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À la Paris Fashion Week masculine printemps-été 2025, le détail tue

À la Paris Fashion Week masculine printemps-été 2025, le détail tue



En 1986, six jeunes stylistes sorti·es de la même promotion de l’Académie des beaux-arts d’Anvers entassent leurs créations dans un van et se lancent à l’assaut de la mode londonienne.

Surnommé·es les “Six d’Anvers” à cause de leur nom difficile à retenir pour la presse, ils et elles empruntent la voie audacieuse de la mode expérimentale, tissée quelques années plus tôt par Rei Kawakubo avec Comme des garçons ou Yohji Yamamoto. Castings mixtes, idée de la beauté déliée des canons usuels, hybridation des codes bourgeois et underground : cette mode va à rebours des conventions parisiennes en vigueur – une variante de l’anti-mode.

Des adieux avec la collection “Pas de début, pas de fin”

Parmi elleux, Dries Van Noten se fait connaître pour ses combinaisons audacieuses d’imprimés et des silhouettes où l’élégance et le confort sont synonymes. En mars dernier, le monde de la mode était sous le choc, le créateur fixant la date de son 129e et dernier défilé au 22 juin, déclarant qu’il était temps de “céder la place à une nouvelle génération”.

Loin d’être pris au piège par le thème mélancolique du défilé best of momifiant, l’événement a pris la forme d’une large célébration dansante, regroupant dans le public des designers confirmé·es comme que Pierpaolo Piccioli ou Haider Ackermann, mais aussi la relève belge avec Glenn Martens (Y/Project, Diesel). Veste argentée, trench rosé translucide ou violet métallique : luxe des matières et élégance des coupes se croisaient sur le podium constitué de confettis argentés, volant au gré des pas des mannequins. La voix de Bowie chantait “I will sit right down, waiting for the gift of sound and vision” (Sound and Vision), comme pour dire que Dries Van Noten continuerait de contempler, imaginer et créer. Même s’il passe les clés de la maison, la création fait partie de lui. Il n’y a pas de fin à cela.

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Artification des basiques

Si Dries Van Noten s’est imposé au fil des années, c’est en partie pour avoir fait de la simplicité un art, et joué avec les couleurs et les superpositions. Cette méthode se décline et se traduit dans plusieurs collections cette saison, notamment dans les plus grandes maisons de luxe et de création, de Dior à Hermès, en passant par les ensembles noirs entre workwear et tailoring de Louis Vuitton.

Dans ce contexte incertain, la simplicité et la nonchalance semblent plus rassurantes. La fantaisie ? Les it-bags masculins : un Mini Saddle chez Dior, un Flamenco doré chez Loewe, et des grands sacs fourre-tout chez Hermès. Le it-bag reste le plus grand allié du luxe. 

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Chez Dior, de nombreux costumes à la coupe impeccable succèdent à des ensembles composés de petits blousons de travail, vestes à quatre boutons et bermudas larges, parfois portés avec des bottines de moto.

Plusieurs accessoires permettent de changer la lecture des tenues, comme un chat de porcelaine porté au creux du bras, faisant écho aux travaux du céramiste sud-africain Hylton Nel, 83 ans, dont des versions géantes des œuvres habillent le podium. L’effet porcelaine se retrouve dans une série de petits fichus amovibles créés par l’artiste multidisciplinaire Flávio Juán Núñez, qui a drapé de la popeline de coton avant que celle-ci ne durcisse. Une innovation croisant les savoir-faire.

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Du côté des jeunes marques, les associations avec des artistes et artisan·es sont nombreuses : chez 3.Paradis, les vestes basiques sont décorées par Johanna Tordjman. Pour l’as du développement textile, Louis Gabriel Nouchi, les œuvres de Sasha Ferré sont imprimées sur des costumes, poursuivant sa démarche d’inclusivité en racontant une pluralité de masculinités.

Quant à la maison Fursac, direction le musée Picasso, où les costumes parfaitement coupés s’exposent au milieu d’œuvres de Lionel Estève, dans le cadre de l’exposition Proche de l’horizon.

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Des libertés punk

Hybrides et jouant sur la diversité des concepts, des formes d’artisanat et d’esthétique, les collections de Jonathan Anderson pour Loewe sont difficilement réductibles à un seul adjectif, ce qui en fait sans doute la maison la plus antisystème du système. Intitulée A Radical Act Of Restraint, la collection printemps-été 2025 s’organise notamment autour d’une érotique de l’art, concept de la philosophe Susan Sontag, qui consiste à privilégier le plaisir sensuel plutôt que l’interprétation.

Il en résulte un vestiaire syncrétique, à la fois surréaliste et ultra-portable, composé, entre autres, de blazers ajustés et de pantalons skinny noirs, ou de perfectos déconstruits portés comme des ponchos. Des références au skate et au grunge se devinent dans des pantalons larges proches du sarouel, surmontés de pièces en tartan.

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Des silhouettes dandy punk se devinent chez Junya Watanabe, où les jeans destroys s’associent à des vestes tailoring aiguisées. Imaginer le punk contemporain, tel est aussi le pari d’Idris Balogun, lauréat du prix Karl Lagerfeld au LVMH Prize 2022. Celui qui a fait ses classes à Savile Row associe coupes tailoring et textiles légers, et imagine, à partir d’archives new-yorkaises, un punk parisien incarné par le musicien, poète et danseur Oko Ebombo.

Une interprétation qui actualise et déconstruit l’idée de ce style, comme le fait dans une esthétique entre pop et underground la marque Doublet. Cette saison encore, quelques punks se glissent dans la collection très néo-Birkin, comme une version destroy de l’actrice et chanteuse.

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Familier et inconnu à la fois

Pour Hermès, Véronique Nichanian propose elle aussi un ailleurs libertaire, évoquant la mer, alors que résonnent Differences Aside de Loverman ou la composition rock haute couture du songwriter Amen Dunes, Blue Rose.

Des références pointues, faisant écho à un vestiaire aux multiples détails : blousons sans col, transparence et motifs comme des traces de vagues effacées, qui parfois se prolongent sur la peau. Certaines chemises sont perçues comme des blousons, et des pantalons ressemblent à des pyjamas. Les ambiguïtés sont reines dans cette collection, proposant de multiples vies à des basiques haut de gamme.

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Chez Homme Plissé Issey Miyake, les silhouettes sont également impossibles à définir avec un seul adjectif, car transformables, sculptées par le souffle du vent. Présentée dans la cour du Mobilier national, la collection aux teintes entre neutres et pastel alterne costumes trois pièces et parkas fluides ou longues capes. Une autre manière de rendre la simplicité exceptionnelle et d’élever le quotidien.

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Néo-dandy

Larges costumes imprimés, cols à dentelle et corsets : chez Kidsuper, Colm Dillane questionne le sens des conventions et actualise une forme de dandysme. Les silhouettes ont de multiples accessoires – des sacs, des guêtres en dentelle – et prennent vie dans un défilé-performance ouvert et fermé par le Cirque du Soleil. Roland Barthes disait du dandy qu’il concevait sa tenue comme un artiste moderne conçoit une composition. C’est exactement cela.

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Le dandy est également une figure qui sert à dire, à chaque époque, une forme de radicalisme. Ce terme a souvent été associé à Rei Kawakubo qui, cette saison, imagine une silhouette masculine entre noir et rose, coiffée d’une crête composée de barrettes enfantines, et vêtue de dentelles et de multiples détails camp. Naïveté enfantine et liberté radicale deviennent synonymes dans sa collection intitulée The Hope of Light. “Je veux espérer un peu de lumière, même si elle est infime”, écrit la fondatrice de la marque Comme des Garçons dans la note d’intention du show.

Il en résulte des ensembles tailoring augmentés de volants, de longs manteaux noirs rigides dont du tulle blanc déborde ; des velours, des brocarts métalliques, des vestes en tulle et des cascades de plis évoquent les tenues des grands soirs. Une note d’espoir pour des silhouettes qui continuent de questionner sans s’inquiéter des conventions de la mode, et un même état d’esprit que celui de Dries Van Noten il y a trois décennies. 

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Author : Manon Renault

Publish date : 2024-06-25 15:49:53

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Tags :Les Inrocks

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