C’est un poisson connu de toute la Silicon Valley. Dans son space opera aussi culte que loufoque Le Guide du voyageur galactique, l’écrivain britannique Douglas Adams invente le petit poisson Babel, drôle de vertébré capable de traduire toutes les langues de l’univers lorsqu’il est inséré dans une oreille. En 2024, ce rêve singulier est devenu réalité – même s’il s’incarne dans la forme banale du smartphone.Après les mobiles d’appels puis les appareils connectés à Internet, le secteur entre dans une nouvelle ère : celle des smartphones IA. Et leurs premiers représentants, comme le Galaxy S24, que Samsung a dévoilé le 17 janvier, affichent déjà des nouveautés séduisantes. Ces appareils sont notamment capables de traduire en temps réel une conversation, que celle-ci se déroule dans une pièce ou par téléphone. Et l’IA ne se contente pas d’en proposer une transcription instantanée : elle génère une version audio, ce qui permet au dialogue de rester naturel et rythmé, comme si un interprète humain était à votre côté.Un traducteur dans la poche”L’IA apporte aussi une nouvelle manière de travailler et de s’informer”, explique Bastien Sudron, chef de produit smartphones à Samsung France. Terminé, le tirage au sort de l’infortuné obligé de prendre des notes en réunion et d’en faire un résumé. Il suffit d’enregistrer une réunion et de cliquer sur la fonction IA des Galaxy S24 pour obtenir une synthèse bien organisée, dans un français impeccable.Assistant zélé, le Galaxy S24 peut également résumer en deux secondes n’importe quelle page Web (article d’actualité, fiche Wikipédia…). Une fonction de productivité puissante – les IA excellent dans la synthèse. Samsung communique toutefois dessus avec un peu trop de légèreté. Le constructeur indique bien que le résumé est généré par IA, mais ne précise pas qu’il peut, de ce fait, comporter des erreurs. 2023 regorge pourtant d’exemples tragi-comiques de personnes ayant placé une confiance exagérée dans ChatGPT, comme cet avocat new-yorkais qui l’a utilisé pour élaborer un avis juridique, sans réaliser que l’IA citait des cas qu’elle inventait de toutes pièces.Les smartphones IA offrent néanmoins des outils indéniablement séduisants, en particulier sur le plan créatif. Un post Instagram de chat mignon ? Une présentation percutante pour une réunion ? Une photo de Séoul la nuit ? Il n’est même plus nécessaire de capturer, agencer ou retoucher quoi que ce soit : il suffit de demander à l’IA de les “générer” ex nihilo. Les hordes de touristes armés de perches à selfie seront peut-être bientôt un lointain souvenir.”Beaucoup de personnes – moi le premier – passent du temps à reformuler leurs messages. Là encore, l’IA peut leur faire gagner beaucoup de temps”, précise Bastien Sudron. A partir d’une trame brute, l’outil d’intelligence artificielle de la gamme Galaxy (Galaxy AI) propose en effet à l’utilisateur plusieurs versions : une adaptée à un cadre professionnel, une au style plus détendu, une avec des émojis… Et, pour faire bonne mesure, une déclinaison “polie” et une autre “#social” (pensée pour les réseaux sociaux, avec les hashtags correspondant aux sujets évoqués dans le texte).Samsung n’est pas le seul constructeur à faire basculer ses smartphones dans l’ère de l’IA générative. Google a également lancé fin 2023 une nouvelle gamme Pixel 8 avec des fonctions dopées à l’intelligence artificielle. Apple, qui planche activement sur son grand modèle de langage (LLM) maison, Ajax, devrait quant à lui lancer en juin plusieurs nouvelles fonctions sur ses iPhone et ses autres appareils. Selon Counterpoint Research, les smartphones IA représenteront 40 % du marché dès 2027.Des mini-IA dans les téléphonesLes prochaines moissons devraient certainement faire mieux dans deux domaines. D’abord, la possibilité d’utiliser l’IA sans être connecté à Internet. Les Galaxy S24 ne savent exécuter directement qu’un nombre limité de tâches (traduction, etc.). Beaucoup d’autres, notamment la génération d’images, sont réalisées dans le cloud, ce qui requiert d’avoir une connexion. Mais l’émergence de mini-IA de plus en plus performantes devrait bientôt les rendre utilisables en toutes conditions. Une perspective vertigineuse : même déconnectés d’Internet, nous aurions alors en permanence accès à une base d’intelligence riche – même si elle n’est pas dénuée d’imperfections, les IA commettant des erreurs.On peut également parier sur le retour en force des assistants vocaux, qui deviendront (enfin) pratiques à utiliser. Alors que les Siri ou Google Assistant ne géraient que des demandes basiques (“Quel temps fait-il ?” “Programme une alarme pour demain”) et avec une lenteur agaçante, grâce aux immenses progrès réalisés par OpenAI et ses compétiteurs, les IA sont aujourd’hui capables de comprendre étonnamment bien ce qu’on leur dit. Le doux rêve de pouvoir discuter à bâtons rompus avec une machine plutôt que de compulser ses menus gagne en consistance.
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Author : Anne Cagan
Publish date : 2024-01-17 18:00:00
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Galaxy S24 : les séduisantes capacités des smartphones IA
