C’est une intrusion sans précédent récent dans le monde. Vendredi 5 avril, des policiers équatoriens ont fait irruption dans l’ambassade mexicaine à Quito, en Équateur, pour arrêter l’ancien vice-président équatorien, Jorge Glas, accusé de corruption, qui s’y était réfugié en décembre et avait quelques heures plus tôt obtenu l’asile politique.Il s’agit d’une violation de la convention de Vienne qui garantit l’inviolabilité des ambassades, ont dénoncé plusieurs gouvernements d’Amérique latine. Le Mexique et le Nicaragua ont annoncé rompre leurs relations diplomatiques avec l’Équateur, tandis que l’ONU et les États-Unis se sont dits alarmés et ont demandé aux deux pays de “résoudre leurs différends”. Le personnel diplomatique mexicain basé à Quito va quitter l’Équateur ce dimanche 7 avril.Escalade diplomatiqueMercredi 3 avril, le président mexicain, Andrés Manuel López Obrador, avait accusé les autorités équatoriennes d’avoir exploité l’assassinat du candidat d’opposition Fernando Villavicencio, le 9 août 2023, pour favoriser l’élection de Daniel Noboa à la présidence de l’Equateur, au détriment de la candidate de gauche. Le lendemain, le ministère des Affaires étrangères équatorien a décidé, en réponse, de “déclarer persona non grata l’ambassadrice du Mexique à Quito, Raquel Serur Smeke”, sommée de quitter le pays “à brève échéance”, a-t-il annoncé dans un communiqué. Le pouvoir équatorien exigeait par ailleurs la remise de l’ancien vice-président du pays, Jorge Glas, réfugié dans l’ambassade du Mexique depuis le 17 décembre.Vice-président entre 2013 et 2017, ce dernier est accusé d’avoir détourné des fonds publics destinés à la reconstruction de villes côtières après un séisme en 2016. Dans une autre affaire, il avait été condamné en 2017 à six ans de prison pour corruption dans un vaste scandale impliquant le géant de la construction brésilien Odebrecht, et avait été libéré en novembre dernier.Mais vendredi 5 avril, le Mexique a décidé d’accorder l’asile à Jorge Glas, en réaction à la demande d’expulsion de son ambassadrice. Dans la foulée, l’Équateur a qualifié cet asile d'”illégal” au regard du droit international et dénoncé un “abus des immunités et privilèges” accordés à l’ambassade et une ingérence dans ses affaires intérieures. “Jorge Glas a fait l’objet d’une condamnation exécutoire et d’un mandat d’arrêt émis par les autorités compétentes”, a commenté le ministère équatorien de la Communication. “En conséquence, l’Équateur n’accordera aucun sauf-conduit (à Jorge Glas pour quitter le pays), car cela n’est pas justifié”, a indiqué le ministère équatorien des Affaires étrangères.Un raid “hors-norme”L’escalade a pris une tout autre tournure quand, après l’annonce du Mexique d’accorder l’asile à Jorge Glas, des policiers équatoriens ont fait irruption dans l’ambassade mexicaine pour arrêter l’ancien vice-président. Des images publiées dans les médias locaux montrent le chef de la mission diplomatique mexicaine, Roberto Canseco, crier “c’est un scandale !” en courant derrière des véhicules quittant son ambassade. S’ensuit une bousculade, au cours de laquelle Roberto Canseco tombe à terre.#Breaking: The @DanielNoboaOk regime in #Ecuador invaded the Embassy of #Mexico tonight to kidnap the former vicepresident @JorgeGlas, who sought legal asylum there. The Mexican ambassador was violently beaten and the staff were forced out.
In legal terms, this is an invasion of… pic.twitter.com/e0x5nmrT5p— Denis Rogatyuk (@DenisRogatyuk) April 6, 2024″C’est totalement hors norme, je suis très inquiet qu’ils puissent tuer Jorge Glas”, a déclaré le chef de la mission diplomatique à une télévision locale, encore tremblant.Jorge Glas a été transféré samedi dans une prison de haute sécurité à Guayaquil (sud-ouest de l’Equateur), selon des sources gouvernementales. Le Service national d’attention intégrale aux adultes privés de liberté et aux adolescents délinquants (SNAI) a confirmé la présence de Jorge Glas dans une prison de Guayacil, rapporte le quotidien argentin La Nación. Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, le SNAI annonce que l’ancien vice-président “se trouve au Centre de privation de liberté (CPL) Guayas N 3. Il y subira une évaluation médicale et “sera placé conformément aux critères de classification initiaux” du pénitencier, selon la note citée par le journal.Violation de la convention de VienneLe Mexique a alors annoncé dans la soirée du 5 avril “la rupture immédiate” de ses relations diplomatiques avec l’Équateur. Le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador a qualifié cette intervention de “violation flagrante du droit international et de la souveraineté du Mexique”, dans un message sur le réseau social X : “J’ai chargé notre ministre des Affaires étrangères […] de déclarer immédiatement la suspension des relations diplomatiques avec le gouvernement équatorien.”Me acaba de informar Alicia Bárcena, nuestra secretaria de Relaciones Exteriores que policías de Ecuador entraron por la fuerza a nuestra embajada y se llevaron detenido al exvicepresidente de ese país quien se encontraba refugiado y tramitando asilo por la persecución y el acoso…— Andrés Manuel (@lopezobrador_) April 6, 2024L’intrusion a été largement condamnée par les gouvernements de gauche d’Amérique latine, du Brésil au Venezuela, en passant par le Chili et même par l’Argentine du président ultralibéral Javier Milei. Le Nicaragua a aussi annoncé rompre toutes relations diplomatiques avec l’Équateur. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit samedi “alarmé” par le raid, estimant que toute violation des enceintes diplomatiques “compromet la poursuite de relations internationales normales”, selon son porte-parole. Il a exhorté l’Équateur et le Mexique à faire preuve de “modération” et à “résoudre leurs différends par des moyens pacifiques”.Les États-Unis – qui condamnent “toute violation de la Convention de Vienne” – ont également encouragé les deux États “à résoudre leurs différends dans le respect des normes internationales”, d’après un porte-parole du Département d’État. Le Mexique a annoncé son intention de dénoncer l’irruption des policiers dans son ambassade devant la Cour internationale de justice, alléguant une “violation irréparable” de la convention de Vienne, qui stipule que “les locaux de la représentation sont inviolables”. L’Equateur a pour sa part défendu son action, arguant “qu'”aucun criminel ne peut être considéré comme une personne politiquement persécutée”.A la ciudadanía: pic.twitter.com/KKhTQVbXD8— Presidencia Ecuador 🇪🇨 (@Presidencia_Ec) April 6, 2024En attendant, le personnel diplomatique mexicain basé à Quito va être évacué de la ville ce dimanche. Dix-huit personnes, diplomates et membres de leur famille, vont partir vers Mexico à bord d’un vol commercial, a annoncé le ministère des Affaires étrangères mexicain. Parmi elles figurent l’ambassadrice Raquel Serur – qui avait été déclarée “persona non grata” par l’Equateur – et le chef de la mission diplomatique Roberto Canseco. Tous seront accompagnés à l’aéroport par des personnels de “pays amis et alliés” qui ont proposé de “veiller” à leur “intégrité”, détaille le ministère.
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Publish date : 2024-04-07 11:09:13
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