Suite à la parution le 11 avril du livre Transmania – Enquête sur les dérives de l’idéologie transgenre, aux éditions Magnus (maison d’édition indépendante cofondée par l’éditrice Laura Magné et le journaliste et écrivain réactionnaire Laurent Obertone, et qui abrite aussi le YouTubeur d’extrême droite Papacito), SOS Homophobie a annoncé sur son compte X qu’elle allait porter plainte pour les propos “transphobes” des autrices Dora Moutot et Marguerite Stern. Entretien avec Véronique Godet, co-présidente et porte-parole de l’association qui lutte contre la haine à l’égard des personnes LGBTQIA+.
Quel est l’objet de la plainte déposée par SOS homophobie ?
L’idée, c’est surtout de déconstruire les propos de leur livre. Par exemple, le fait de parler d’une “idéologie transgenre” est un véritable contresens. L’idéologie est un système qui pré-définit l’idée, à partir duquel on va analyser la réalité. Or, c’est précisément Transmania qui véhicule une véritable idéologie transphobe, à laquelle nous allons opposer la connaissance des personnes trans, des personnes concernées qui sont en capacité d’exprimer qui elles sont, ainsi que leurs besoins. Il y a un renversement sémantique total qui pose problème.
Quels passages du livre sont particulièrement problématiques ?
Toutes les projections de fantasmes sur les femmes trans sont absolument abjectes. Pour elles, ce sont “des incels, c’est-à-dire des hommes incapables de plaire aux filles, qui vivent un célibat involontaire”. Et la façon dont sont évoqués les hommes trans est tout aussi infâme. “Les hommes trans sont des lesbiennes qui n’acceptent pas leur homosexualité, des butchs souvent perçues comme des femmes ratées”, écrivent-elles, par exemple. Tout est comme ça, c’est véritablement insupportable. Elles associent aussi les drag queens à des pédophiles. Elles expliquent que les parents doivent préserver leurs enfants de cette “idéologie”. Mais on ne choisit pas son orientation sexuelle, pas plus qu’on ne choisit son identité de genre. Comment peut-on protéger des enfants de cette prétendue “idéologie” ? La menace, ce n’est pas d’être trans, c’est la haine transphobe assumée.
Qu’espérez-vous avec cette plainte ?
Qu’elles soient condamnées pour leurs propos haineux et diffamatoires. Cette violence fait écho à celle de la sénatrice Jacqueline Eustache-Briniot, qui veut faire disparaître les adolescent·es trans des collèges et des lycées en demandant l’abrogation de la circulaire Blanquer (Ndlr: cette circulaire permet aux adolescent·es qui le désirent d’être accompagné·es en milieu scolaire dans leur démarche de transition sociale grâce au suivi de certaines bonnes pratiques). Elle va d’ailleurs déposer une proposition de loi le 28 avril à l’Assemblée nationale où elle demandera également l’interdiction de tout traitement médical et de toute chirurgie avant 18 ans.
Avez-vous l’impression d’assister en ce moment à une montée de la transphobie ?
Complètement. Les personnes trans vivent ce qu’ont vécu les gays dans les années 80. C’est très grave. Les deux autrices de Transmania évoquent d’ailleurs le “transgenrisme” comme “précurseur d’une ère de post-vérité transhumaniste”. On se demande comment elles peuvent élaborer de telles sottises. C’est du verbiage, ça ne veut rien dire. Ce sont des délires sémantiques. Par ailleurs, alors qu’on a interdit les thérapies de conversion, elles estiment qu’il faudrait “trouver un traitement médical digne de ce nom” pour “révolutionner le problème de fond”. Et pourquoi pas revenir aux électrochocs, tant qu’on y est ? C’est une pensée dangereuse et décadente, on retourne aux heures sombres de la phobie à l’égard des minorités de genre et c’est hyper violent pour les personnes trans. Nous sommes consterné·es.
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Author : Faustine Kopiejwski
Publish date : 2024-04-23 14:58:45
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