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Au Japon, le pouvoir éclaboussé par un scandale financier

Le Premier ministre japonais Fumio Kishida lors d'une conférence de presse à Tokyo, le 13 décembre 2023




Il a promis d’agir avec la “célérité d’une boule de feu”. Confronté à une crise politique majeure, l’actuel chef de gouvernement, Fumio Kishida, est en grande difficulté. La raison ? Un scandale financier qui éclabousse son parti politique, le Parti libéral démocrate (PLD). Les différentes factions qui structurent ce parti, qui gouverne le pays quasiment sans interruption depuis 1955, auraient détourné 500 millions de yens [3,2 millions d’euros] lors d’événements organisés pour des levées de fonds.Le 19 décembre, le parquet japonais a mené des perquisitions. La première a eu lieu au sein de la Seiwakai, puissant groupe politique faisant partie du PLD et longtemps dirigé par l’ancien premier ministre, Shinzo Abe. Fragilisé, Kishida a remplacé quatre de ses ministres pour regagner la confiance de la population. Mais visiblement, sa “boule de feu” n’a pas convaincu grand monde. Sa cote de popularité a plongé à 17,1 %, selon un sondage réalisé mi-décembre par l’agence Jiji. Et la question se pose s’il pourra conserver jusqu’à la fin en septembre 2024 son mandat de président du PLD.Pour le quotidien de centre gauche Asahi, le scandale “souligne une fois de plus la culture obsolète du PLD axée sur les factions, une tradition profondément enracinée qui remonte à sa création en 1955”. A l’époque, la formation s’est en effet structurée autour de ces entités qui reflétaient les courants plus ou moins conservateurs, plus ou moins progressistes, qui le traversaient. Le système électoral encourageait cette partition, car chaque circonscription comptait entre trois et cinq élus. Chaque faction voulait son représentant.Pour se financer, les factions comptaient sur les dons et de solides réseaux. “Le principe d’organisation qui unit le PLD n’est pas l’idéologie, mais les relations interpersonnelles entre les hommes politiques d’une part et entre les hommes politiques et leurs partisans d’autre part”, écrivait en 1995 Hiroyuki Ikeba dans sa thèse “Le Parti libéral démocrate du Japon : son organisation et son processus de prise de décision”.Les factions pèsent toujoursCe fonctionnement explique en partie pourquoi cette formation a pu rester au pouvoir si longtemps. “Sans idéologie forte, le PLD peut aisément changer de position et se rallier par exemple à des politiques ouvertement progressistes soutenues par la population”, explique Rob Fahey, de l’Institut d’études avancées de l’université de Waseda. Le parti a même survécu à des crises retentissantes comme le scandale Recruit, du nom de ce délit d’initié qui avait ébranlé l’ensemble de la classe politique japonaise à la fin des années 1980. Certaines figures du PLD, mais aussi des formations d’opposition comme le Parti socialiste et le Komei, avaient alors bénéficié des faveurs de Hiromasa Ezoe, président de la société d’offres d’emploi Recruit. L’homme d’affaires leur avait offert des actions d’une filiale de Recruit, Cosmos, peu avant son entrée en bourse en 1986. Dès les premières cotations, le titre a bondi. Les gains avaient été énormes, mais l’affaire avait coûté au PLD la victoire aux législatives de 1993.Malgré tout, le parti avait réussi à se réformer. Votée en 1994, la refonte du système électoral avait permis d’affaiblir le système des factions en introduisant le principe des circonscriptions à siège unique. La publication des comptes des élus et des factions avait été rendue obligatoire, tout comme la divulgation des actifs des parlementaires. Par la suite, un système de subvention des partis par l’impôt avait été mis en place et les dons aux politiciens, interdits.Affaiblies, les factions n’en ont pas pour autant disparu. Elles continuent, par exemple, de peser sur les choix des ministres. Surtout, la réforme ne s’applique pas aux dons d’entreprises et de particuliers lors de collectes de fonds, d’où le scandale actuel.Celui-ci peut-il menacer la mainmise du PLD sur la politique nippone ? Les sondages donnent toujours une large avance à la formation conservatrice face à une opposition peu audible. En outre, rappelle Rob Fahey, “la compétence politique se résume, pour la plupart des Japonais, à une seule chose : le PLD lui-même. Il peut être terni par des scandales et les électeurs peuvent tiquer sur ses élites dynastiques et riches, mais peu doutent de sa compétence politique”.



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Author : Philippe Mesmer

Publish date : 2024-01-01 07:00:00

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Tags :L’Express

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