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Marlene Monteiro Freitas, retour gagnant

Marlene Monteiro Freitas, retour gagnant



Un filet en guise de scénographie, un court de tennis improbable rythmé par un sifflet intempestif : dès le départ, Canine jaunâtre 3 ne s’interdit rien. Et surtout pas la transgression. À mille lieues des célébrations olympiques, la chorégraphie de Marlene Monteiro Freitas se paie le luxe d’interroger la performance en la déjouant, amenant son équipe de danseurs et danseuses sur le fil du rasoir – ou du filet.

Frustration ou jouissance, aux yeux de la créatrice originaire du Cap-Vert, les émotions contradictoires se télescopent sur ce plateau dominé par un tableau égrenant des scores fantasques. “Les chorégraphies sont des formes vivantes”, rappelle sans cesse Marlene Monteiro Freitas, manière de dire que rien n’est gagné d’avance.

Des airs de carnaval

Commandé en 2018 par la Batsheva Dance Company sous l’impulsion de son directeur artistique Ohad Naharin, Canine jaunâtre 3 s’offre un retour gagnant, cette fois sous le maillot du Ballet de l’Opéra de Lyon. À l’imprévisibilité du sport, la chorégraphe oppose un imaginaire en émoi. Ici, le ballet se fait mécanique ; la gestuelle, contrainte et libérée tout à la fois ; les ensembles sont comme pris dans une transe incontrôlable. Jusqu’aux visages qui, sous le maquillage, révèlent la seconde nature de chacun·e.

Pour Marlene Monteiro Freitas, ce travail sur les couleurs et les grimaces est tout aussi important que le mouvement, la musique, les lumières. Un spectacle total qui n’est pas sans rappeler les carnavals de son enfance à l’exubérance assumée. “On ne sait jamais ce qui va se passer”, résume-t-elle. Pour la Freitas, la scène est à l’évidence le lieu de la “libre mise en danger des frontières”. Traduction en scène ? Des corps en cadence pour parade éphémère, des équipes désarticulées, une fièvre chorégraphique sans pareil.

Depuis ses débuts, Marlene Monteiro Freitas titille le vertige, signant un archipel de pièces chorégraphiques à la belle cohérence. Les interprètes se font les porte-paroles de son imagination : tremblements, rires, ralentis, le geste est définitivement mis en tension. Canine jaunâtre 3 ne déroge pas à la règle avec ses sportifs et sportives à l’esprit dada. Passé une certaine stupeur, les spectateur·rices vont se laisser gagner par une euphorie contagieuse.

“Canine jaunâtre 3, c’est comme un beau sourire avec une dent moche”

Marlene Monteiro Freitas fait du dépassement de soi un horizon plus proche qu’il n’y paraît. “Canine jaunâtre 3, c’est comme un beau sourire avec une dent moche”, ose l’artiste. Tandis que la bande-son égrène les hits d’Amy Winehouse ou Nina Simone, sans oublier un clin d’œil au Lac des cygnes de Tchaïkovski. Le beau et le sale, le doux et le rugueux s’impriment sur nos rétines.

Marlene Monteiro Freitas, en entraînant le Ballet de l’Opéra de Lyon dans cette procession inédite, ajoute au répertoire de la troupe un trophée au charme troublant. Et gagne la partie.

© Marc Domage

À la Maison de la Danse de Lyon, du 5 au 8 mars 2024.



Source link : https://www.lesinrocks.com/arts-et-scenes/marlene-monteiro-freitas-retour-gagnant-609394-15-02-2024/

Author : Contenu Partenaire

Publish date : 2024-02-15 13:56:18

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