “Grâce à de récentes avancées technologiques, on ne regarde plus seulement les mutations uniques, mais des séquences beaucoup plus grandes qui interviennent sur le développement et sur le vieillissement”, complète Benoit Hédan, bioinformaticien, membre de l’étude.Bien qu’exclusivement destinés au bien-être animal, tous ces travaux sont regardés de près par les scientifiques qui travaillent à des médicaments pour l’Homme. De premiers essais ciblant des mécanismes similaires du vieillissement vont être organisés en 2024 : “Force est de constater que des mécanismes humains pourraient s’appliquer aux animaux domestiques, et vice-versa”, indique James Kirkland, directeur de recherche sur le vieillissement à la Mayo Clinic, un groupe hospitalier américain.Une étude publiée en 2022 dans la revue scientifique PNAS a notamment montré que les chiens et les humains partageaient certaines horloges biologiques, des marqueurs moléculaires de l’âge, découverts récemment en marge des travaux fondamentaux sur le vieillissement. Certaines permettent aux cellules de savoir où elles en sont de leur activité. D’autres résultent d’une détérioration liée à l’âge, que l’on a appris à déchiffrer. Les scientifiques envisagent d’agir dessus, pour inverser la mécanique du temps.Loyal n’est pas le seul acteur de ce jeune secteur. Également en lice, Animal Bioscience cible deux autres mécanismes du vieillissement que l’on partage avec les chiens : la baisse d’ATP, sorte de carburant cellulaire que l’organisme convertit à partir des sucres, et l’apparition de cellules sénescentes, des cellules qui ne se divisent plus mais qui refusent de mourir et encombrent l’organisme si elles ne sont pas nettoyées. De nombreuses molécules semblent agir sur ces facteurs de vieillissement.Soigner certaines maladiesAnimal Bioscience doit pour l’instant recruter plus de chiens, pour satisfaire les standards des essais cliniques. Mais elle dispose d’un atout charme auprès des investisseurs : son fondateur, Nick Sinclair, n’est d’autre que le frère de David Sinclair, chercheur à Harvard et scientifique du vieillissement parmi les plus en vue, depuis qu’il a redonné la vue à des souris aveugles en reprogrammant les cellules de leur nerf optique. L’exploit lui a valu la Une de la revue scientifique Nature en 2020. Depuis, il ne cesse de démontrer qu’agir sur l’âge cellulaire est possible, du moins sur l’animal.Autre initiative du genre, un groupe de chercheurs et de vétérinaires appelé The Dog Aging Project tente de réunir assez de chiens pour tester une molécule aux effets potentiellement analogues à LOY-001, la rapamycine. Autorisée en France depuis les années 2000 comme immunosuppresseur, elle pourrait elle aussi contenir les effets vieillissants de certains gènes et fait partie des grands espoirs thérapeutiques pour l’homme. Grâce à elle, en laboratoire, les vieilles souris courent à nouveau comme des jeunettes.En plus de voir leurs capacités diminuer plus rapidement avec l’âge, les grands chiens sont aussi sujets à de nombreuses pathologies, notamment à cause d’une trop grande consanguinité, expliquent les chercheurs. Loyal espère pouvoir agir contre le phénomène et réduire par exemple leur risque de développer des cancers, grâce à un autre médicament (LOY-002). Ils pourraient eux aussi arriver très vite, “dès 2025” aux États-Unis, selon Céline Halioua. C’est une des autres grandes promesses des recherches sur la longévité : soigner les maladies du vieillissement, en plus du déclin lié à l’âge. L’aube d’une révolution, canine et humaine.



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Author : Antoine Beau

Publish date : 2023-12-29 16:00:00

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Tags :L’Express

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