C’est un procès hors normes qui s’est ouvert cette semaine à la cour criminelle du Vaucluse. Hors normes tant par le nombre d’accusés présents – 51 au total – que par la gravité des faits qui leur sont reprochés.
L’histoire est terrifiante : Dominique Pelicot, 71 ans aujourd’hui, est accusé d’avoir administré à sa femme, Gisèle Pelicot*, des anxiolytiques à son insu pendant quasiment 10 ans avant de la livrer à des dizaines d’inconnus, recrutés principalement sur des sites de rencontre, pour la violer. Près de 4 000 photos et vidéos ont été retrouvées par les enquêteur·rices.
Monsieur Tout-le-monde
De Dominique Pelicot, Caroline Darian, sa fille, fondatrice de l’association M’endors pas qui lutte contre la soumission chimique, dit, dans une vidéo publiée sur Konbini en 2022, qu’il est “un homme qui affichait en société l’image d’un bon patriarche, d’un bon mari et d’un bon papa”. À l’image certainement des 50 autres hommes qui comparaîtront à ses côtés jusqu’au 20 décembre prochain à Avignon. L’un d’entre deux est d’ailleurs arrivé en retard au premier jour du procès car il accompagnait son enfant pour la rentrée des classes.
Peut-être faut-il encore le répéter : les violeurs ne sont pas des monstres. Les violeurs sont des hommes ordinaires. Ce sont nos frères, nos pères, nos amis, nos cousins, nos grand-pères. Ils ont tous les âges, exercent tous les métiers et n’ont aucune apparence particulière. Ils sont monsieur Tout-le-monde.
En finir avec le mythe du monstre violeur
En refusant que ce procès se déroule à huis clos, Gisèle Pelicot nous donne, avec un courage incommensurable dont il faudra être à la hauteur à l’avenir, la possibilité d’ouvrir les yeux sur ce mythe du monstre violeur enraciné dans l’inconscient collectif. Il n’existe pas, il n’a jamais existé. Ce qui existe en revanche, c’est le patriarcat et la culture du viol dans lesquels les hommes puisent le sentiment tout-puissant de pouvoir disposer comme bon leur semble du corps des femmes, qui plus est quand c’est la leur.
Gisèle Pelicot l’a dit haut et fort à la barre, elle ne parle pas pour elle mais “pour toutes celles qui pourront être victimes, pour celles qui le matin se réveilleront avec des absences, des souffrances gynécologiques, elles repenseront à mon témoignage. Pour que plus aucune femme ne soit victime par soumission chimique.” Et que la honte soit dans le camp des violeurs ordinaires.
* Les enfants de Gisèle Pelicot ont fait savoir à l’Agence France Presse qu’ils souhaitaient que leur nom de famille soit publié dans la presse.
Source link : https://www.lesinrocks.com/cheek/affaire-pelicot-les-violeurs-sont-des-hommes-ordinaires-ledito-de-julia-tissier-628324-06-09-2024/
Author : Julia Tissier
Publish date : 2024-09-06 09:33:59
Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.