Si le milieu universitaire est bien celui des connaissances et du savoir, il est aisé de se rendre compte qu’Israël représente le seul pays au Proche-Orient qui applique la démocratie et permet à ses citoyens, de différentes origines, de s’exprimer. Pourtant, des étudiants de Sciences Po Paris et d’autres universités prestigieuses, comme Columbia aux Etats-Unis, soutiennent aujourd’hui sans réserve la “résistance” palestinienne en appelant à détruire Israël.Se libérer de l’impérialisme, se révolter contre le capitalisme, avec le keffieh, le drapeau palestinien et les chansons contre Israël, était à la mode dans les années 1960 chez les étudiants au Proche-Orient et ailleurs. Durant la guerre d’Algérie, une vague de mouvements étudiants a submergé le monde, alimentés par un fort sentiment de justice sociale et d’anti-impérialisme. Même chose avec la guerre du Vietnam. Les campus universitaires ont été le foyer de puissantes mobilisations étudiantes opposées à l’intervention militaire américaine et à leur politique étrangère.Assimiler le conflit israélo-palestinien à un combat semblable à celui de l’Algérie ou du Vietnam réveille des émotions particulières chez les étudiants d’aujourd’hui. A leurs yeux, il s’agit d’une lutte entre des opprimés et des colonialistes sionistes, qui s’inscrit dans une longue tradition. La photo de Che Guevara à Gaza, en 1959, est devenue iconique. Le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), organisation marxiste, a très vite investi le terrain académique. A l’université de Damas, quand les manifestants ont envahi les campus à la suite de la guerre de 1967, le FPLP a probablement joué un rôle actif dans la coordination et la mobilisation. Créé en 1987, le Hamas a lui aussi investi les universités. Au moment de la deuxième Intifada entre 2000 et 2005, des étudiants au Proche-Orient ont organisé des grandes manifestations soutenant le mouvement islamiste. Mais le printemps arabe a changé la donne : beaucoup de jeunes se sont rendu compte que leur ennemi numéro 1 n’avait jamais été Israël, mais la dictature qui dirige leur pays. C’est toujours le cas : on ne retrouve quasiment plus de manifestations pour la Palestine dans les universités des pays arabes.L’occultation des victimes palestiniennes en SyrieSur les campus occidentaux, dans les années 1960 comme aujourd’hui, les organisateurs ne reviennent jamais sur les origines historiques du conflit entre Israël et Palestine. La guerre israélo-arabe de 1948 a eu lieu parce que les Palestiniens ont refusé la décision de l’ONU d’une partition en deux Etats, alors qu’il s’agissait de la solution la plus logique plutôt que de poursuivre une guerre sans fin contre l’Etat hébreu. La même histoire se répète. Influencés par un discours victimaire sur les réseaux sociaux, des étudiants de Sciences Po ont adopté la vision du Hamas en répétant le slogan “De la rivière à la mer la Palestine sera libre.” Ce qui signifie l’effacement d’Israël. Un étudiant à Columbia a arboré le drapeau du Hezbollah en jouant de la guitare. Le massacre du 7 octobre est totalement occulté dans ces manifestations, tout comme les Palestiniens tués en Syrie dans les abattoirs de Bachar el-Assad. Entre 2011 et 2022, plus de 3 000 Palestiniens opposants au régime ont été arrêtés. On ne sait toujours pas ce qui est arrivé à la plupart d’entre eux, s’ils sont vivants ou morts.Rima Hassan, soutien des manifestations de Sciences Po, est une bonne illustration de cette manipulation. Elle a grandi à Neyrab, un camp de réfugiés palestiniens dans la banlieue d’Alep (Syrie). Jusqu’à aujourd’hui, 98 de ses compatriotes, nés dans ce camp, croupissent dans les prisons du régime fasciste de Bachar el-Assad sans qu’elle leur ait adressé un seul mot de solidarité. Chez ces étudiants pro-palestiniens, on ne parle pas des Palestiniens d’Israël, ceux que l’on appelle les Arabes de 48, comptant pour 21 % de la population israélienne. On ne parle pas du Hamas non plus, un mouvement islamiste issu des Frères musulmans. L’application de la charia, la lutte contre les juifs pour libérer la mosquée al-Aqsa sont une part essentielle de leur projet. Les étudiants adoptent même les chiffres de victimes publiés par le Hamas, comme si ce mouvement intégriste était une référence crédible.Retour vers le passéLa chanson Leve Palestina (Vive la Palestine), qui tournait en boucle sur les réseaux sociaux au début de la guerre entre Israël et le Hamas, égrène des mots comme socialiste, impérialisme, liberté. Elle a été diffusée dans les manifestations de soutien à Gaza. Son influence, surtout chez les jeunes, est basée sur la nostalgie de la résistance contre l’occupation et un retour vers un passé “mieux qu’aujourd’hui”, selon le récit de l’extrême gauche en Occident. C’est oublier que selon toutes les données, nous vivons bien mieux à notre époque actuelle, et cela à tous les niveaux : santé, économie, liberté d’expression, tolérance… Les étudiants en révolte s’identifient à un passé glorieux qui n’existe que dans leur pensée. Le danger de cette illusion, c’est la radicalisation et le refus d’opinions divergentes. En mars, le comité Palestine de Sciences Po a interdit à une étudiante juive de se présenter dans le grand amphithéâtre. Sur BFMTV, un étudiant a défendu cette discrimination, déclarant que les manifestations pour la Palestine ne doivent pas accepter les juifs, tout comme certains espaces féministes n’acceptent pas la mixité.A l’université Columbia comme à Sciences Po Paris, on a vu des occupations, des affrontements avec la police et des slogans répétés en boucle. Students for Justice in Palestine (SJP), créé en 1993 aux Etat-Unis, appelle publiquement au retrait des dotations financières des entreprises en lien avec l’Etat israélien et à la fin des programmes universitaires à Tel Aviv. Mais, tout comme les manifestants de Sciences Po, ces militants n’évoquent jamais la complexité du conflit, les raisons pour laquelle Israël se défend contre le Hamas, le fait que de nombreux Palestiniens ne soutiennent nullement ce mouvement terroriste, la diversité de la société israélienne… Ces manifestations, qui fonctionnent exclusivement sur un mode émotionnel, ne servent qu’à la propagande anti-israélienne.* Ecrivain et poète né à Damas, Omar Youssef Souleimane a participé aux manifestations contre le régime de Bachar el-Assad, mais, traqué par les services secrets, a dû fuir la Syrie en 2012. Réfugié en France, il a publié chez Flammarion Le Petit Terroriste, Le Dernier Syrien, Une chambre en exil, et récemment Etre Français.
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Publish date : 2024-04-28 17:00:00
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