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“Une marge de manoeuvre étroite” : Bruxelles attend la France au tournant sur les finances publiques

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président français Emmanuel Macron échangent lors d'un sommet européen à Bruxelles le 27 juin 2024




Il ne fait aucun doute que le prochain exécutif découvrira d’emblée sur son bureau une pile de dossiers à en effrayer plus d’un. Et plus la nomination d’un Premier ministre tarde, plus la fenêtre de tir pour boucler certains d’entre eux sera étroite. Parmi les plus urgents, le budget, bien sûr, dont la date limite de dépôt au Parlement est fixée au 1er octobre. Pour cette première épreuve du feu, Bercy a préparé une proposition de texte, dont les derniers arbitrages ont été actés par Matignon, et qui prévoit un gel des dépenses. Des lettres plafonds – qui fixent un montant maximal de crédits accordés – ont été envoyées aux ministères cet été. D’après Le Monde, celui du Travail verrait ses dépenses réduites de 3 milliards d’euros, quand la Culture, le Sport et la Défense seraient épargnés. Le successeur de Gabriel Attal aura néanmoins tout le loisir d’amender cette version.Une autre échéance majeure devrait donner du fil à retordre au futur gouvernement. D’ici le 20 septembre, la France doit remettre à la Commission européenne son plan budgétaire et structurel à moyen terme. Une nouveauté consécutive à la réforme du Pacte de stabilité et de croissance – les règles budgétaires en vigueur dans l’UE -, votée en avril par les eurodéputés. Sur une période de quatre ou de sept ans, chaque Etat membre doit présenter une trajectoire de redressement de ses comptes publics, ainsi qu’une série de réformes et d’investissements pour soutenir sa croissance. Bruxelles pourra ensuite valider ou non le document et faire ses propres recommandations. L’objectif pour la France : revenir sous les 3 % de déficit public, contre 5,1 % estimé pour 2024.Une copie à compléterCela fait déjà quelques mois que le Trésor mène des négociations serrées avec la Commission européenne. Au cœur des discussions : la possibilité pour la France de s’appuyer sur les réformes et investissements déjà engagés. “L’aile dure de la Commission souhaitait que ces éléments ne soient pas pris en compte et que seules de nouvelles propositions soient intégrées au plan. Mais le Trésor a défendu sa position”, raconte un conseiller du Premier ministre sortant. Paris a obtenu gain de cause. Le plan France 2030 [NDLR : un programme d’investissement de 54 milliards d’euros dans l’industrie, la transition écologique, les nouvelles technologies] sera, par exemple, pris en considération.”Un premier document, qui valorise les réformes déjà mises en place, en expliquant leurs effets bénéfiques, est prêt. Quant à la deuxième partie, sur les réformes futures, charge au prochain gouvernement de la concocter”, poursuit le conseiller. Pour se mettre en ordre de marche, la France demandera-t-elle une extension du délai de quatre à sept ans, étant donné la situation délicate de ses finances publiques ? A Bruxelles, on a déjà la réponse. “Ce n’est plus un secret, Paris va demander sept ans”, indique une source à la Commission européenne. A ses risques et périls, comme le précise Isabelle Maquet, conseillère économique à la Représentation de la Commission européenne en France : “Les exigences en termes d’évaluation et d’impact quantifié des réformes proposées seront plus poussées en cas d’extension.”Un équilibre à trouverLa France se retrouve sur une ligne de crête. “Il y a un vrai équilibre à établir entre une augmentation limitée des dépenses et des réformes qui aillent dans la direction souhaitée. La marge de manœuvre est étroite”, juge Jérôme Creel, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques. Pour établir ce plan budgétaire, chaque Etat membre a reçu un guide extrêmement technique, fourmillant de critères, ainsi qu’une série de recommandations spécifiques à chaque pays. “La France est épinglée sur la performance de son système éducatif, tant sur la formation que sur la préparation des élèves au marché du travail et l’attractivité du métier d’enseignant”, indique Isabelle Maquet.Philippe Aghion ne peut qu’approuver. Pour l’ancien conseiller d’Emmanuel Macron, “nous devons faire une grande réforme de l’école, à l’image de ce qui a été fait au Portugal : les programmes et l’évaluation seront déterminés au niveau national, mais les établissements jouiront d’un grand degré d’autonomie dans la gestion du contrat pédagogique, en particulier dans la gestion des ressources humaines. Il faut rétablir la primauté des manuels scolaires et se recentrer sur le calcul, la lecture et l’orthographe”, soutient l’économiste. Un message déjà en partie entendu. Le budget du ministère de l’Education nationale augmenterait de 900 millions d’euros en 2025, selon le projet finalisé par les équipes du Premier ministre. Là encore, tout dépendra du bon vouloir du prochain exécutif.La Commission attend aussi des mesures en faveur de la compétitivité tricolore. “L’idée est d’améliorer l’environnement des entreprises par la réduction de la charge administrative et le renforcement de leurs dépenses de R&D”, explique Isabelle Maquet. Enfin, Bruxelles souhaite que la France accentue ses efforts dans les énergies renouvelables, où elle accuse un retard. “Il y a déjà des montants d’investissements publics qui sont conséquents, nuance souligne Charles-Henri Colombier, directeur du pôle conjoncture de l’institut Rexecode. La France n’est pas dans une situation comparable à celle de l’Allemagne, à qui la Commission ne cesse de reprocher son faible niveau d’investissement.” Néanmoins, l’étau se resserre. Placée en procédure de déficit excessif en juillet, la France est plus que jamais dans le collimateur de la Commission.



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Author : Thibault Marotte

Publish date : 2024-08-30 04:30:00

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