Après la crise agricole, un intime du président constatait : “Quand les Français le regardent, ils se disent ‘Quand même, Macron, il porte la poisse’.” L’intéressé ne l’entend pas de cette oreille, lui qui n’aime rien tant que les crises, sûr qu’elles insufflent au chef de l’Etat et au pays la gravité qui leur sied. “Président des crises”, a même théorisé un stratège élyséen. Pas question de se cacher. Au contraire, Emmanuel Macron insiste : “Depuis 7 ans, nous avons vécu beaucoup de crises, nous les avons traversées. Et la situation que nous vivons pour notre pays en est une.” C’est l’avantage de ne pas se sentir comptable, ou si peu. Se renouveler au bout de sept ans, et sans rien avoir préparé, c’est se condamner à rabâcher.Dissolution, “refondation”. Le tout en affaiblissant le désormais puissant Rassemblement national et la bruyante et furieuse France insoumise. Enfantin. Une conférence de presse pour esquisser un cap, “bâtir une fédération de projets pour gouverner, pour agir au service des Français et pour la République”. Il suffit de “se mettre d’accord sur une vision” avec ceux qui, dans le cadre défini et mouvant de l’arc républicain tel que le président l’entend – mouvant puisque ceux qu’il exclue aujourd’hui étaient invités hier à prendre place autour de la table à Saint-Denis, mais passons –, souhaitent participer à la refondation annoncée.Cela donne quatre axes symboliques et éthérés, énoncés et décortiqués, ce mercredi 12 juin au Pavillon Cambon, par un président manifestement irrité par l’incompréhension de son action. Le voici qui détaille : “Premier élément : la protection de nos valeurs républicaines et la protection de nos compatriotes”. Deuxième axe : l’écologie. Troisième axe : le progrès. Enfin, le quatrième : “mieux vivre au quotidien”, redonner aux Français du pouvoir d’achat, notamment.”Ça devrait ressembler un peu à ça la Bérézina…”Des mots clefs, “universalisme”, “laïcité”, “intégration républicaine”, égrenés pour apaiser “la colère”, le mot est celui du président, de ceux qui dimanche 9 juin ont voté pour le Rassemblement national. Des promesses, scandées avec cette opiniâtreté toute macronienne : “Nous saurons agir pour réindustrialiser le pays, aller vers le plein emploi, garantir l’unité du pays, rejeter la brutalisation du débat public, aider l’Ukraine, bâtir l’Europe.” Et à la fin, deux impressions. D’abord, que la situation inconfortable qui est la sienne l’empêche. Se gardant d’anticiper les résultats de juillet, ne sachant donc pas avec qui il pourrait, demain, gouverner, Emmanuel Macron se trouve contraint de ne rien proposer de précis. Des axes mais pas de mesures, sauf quelques “objets” consensuels, comme on dit à l’Elysée – l’interdiction de “l’usage des téléphones avant onze ans”, les retraites indexées sur l’inflation… Des diagnostics – souvent justes -, des souhaits, des envies de débat (sur la laïcité, par exemple) mais pas davantage.Dire en pensant toujours que c’est faire. La “révolution copernicienne de l’action” ? Sept ans pour l’accomplir, c’est le second sentiment qu’on éprouve après ce discours du chef de l’Etat. Elu depuis 2017, Emmanuel Macron paraît né hier. “Pourquoi n’a-t-il pas fait tout ce qu’il a dit ?”, interrogent ceux qui l’écoutent. “Ça prend du temps […] la recette magique, ce n’est pas six mois”, leur rétorque-t-il. Situation impossible.Amertume d’un président qui se confronte à une crise dont, pour une fois, la sortie se fera par les urnes. Quoi de pire que l’incertitude… “Je crois à la démocratie et au retour au peuple”, se rassure l’intéressé. Mais “la vie politique n’est pas faite de gratitude”. La preuve, un ancien ami du président observait à la fin de la conférence de presse : “Ça devrait ressembler un peu à ça la Bérézina. Lourd, froid, crépusculaire.” Vivement demain.
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Author : Laureline Dupont
Publish date : 2024-06-12 11:15:00
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