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“Mediterranea Inferno” : un “visual novel” queer au style sidérant

“Mediterranea Inferno” : un “visual novel” queer au style sidérant



“Peut-être que l’on serait plus beau à une autre époque.” Puis : “Je crois que ceux qui me traitent bien m’intéressent moins.” Ou encore : “J’ai 25 ans et je suis déjà fatigué.” Deuxième jeu de l’Italien Lorenzo Redaelli après le déjà formidable Milky Way Prince – The Vampire Star, Mediterranea Inferno nous fait partager trois jours et nuits de la vie de trois jeunes gens qui, il n’y a pas si longtemps, furent les rois de la fête milanaise.
Après s’être perdus de vue au temps du Covid omniprésent et des confinements, Claudio, Mida et Andrea se retrouvent un été dans les Pouilles à l’approche de Ferragosto, la fête italienne de l’Assomption.
Nos amis iront-ils en boîte ou au marché, au cimetière ou à la plage ?
Pour renouer avec le passé, le ressasser ou constater qu’ils ont irrémédiablement évolué ? Pour reprendre les mêmes rôles ou en changer au sein de ce bizarre triangle plus ou moins amoureux ? Tout l’art de Redaelli consiste à donner une forme à ces interrogations et à pas mal d’autres en passant. Une forme instable, alternativement grandiose et dérisoire, par moments tragique mais toujours scintillante.
Récemment adapté sur console quelques mois après sa sortie sur PC, Mediterranea Inferno appartient au genre du visual novel. Le texte y occupe donc une place essentielle, entre aveux et bravades, aphorismes dandy et name-dropping choisi (Visconti, Kate Bush, Monica Vitti…). À l’occasion, il faut faire des choix qui peuvent paraître délibérément caricaturaux : nos amis iront-ils en boîte ou au marché, au cimetière ou à la plage ? Parfois, aussi, une option se révèle inaccessible, visible mais barrée (serait-elle inenvisageable pour eux ?), comme dans ce titre fondateur de la fiction interactive moderne qu’était Depression Quest de Zoë Quinn.
Mais c’est d’abord plastiquement que Mediterranea Inferno impressionne, en particulier quand il fait fusionner des univers, des registres, des façons d’être ou de penser qui ne semblaient pas appelées à se rencontrer. Le principe général est celui du rituel ou de la cérémonie, de l’église aux réseaux sociaux en passant par les événements mondains, la mise en scène de (et parfois seulement pour) soi et jusqu’au porno.
Une cohérence thématique et une tonalité ludique particulière
Surtout, les frontières vacillent entre le réel et ce qui se passe dans la tête de nos héros à travers les “mirages” qu’ils visitent chacun à leur tour. Ces derniers tiennent à la fois du trip (éventuellement mauvais) ésotérique, de la séance de psychanalyse transmuée en féerie pop brutale et de l’expérimentation sur le concept même de niveau de jeu vidéo, avec un début et une fin nets, une cohérence thématique et une tonalité ludique particulière (avec ici une touche de jeu de rythme, là de la poursuite…).
“Nous sommes fluides, changeants, queer dans le plus beau sens du terme”, s’extasie l’un des ragazzi. Une description qui colle peut-être encore mieux à ce jeu qui les célèbre autant qu’il les met au supplice. “Ton corps est un sacrement”, s’entendent-ils dire. Mais aussi : “Être triste n’est pas un crime.” On n’est en revanche pas tout à fait certain qu’atteindre de telles hauteurs dès son deuxième jeu n’en soit pas un.
Mediterranea Inferno (Eyeguys/Santa Ragione), sur Switch, PS4/PS5, Xbox, Mac et PC, environ 15 €.



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Author : Erwan Higuinen

Publish date : 2024-03-31 10:00:00

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