Sur une plage naturiste d’Athènes, Nikitas s’interroge sur le scénario de son prochain film en compagnie de Demosthenes, son meilleur ami aux allures de dieu grec. Au fil de la conversation, la rupture douloureuse de Demosthenes avec son ex, Panos, devient le matériau de la fiction, initiant un mouvement introspectif qui les replonge deux étés auparavant. En alternant ces scènes d’élaboration du scénario avec des flashbacks, The Summer with Carmen prend la forme d’un film réflexif, qui raconte la fin d’une relation amoureuse tout en interrogeant, avec un savoureux sens de l’ironie, la possibilité même de traduire une expérience en récit.
Plusieurs inscriptions méta viennent ponctuer le film pour rappeler les “règles d’or de la scénarisation”, mettre en évidence la structure narrative ou encore synthétiser les leçons tirées par les personnages. La fiction consiste alors à ordonner le réel, en sélectionnant une poignée d’événements rendus significatifs. Carmen, le chihuahua de Panos adopté ensuite par Demosthenes, devient ainsi le fil rouge de l’histoire : elle incarne à la fois les oscillations sentimentales de ces ex-compagnons en servant de prétexte à leurs retrouvailles, tout en symbolisant le manque affectif ressenti alternativement par les deux hommes.
Un espace méditatif
L’exhibition des ficelles de l’écriture invite toutefois à porter un regard critique sur cette entreprise en révélant son caractère conventionnel. À plusieurs reprises, Demosthenes sera en désaccord avec la fictionnalisation de son expérience, comme si le principe de vraisemblance et la structure rigide en trois actes n’étaient pas tout à fait aptes à saisir la complexité du remous existentiel de ce jeune homo pris dans des sentiments contradictoires et tiraillé entre sa vie amoureuse, ses relations compliquées avec ses parents et son amitié avec Nikitas.
Mais au-delà de ce jeu méta désinvolte, la fiction apparaît aussi comme un processus essentiel à la construction de soi, où se raconter permet d’éclairer son vécu pour en tirer des enseignements. En creux, Zacharias Mavroeidis propose alors un bel éloge de l’amitié. Cette plage ensoleillée à l’écart du reste du monde se transforme en un espace méditatif, où les discussions entre amis permettent de donner un sens à sa vie, aussi fragile soit-il.
The Summer with Carmen de Zacharias Mavroeidis, avec Yorgos Tsiantoulas, Andreas Labropoulos (Gr., 2023, 1 h 46). En salle le 19 juin.
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Author : Robin Vaz
Publish date : 2024-06-15 07:00:00
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