Dans sa guerre en Ukraine, mais aussi dans sa guerre hybride menée contre l’Occident, la Russie monte en puissance. Ce 12 février, le service français de vigilance et protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) a dévoilé l’existence d’un réseau d’au moins 193 sites d’informations de propagande pro-russe, à destination d’un public international. Nommée “Portal Kombat” par les services français, la nébuleuse de sites Internet est orchestrée par un prestataire de services russes dont l’identité n’est pas encore dévoilée.Publiés en français, en allemand, en anglais ou encore en polonais sur différentes plateformes, ces articles couvrent la guerre en Ukraine en reprenant le narratif pro-russe et légitiment pleinement l’invasion en Ukraine par la Russie. Ils émanent notamment de l’écosystème lié au site “Pravda”, dont sa version francophone, “pravda-fr.com” vise spécifiquement les Français avec des contenus pour polariser le débat public.Dispositif “dormant”Identifiée entre septembre et décembre 2023 par Viginum, cette nouvelle galaxie médiatique utilise des méthodes éprouvées : une sélection minutieuse de sources de propagande pro-russe selon la localité ciblée, l’automatisation massive de diffusion des contenus, et l’optimisation du référencement sur Internet.Pour l’heure, l’opération “Portal Kombat” a eu peu de résonance sur le débat public européen, avec seulement 10 700 visites par le public français, 34 400 en Allemagne et 17 600 en Pologne. Néanmoins, le dispositif a de quoi inquiéter : cantonné jusqu’à présent à n’être qu’un dispositif “dormant”, les sites de désinformation du réseau de “Portal Kombat” pourraient inonder l’Europe d’une vague massive.La désinformation utilisée par la diplomatie russeLa révélation de l’opération “Portal Kombat” survient alors que les opérations de désinformation lancées par la Russie ne cessent de s’intensifier. En France, alors que Paris a annoncé une livraison supplémentaire d’armes, dont 40 missiles Scalp de plus à l’Ukraine le 14 janvier, Moscou a répliqué d’une manière encore jamais vue dans l’histoire des relations franco-russes. Une semaine après une frappe russe sur un bâtiment de Kharkiv, la diplomatie russe a affirmé avoir identifié des “mercenaires français” déployés dans le Donbass. La France a immédiatement publié un communiqué affirmant que le pays ne disposait “d’aucun mercenaire en Ukraine, ni ailleurs dans le monde”.Le fait que la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Maria Zakharova relaie directement ces fausses informations représente un tournant dans la guerre hybride du Kremlin. Le 19 janvier, l’ambassadeur de France à Moscou, Pierre Levy, a été convoqué au ministère des Affaires étrangères russe pour répondre à ces accusations sans fondement. “L’échange avec la Russie se tend vraiment, assure une source diplomatique française, car Moscou essaye de pousser la France à la faute”.Vigilance maximale à l’approche des élections européennesComme la France, ses voisins sur Vieux continent sont mis à l’épreuve par les nouvelles offensives de la Russie, à l’approche des élections européennes cette année. “Nous devons soutenir les partis européens d’opposition ‘non-systémique’ aux élections européennes”, s’exclamait début février l’ancien président et Premier ministre russe Dimitri Medvedev, qui agite clairement la menace d’ingérences russes lors de ce scrutin. Bruxelles essaie tant bien que mal de faire face. Après les révélations sur la députée européenne lettone Tatjana Zdanoka, proche de l’extrême droite aux idées pro-russes, qui était en lien avec les services de renseignement du Kremlin, mais aussi les relations entre indépendantistes catalans et certains officiels russes, la lutte contre les ingérences étrangères est devenu une urgence au Parlement, qui, à la suite de ce “Russiagate” a adopté le 7 février une résolution pour se protéger. A l’initiative du groupe Renew Europe, la résolution a été unanimement votée… à l’exception d’un rejet en bloc des députés français du Rassemblement National. “Un fait très révélateur” selon l’eurodéputée Nathalie Loiseau, qui estime que “certains partis européens se sentent tenus d’aller dans le sens de la Russie”.”L’objectif de la Russie est d’entrer dans les débats nationaux, de manière non ouverte, pour influencer les débats avec les récits pro-russes, ou exploiter les faiblesses des sociétés européennes en faveur de Moscou”, rappelle l’ancienne ministre de l’Europe. Une guerre hybride qui n’est pas près de se terminer, et qui était au menu du Triangle de Weimar, forum de coopération entre la France, l’Allemagne et la Pologne, ce 12 février.
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Publish date : 2024-02-12 19:33:39
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