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Défaillances d’entreprises : ces nouvelles fragilités de l’économie française

Magasin Habitat à la Tour Montparnasse à Paris, le 19 octobre 2009. L'enseigne d'ameublement confirme la suspension de la participation d'Arnaud Montebourg à son comité stratégique




Les faillites d’entreprises augmentent rapidement. D’après les chiffres de la Banque de France, pas loin de 60 000 défaillances auront été enregistrées en 2023, soit une hausse d’un tiers en un an. Le discours de la Banque de France se veut rassurant et pointe un effet de rattrapage par rapport à la “période Covid”. Il est vrai que, de 2020 à 2022, le nombre de défaillances avait drastiquement chuté pour tomber à environ 30 000 par an. Le Covid avait gelé toute l’économie, y compris ses évolutions négatives.Concrètement, les aides publiques et les PGE, ces prêts garantis par l’Etat et souscrits par 800 000 entreprises, ont placé notre économie sous perfusion d’endettement public et privé. Des entreprises qui, selon les lois spontanées de l’économie, auraient dû faire faillite en 2021 ou en 2022, ont été temporairement sauvées par le “quoi qu’il en coûte” et par les banques. Depuis, les aides publiques ont été levées et les dirigeants ont commencé à rembourser les PGE. La mer de la dette se retire et laisse les affaires non rentables s’échouer. La Banque de France a donc raison de souligner cet effet de rattrapage, qui n’est pas inquiétant en soi.Depuis octobre 2023, la donne a changéPour autant, cette augmentation des faillites ne s’explique plus exclusivement par la fin de la “période Covid” et le retour à un fonctionnement économique normalisé. Denis Ferrand, chez Rexecode, s’est livré à un calcul éclairant. Il a analysé l’évolution du nombre de faillites hors microentreprises, donc pour les TPE, PME, ETI et grandes entreprises, et a daté le moment à partir duquel leur nombre est devenu supérieur à la somme de leur niveau structurel et du manque de défaillances constaté entre 2020 et 2022 par rapport au niveau normal. La date qui ressort est celle du mois d’octobre 2023. Ainsi, depuis trois mois, les faillites d’entreprises ne compensent plus leur faible nombre de la période Covid mais relèvent d’une nouvelle fragilité de l’économie française.En première analyse, cette fragilité n’est pas difficile à identifier. La montée des prix de l’énergie et des coûts d’approvisionnement, les revalorisations salariales, la hausse des taux d’intérêt ont fait bondir les coûts variables des entreprises, mais aussi leurs coûts fixes. Dans le même temps, l’activité dans le pays a ralenti. Si l’on ajoute l’augmentation des délais de paiement qui pèse sur la trésorerie des PME, on obtient tous les éléments explicatifs à cette hausse des défaillances. Certains secteurs souffrent particulièrement. C’est le cas de la promotion immobilière, pénalisée par la crise de la construction de logements, et du commerce, handicapé par les conséquences négatives de l’inflation sur le pouvoir d’achat. Ce type de faillites pourraient refluer en 2024. En effet, la fièvre inflationniste semble retomber, alors que les salaires sont dynamiques, ce qui va relancer le pouvoir d’achat et la consommation. Quant au reflux des taux d’intérêt, il pourrait faire repartir la construction de logements.L’IA entraînera une réallocation géante du capitalMais une partie de ces défaillances vient aussi sanctionner l’inadéquation structurelle du positionnement de certaines entreprises à la demande des consommateurs. Les enseignes de l’habillement ou du meuble sont clairement déstabilisées par l’essor du commerce en ligne. A cet égard, le plus spectaculaire est à venir, avec l’essor des intelligences artificielles génératives. En 2024, les “ChatGPT” sectoriels vont se multiplier. Les géants du numérique, qui ont pris du retard sur OpenAI, la maison mère de ChatGPT, vont mettre sur le marché les “IA assistants de direction”, “IA gestionnaires de paie”, “IA agents de voyages”…De nombreux business models vont se retrouver inadaptés, ce qui va entraîner une réallocation géante du capital. Nous entrons dans un cycle de défaillances schumpétériennes d’une ampleur inédite. Ce n’est pas nécessairement un problème pour la France si notre pays est capable de diriger son épargne vers l’innovation, de former ses salariés aux métiers de demain, et de se débureaucratiser afin de libérer la création entrepreneuriale. Voici un programme utile pour remplir les trois dernières années d’un quinquennat qui se cherche plus que jamais.



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Author : Nicolas Bouzou

Publish date : 2024-01-06 08:15:00

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Tags :L’Express

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