Parmi les seize titres qui figurent sur cette première sélection du prix Goncourt, certains ne nous surprendront pas. L’Académie a prouvé au fil des années avoir un grand faible pour le roman historique, voire à dimension politique. C’est le cas de nombreux romans de leur première liste.
Celui de Kamel Daoud, Houris (Gallimard), narre, à travers le monologue intérieur d’une femme rescapée d’un égorgement, la guerre d’indépendance en Algérie, et aussi un autre épisode sanglant, la guerre civile des années 1990 (qu’il serait interdit, en Algérie, d’évoquer). Avec Vous êtes l’amour malheureux du Führer (Grasset), Jean-Noël Orengo revient sur la Seconde Guerre mondiale et le nazisme à travers la vie de son architecte, Albert Speer. Gaël Faye aborde le génocide rwandais dans Jacaranda (Grasset), Maylis de Kerangal évoque le Havre, ville massivement détruite pendant la guerre, dans Jour de ressac (Verticales), tandis qu’Abdellah Taïa ravive la mémoire du Maroc dans Le Bastion des Larmes (Julliard). Au moins trois enquêtes nous entraînent sur les traces du passé (historique) et de la mémoire : Tout le bruit du Guéliz de Ruben Barrouk (Albin Michel), La désinvolture est une bien belle chose de Philippe Jaenada (Mialet-Barrault), et Archipels de Hélène Gaudy (L’Olivier).
De grand·es absent·es
Un peu monomaniaques, les juré·es Goncourt, cette année ? Hélas, oui. Notons quand même, parmi les très rares surprises, la présence de l’excellent Club des enfants perdus de Rebecca Lighieri (POL); ainsi que Le Dix-huitième arrondissement, Paris musée du XXIe siècle (Minuit) de Thomas Clerc, un hybride récit-essai dont on s’étonne qu’il ait même été sélectionné, l’Académie Goncourt refusant chaque année de récompenser un livre qui ne soit pas un roman.
Rappelons que Le Lambeau de Philippe Lançon (Gallimard), et l’année dernière Triste tigre de Neige Sinno (POL), n’avaient pas reçu le Goncourt pour cette raison alors qu’il et elle le méritaient amplement. En attendant la remise du prix le 4 novembre, le jury prévient déjà que de nouveaux titres pourraient être ajoutés à leur deuxième sélection, qui sera révélée le 1er octobre. Espérons qu’il s’agisse d’Alice Zeniter pour Frapper l’épopée (Flammarion) et Aurélien Bellanger avec Les Derniers jours du Parti socialiste (Seuil), injustement absent·es de cette première sélection. Bref, le suspense continue.
La première sélection du prix Goncourt 2024
Ruben Barrouk, Tout le bruit du Guéliz (Albin Michel)
Thomas Clerc, Paris Musée du XXIe siècle (Les éditions de Minuit)
Sandrine Collette, Madelaine avant l’aube (JC Lattès)
Kamel Daoud, Houris (Gallimard)
Gaël Faye, Jacaranda (Grasset)
Hélène Gaudy, Archipels (L’Olivier)
Philippe Jaenada, La désinvolture est une bien belle chose (Mialet-Barrault)
Maylis de Kerangal, Jour de ressac (Verticales)
Étienne Kern, La vie meilleure (Gallimard)
Emmanuelle Lambert, Aucun respect (Stock)
Rebecca Lighieri, Le Club des enfants perdus (P.O.L)
Carole Martinez, Dors ton sommeil de brute (Gallimard)
Thibault de Montaigu, Cœur (Albin Michel)
Olivier Norek, Les guerriers de l’hiver (Michel Lafon)
Jean-Noël Orengo, « Vous êtes l’amour malheureux du Führer » (Grasset)
Abdellah Taïa, Le Bastion des larmes (Julliard)
La deuxième liste sera dévoilée le 1er octobre, les quatre finalistes le 22 octobre. Quant à la proclamation elle se fera chez Drouant, le 4 novembre prochain.
Le Goncourt 2023 avait été décerné à Jean-Baptiste Andrea pour Veiller sur elle (éditions de L’Iconoclaste).
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Author : Nelly Kaprièlian
Publish date : 2024-09-03 13:28:22
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