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À Paris et à Montpellier, Dimitri Chamblas enchante les corps et met les voix en mouvement

À Paris et à Montpellier, Dimitri Chamblas enchante les corps et met les voix en mouvement



À bras-le-corps avait tout du titre manifeste. Nous sommes en 1992, Dimitri Chamblas et Boris Charmatz, à peine sortis du conservatoire, bousculent la danse contemporaine avec ce duo sans cadre, sans maître. “Il s’agissait de montrer ce que nous avions appris à cacher”, se souvient Chamblas. La souffrance, l’endurance, l’abandon. Ce dernier, venu d’un village des Alpes, avait “l’intuition que la danse allait lui offrir une autre vie”. Pas faux.
Après Edna, projet mené avec Charmatz, Dimitri Chamblas propose des résidences de recherche et d’écriture à Montpellier, crée Same Productions puis se lance dans l’aventure de la “3e Scène” virtuelle de l’Opéra de Paris à l’invitation de Benjamin Millepied. En 2017, c’est à Los Angeles que Dimitri Chamblas prend pied,entre le California Institute of the Arts et ses projets avec des plasticien·nes et musicien·nes. “Travailler dans une université, répéter avec des danseurs, me rendre dans un quartier de haute sécurité d’une prison… je n’ai pas le sentiment de m’être éparpillé car il y a une cohérence dans tous ces endroits, une sorte de circulation des corps, contraints ou plus libres”, répond-il.
Ces jours-ci, il est occupé à montrer Takemehome. Cette pièce revêt une certaine importance à ses yeux : elle marque le retour à l’excellence de la danse. “J’ai dansé avec des personnes dont ce n’est pas le métier, des amateurs, des réfugiés. Cette fois, je retrouve des solistes qui ont traversé à un moment ou un autre mon parcours. Salia Sanou, croisé en Afrique avec Mathilde Monnier, Marion Barbeau rencontrée à l’Opéra de Paris ou Jobel Medina. Ils ne se connaissaient pas mais font partie de mon histoire. Je vois cela comme des segments de mon parcours qui se rejoignent. Il y a longtemps que je n’avais pas eu sur scène de tels interprètes.” Inspirée par le Los Angeles nocturne lorsque les rares silhouettes racontent à leur façon cette ville horizontale, la pièce est également un portrait diffracté de son auteur. “Tu ne comprends pas comment la cité est faite ni pourquoi tu te mets à l’aimer.”
Surtout, la chorégraphie s’enrichit d’une bande-son unique de Kim Gordon. Le Français se souvient de sa première rencontre avec la guitariste de Sonic Youth. “On s’est retrouvés chez elle pour préparer une performance. Kim s’est mise à pousser les meubles, à brancher guitare et ampli. Et moi à danser.” Elle va l’inciter à garder une spontanéité, à “se perdre dans les accidents”. Ils ne cesseront de collaborer.
Pour Takemehome, Gordon signe une partition pour cinq guitares, en partie sur bande, l’autre jouée live par les danseurs. “Elle n’a jamais peur de faire de vrais choix artistiques.” Objet protéiforme, Takemehome, entre moments très écrits et improvisations, est à la lisière de la performance et du concert dansé. Au risque de perturber le public. Une pièce où il y a “beaucoup de cerveaux, beaucoup de directions”.
Les notes circulent, comme les énergies
Dimitri Chamblas dévoilera ensuite Crowd Out pour… 1 000 chanteur·ses. Son compositeur David Lang, agoraphobe, s’est un jour amusé à suivre une foule sans but apparent. Jusqu’à se retrouver dans les tribunes d’un stade. Il entend alors les sons, les cris et même les (rares) silences. Par la suite, collectant des témoignages, il va écrire une composition pour 1 000 voix. Dimitri Chamblas mettra le tout en scène lors d’une reprise à Los Angeles déployant les chanteur·ses dans tous les espaces du théâtre, pour faire circuler les énergies comme les notes. “Ton voisin dans la salle peut être un chanteur. Et se mettre à danser une chorégraphie assez simple.”
Après l’Opéra de Montpellier il y a deux ans, c’est à l’Opéra de Paris que Crowd Out va déployer son dispositif d’envergure dans le cadre de l’Olympiade culturelle. “L’envie est de déconstruire la hiérarchie du spectacle.” Celui qui, plus jeune, rêvait de danser avec Dominique Bagouet compte revenir en France. Le temps d’À bras-le-corps n’est pas si loin. Chamblas comme Charmatz se sont engagés à le donner toute leur vie. “Une façon de ne jamais nous quitter alors que la vie n’a jamais cessé de nous séparer. Être ensemble sur un plateau avec Boris, ce sont des moments rares. C’est le geste qui nous maintient.” Les deux complices n’en ont pas fini avec ce duo, éparpillant une poignée de dates chaque saison sur des agendas (sur)chargés.
Takemehome de Dimitri Chamblas, musique Kim Gordon. Au festival Montpellier Danse, du 27 au 29 juin ; au Théâtre de Chaillot, Paris, du 18 au 21 septembre.
Crowd Out de David Lang, mise en espace Dimitri Chamblas. À l’Opéra de Paris, le 1er juillet.



Source link : https://www.lesinrocks.com/arts-et-scenes/a-paris-et-a-montpellier-dimitri-chamblas-enchante-les-corps-et-met-les-voix-en-mouvement-618234-23-06-2024/

Author : Philippe Noisette

Publish date : 2024-06-23 07:00:00

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Tags :Les Inrocks

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