Un nouveau signal d’alarme dressé par l’ONU. Alors que les différentes branches des Nations unies appellent de jour en jour à un arrêt des combats dans la bande de Gaza et à une entrée largement accrue d’aide humanitaire, c’est cette fois-ci un rapport sur l’insuffisance alimentaire et la famine dans l’enclave palestinienne qui vient alerter sur la situation infiniment difficile pour les populations civiles.Ce rapport, publié ce lundi 18 mars, a été établi par un organisme technique, le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC). Celui-ci se base sur les données de deux agences onusiennes : le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO). Il analyse et classifie la sévérité de l’insécurité alimentaire sur une échelle fondée sur des normes scientifiques internationales. Avec un constat clair : le risque de famine dans la bande de Gaza ne fait que s’aggraver de jour en jour, notamment au nord de l’enclave, L’Express revient pour vous sur ces dernières données chiffrées sur la situation humanitaire à Gaza.Quels sont les critères pour une situation de famine ?La famine est définie par l’IPC comme “un état de privation alimentaire extrême”. “Des niveaux d’inanition, de décès, de dénuement et de malnutrition aiguë critiques sont manifestes ou risquent de le devenir”, ajoute l’organisme. La classification en état de “famine” représente la phase de sévérité la plus élevée de l’échelle de l’IPC d’insécurité alimentaire aiguë, qui en compte cinq : phase 1 (“minimale”), phase 2 (“stress”), phase 3 (“crise”), phase 4 (“urgence”), et enfin phase 5 (“catastrophe/famine”).La phase 5 est atteinte lorsqu’un territoire remplit ces trois critères : au moins 20 % des foyers sont confrontés à un manque extrême de nourriture ; au moins 30 % des enfants souffrent de malnutrition aiguë ; et au moins deux personnes sur 10 000 ou au moins quatre enfants de moins de cinq ans sur 10 000 meurent chaque jour d’inanition pure et simple ou en raison d’une interaction de la malnutrition et de la maladie.Il n’existe cependant pas de seuil clairement défini par l’IPC pour une situation de famine. Toujours selon l’organisme, une fois les données publiées et disponibles à tous, “il appartient aux parties prenantes concernées au niveau du pays, telles que les autorités gouvernementales et les agences des Nations unies, de déclarer une famine”. Les deux dernières famines déclarées par l’ONU remontent à 2017 au Soudan du Sud et en 2011 en Somalie.Ces critères sont-ils atteints à Gaza ?Actuellement, la situation est déjà extrêmement difficile. Au 15 mars, 30 % de la population gazaouie, soit 670 000 personnes, se trouvait en phase 5, soit en “famine”. A cela, on peut ajouter 39 % des habitants qui sont en situation d'”urgence” (876 000 personnes), et 26 % en “crise” alimentaire (578 000 personnes). Enfin, rien que dans les deux districts au nord de la bande de Gaza (Gaza Nord et la ville de Gaza), 55 % de la population serait en situation de famine (165 000 personnes) et 25 % en urgence alimentaire (75 000 personnes).Mais c’est surtout dans la projection prévue dans les prochains mois que la situation devrait devenir critique, alerte l’IPC. Ainsi, “dans le scénario le plus probable et dans l’hypothèse d’une escalade du conflit, comprenant une offensive terrestre à Rafah”, ce seraient près d’1,1 million de Gazaouis qui basculeraient en situation de famine. Soit “le nombre le plus élevé jamais enregistré par l’IPC de personnes faisant face à une situation alimentaire catastrophique”, a souligné ce lundi le PAM.Avec là aussi, une situation particulièrement détériorée dans le nord de Gaza, avec près de 70 % de la population qui serait en famine et 30 % en urgence. De quoi faire dire à l’IPC que “la famine est imminente dans les districts du Nord et devrait se produire à tout moment entre la mi-mars et mai 2024”, tandis que la situation de famine dans les trois autres districts au sud et au centre de Gaza devrait se produire “entre la mi-mars et la mi-juin, dans le pire des scénarios avec une chance raisonnable de se produire”.Que demande l’ONU ?Si ces données restent des projections – jugées “plausibles” par l’organisme onusien, ce dernier insiste sur le fait de ne pas attendre un futur bilan dans les prochains mois pour réagir. “Il est essentiel de noter que la famine prévue peut être évitée ou atténuée. Tous les éléments indiquent une accélération majeure des décès et de la malnutrition. Il est indéfendable d’attendre une classification rétrospective de la famine pour agir”, écrit l’IPC dans la conclusion de son rapport.Il existe néanmoins toujours, selon le PAM, “une fenêtre étroite” pour empêcher la famine. Les mesures nécessaires pour empêcher ce risque imminent sont à trouver dans une “cessation immédiate des hostilités”, un “accès total à la nourriture, à l’eau, aux médicaments, ainsi que la protection des civils”, ainsi que le “rétablissement et des services de santé, d’eau et d’assainissement, ainsi que d’énergie à la population des districts du nord.”Un “cessez-le-feu humanitaire immédiat” rapide permettrait “de faire entrer suffisamment de nourriture, de médicaments et d’eau potable” dans les zones pour éviter une famine, abonde la directrice générale adjointe du FAO Berth Bechdol auprès de l’AFP, mais un arrêt des hostilités “ne semble pas probable dans les jours ou semaines à venir”.En parallèle, l’ONU appelle depuis le début du conflit à une nette augmentation de l’entrée d’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne. Toujours selon le PAM, pour assurer les besoins alimentaires de base, il faudrait faire entrer à Gaza “au moins 300 camions par jour”, particulièrement dans le Nord, où il n’a pu acheminer que neuf convois d’aide depuis le début de l’année. Les derniers 18 camions d’aide alimentaire ont été livrés dimanche soir à la ville de Gaza. Insuffisant, pour l’instant, pour empêcher une éventuelle crise alimentaire d’ampleur.
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Publish date : 2024-03-18 18:27:48
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