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Avec “Ma voix, mon choix”, les féministes se rassemblent dans toute l’Europe pour le droit à l’IVG

Avec “Ma voix, mon choix”, les féministes se rassemblent dans toute l’Europe pour le droit à l’IVG



Tandis que l’accès à l’IVG est une nouvelle fois débattu ce jeudi 11 avril en Pologne, laissant craindre aux militantes féministes une restriction encore plus drastique de leurs droits, le mouvement Ma Voix, mon choix a lancé des manifestations de soutien aux Polonaises dans plusieurs villes de France. Derrière cette mobilisation, ce nouveau mouvement européen, qui regroupe plusieurs associations féministes et dont la coordination est assurée au niveau national par des figures du féminisme (en France, Alice Coffin et Mathilde Viot entre autres), veut faire peser les droits des femmes dans les débats européens à quelques semaines des élections. Avec, comme premier objectif affiché, de demander à l’Union européenne d’assurer un accès sûr et gratuit à l’avortement pour tous·tes, cette coalition internationale de grande ampleur veut devenir une force influente et organisée contre les menaces qui pèsent sur les droits des femmes. Entretien avec la journaliste, militante et Conseillère de Paris Alice Coffin.

Qu’est ce que Ma voix, mon choix ?

À ce jour, c’est la plus grosse campagne féministe à laquelle il m’ait été donné de participer. Cette initiative réunit les plus grosses organisations féministes européennes pour obtenir du Parlement un changement de législation sur l’avortement, qui permettrait que l’UE fasse rembourser toute citoyenne qui doive traverser les frontières ou changer de pays pour avorter. On estime qu’il y a 20 millions de femmes dans cette situation actuellement en Europe.

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Comment procédez-vous ?

À travers un dispositif dénommé l’Initiative citoyenne européenne (ICE) : nous avons un an pour collecter un million de signatures afin que ce notre proposition soit discutée au Parlement européen. Il y a des coordinatrices nationales un peu partout et, en compagnie de Mathilde Viot et d’autres, je coordonne le territoire français. On est dans la Creuse aujourd’hui et à Limoges tout à l’heure, car l’idée est de faire un maillage territorial très étroit dans toute l’Europe pour créer à terme un réseau féministe qui soit aussi réactif et soudé que peuvent l’être les réseaux très hostiles aux droits des femmes en Europe. On sait que ces derniers sont très moteurs, actifs et très bien coordonnés et il faut absolument que les féministes parviennent à l’être aussi. Cette campagne est volontairement lancée au moment des élections européennes car, si les mouvement féministes sont devenus très puissants en Europe, il y a un décalage avec le peu de place accordée aux questions des droits des femmes dans les débats publics consacrés aux élections européennes. Il s’agit donc aussi de se rappeler au bon souvenir des politiques.

Qui en a été à l’initiative au départ ?

Les Slovènes. Elles ont dans leur pays une organisation géniale qui s’appelle L‘Institut du 8 mars, avec laquelle elles ont réussi à influer sur leur gouvernement pour obtenir, par exemple, des réformes sur le consentement. C’est elles qui ont réuni toutes les organisations, comme en Pologne Strajk kobiet (NDLR : “Grève des femmes” en français) qui est à l’origine de toutes les manifestations féministes fleuves à Varsovie et ailleurs. En Espagne, la figure de la campagne est Cristina Fallarás, qui a lancé le #MeToo espagnol, #Cuéntalo (NDLR : raconte-le), en Irlande ce sont celles qui ont coordonné les campagnes sur l’IVG en 2018, bref, ce sont des gens très solides à travers toute l’Europe.

Le droit à l’IVG est aujourd’hui débattu en Pologne avant d’être soumis au vote demain. Quel est l’enjeu dans ce pays où l’avortement est quasi entièrement proscrit ?

Avec le nouveau gouvernement au pouvoir, les Polonaises espéraient un assouplissement des conditions d’accès. Mais quatre propositions de lois sont examinées, dont trois sont en faveur d’un assouplissement et une au contraire en faveur d’un renforcement, si tant est que ce soit possible (NDLR : En Pologne, l’IVG n’est autorisée qu’en cas de viol, d’inceste ou de danger pour la vie de la femme enceinte). Elles craignent beaucoup que cette dernière proposition passe, car le parti chrétien fondamentaliste s’est aligné sur ce sujet avec l’extrême-droite.

Un lissage du droit à l’avortement au niveau européen serait-il possible ?

Non, car l’avortement ne fait pas partie des compétence européennes. L’UE n’a pas le droit d’agir auprès des pays pour changer la législation, comme c’est aussi le cas pour le mariage pour tous, par exemple. En revanche, la santé fait partie de ses compétences donc nous passons par là, par cette possibilité de débloquer des fonds, de distribuer de l’argent pour un nouveau dispositif. Notre demande est de créer une sorte de sécurité sociale européenne de l’avortement et donc de soumettre l’UE à l’obligation de rembourser toute démarche entreprise pour accéder à l’avortement, car cela met en péril la santé de certaines citoyennes de l’UE, comme c’est le cas en Pologne où les femmes en meurent. Mais il n’y a pas qu’en Pologne. En Croatie et en Autriche, la situation est épouvantable aussi, en Italie c’est de plus en plus catastrophique et notamment dans le Sud, où les médecins exercent leur clause de conscience à plus de 90 %.

En France, sommes-nous globalement mieux loties que nos voisines européennes ?

La France et la Slovénie sont dans des situations plus correctes que les pays voisins. Mais, en France, il y a quand même cette dégradation généralisée du système de santé qui pèse évidemment sur l’accès à l’IVG. Les baisses de subventions dramatiques, notamment dans les planning familiaux, rendent les choses difficiles. Par ailleurs, nous profitons de cette campagne pour mettre en lumière quelques angles morts dans l’accès à l’avortement, comme les biais racistes, dans la lignée du syndrôme méditérannéen. Nous avons recueilli des témoignages de femmes racisées qui nous ont raconté comment elles avaient été accueillies. Nous allons également consulter les personnes trans et nous travaillons en lien avec l’association handi-féministe Les Dévalideuses, pour mettre en lumière toutes les difficultés autour de l’IVG et du handicap. Le moteur de la campagne, à chaque fois, c’est mettre en lien les associations qui travaillent sur les mêmes sujets en Europe, parce qu’on ne se connait pas assez. Cela permet de découvrir la richesse du paysage féministe européen.



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Author : Faustine Kopiejwski

Publish date : 2024-04-11 16:37:46

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