*.*.*
close

L’artiste féministe Judy Chicago à l’honneur au LUMA d’Arles

L’artiste féministe Judy Chicago à l’honneur au LUMA d’Arles



C’est la première grande rétrospective en Europe de Judy Chicago, artiste féministe américaine majeure. L’exposition Herstory que lui consacre le LUMA, à Arles, présentée sous une forme réduite au New Museum à New York en début d’année, embrasse l’ensemble des travaux de celle qui naquit Judith Cohen en 1939 à Chicago, et cofonda le programme d’art féministe à CalArts en 1971 avec Miriam Schapiro. 

On redécouvre ses débuts minimalistes, et déjà féministes des années 1960. Aux artistes masculins qui privilégiaient un minimalisme angulaire, rigide, peu coloré, Judy Chicago oppose courbes, couleurs pop, lumière chaleureuse au gré de sculptures et tableaux irradiants. Sont présents, bien sûr, des photos et vidéos représentant ses Atmosphères, performances pyrotechniques réalisées principalement dans le désert californien entre 1968 et 1974. Judy Chicago y déclenchait des fumigènes de couleurs, le corps parfois peint. Une façon, déjà, de lier féminisme et écologie, comme de marquer d’un female gaze le paysage – naturel et artistique – de l’époque. 

Judy Chicago, “Autobiography of a Year”, 1993-1994. Technique mixte sur papier, 140 dessins (© Adagp, Paris, 2024 © Victor&Simon – Joana Luz)

Le female gaze, fil conducteur de son œuvre : son Autobiography of a Year, série de dessins retraçant son état mental sur une année, hyper puissant ; son fameux The Dinner Party, installation réalisée entre 1974 et 1979, une table de forme triangulaire avec 39 couverts dressés, des assiettes en céramique au nom de 39 femmes, de Georgia O’Keefe à Sappho. Sur les assiettes : des vulves – c’est là le côté un peu daté de l’œuvre de Judy Chicago, qui s’empare de la physiologie des femmes cis pour nourrir son féminisme : vulve, poubelle débordant de serviettes hygiéniques tâchées de sang. Ou encore The Birth Project, série de broderies illustrant les différentes étapes de l’accouchement. La broderie elle-même, utilisée ici en guise de réappropriation d’une activité historiquement dévolue aux femmes, et de facto dénigrée. 

Un féminisme typique de la seconde vague des années 1970, avant que les gender studies ne viennent alimenter la réflexion de queerness. La rétrospective aurait donc gagné à recevoir une mise en perspective très contemporaine, voire une deuxième exposition centrée sur de nouvelles pratiques artistiques féministes. Herstory aurait mérité un traitement plus large, dépassant le cadre de Judy Chicago pour dire quelque chose des pratiques artistiques féministes, des années 1960 à aujourd’hui, et des tensions politiques qui les habitèrent et continuent de les habiter. 

Judy Chicago, “Birth Trinity”, du “Birth Project”, 1983. Points d’aiguille sur toile (© Adagp, Paris, 2024 © Judy Chicago/Artists Rights Society (ARS), New York, photo © Donald Woodman/ARS, New York)

Herstory n’en reste pas moins une rétrospective majeure en ce qu’elle met en lumière la pratique avant-gardiste féministe d’une artiste qui n’eut pas peur de se mettre critiques et establishment à dos en présentant des œuvres parfois jugées “kitsch”, voire “indignes” (du monde de l’Art avec un grand A). Et puis, cette pièce remplie de plumes que l’on visite de préférence pieds nus, bulle d’onirisme, délicatesse de l’œuvre que l’on veut pénétrer et que l’on devrait peut-être laissée intacte, en l’état. Et si la Feather room nous confrontait à notre propre violence ? 

Judy Chicago : Herstory, au Magasin Électrique (LUMA), Arles, jusqu’au 29 septembre.



Source link : https://www.lesinrocks.com/arts-et-scenes/lartiste-feministe-judy-chicago-a-lhonneur-au-luma-darles-623813-05-07-2024/

Author : Carole Boinet

Publish date : 2024-07-05 15:52:13

Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.

Tags :Les Inrocks

..........................%%%...*...........................................$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$--------------------.....