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“The Penguin” sur Max, n’est pas les Soprano qui veut

“The Penguin” sur Max, n’est pas les Soprano qui veut



C’est une tendance de fond depuis plusieurs années, presque devenu un genre en soi : l’anti film de super-héros (ou le film de super-vilain), reléguant l’habituel justicier au second plan (voire l’invisibilisant totalement) pour se concentrer sur ses illustres ennemi·es. Tendance entérinée par l’accueil triomphal réservé au Joker de Todd Phillips, sa pluie de nominations aux Oscars, et son Lion d’or glané au Festival de Venise en 2019.

The Penguin, série HBO dédiée au célèbre vilain de Batman, emprunte la recette de Joker : l’effacement quasi total des signes distinctifs du film de super-héros (l’absence de Batman en premier lieu) pour n’en garder qu’une portion congrue (Gotham City comme toile de fond, et quelques œillades plus ou moins subtilement adressées aux fans), et la transmutation d’un genre très codifié vers un registre plus naturaliste. Ici la fiction mafieuse à forte obédience sopranesque.

Dans la pègre de Gotham city

C’est en tout cas ce que n’a cessé de marteler la campagne promotionnelle de The Penguin, dont l’ambition, largement claironnée, est de créer une série dramatique sur la pègre de Gotham qui lorgnerait vers Les Soprano, monument télévisuel des années 2000. Ambitieuse, The Penguin l’est sans aucun doute. Impressionnante ? Assurément. Mais sopranesque ? Ça reste à voir.

On y suit donc Oswald “Oz” Cobblepot, toujours sous les traits, lourdement grimés, d’un Colin Farrell parfaitement méconnaissable. Suite aux événements survenus dans The Batman, où il occupait un petit rôle, Oz, jusque-là simple lieutenant d’un parrain de la mafia fraîchement liquidé, entend bien faire main basse sur le monde criminel de Gotham, s’en adjuger le trône, et devenir le terrible Pingouin que l’on connaît. Encore faudra-t-il ruser pour déjouer les plans des Falcone et des Maroni, les deux familles qui règnent sur la pègre.

Un vulgaire spin-off de Batman ?

La série déploie toute la panoplie du film de mafia : guerres claniques, trahisons à rebonds, taupes infiltrées, assassinats cliniques et fusillades dosées en hémoglobine. Et elle le fait plutôt très bien, maniant ses codes avec métier. Visuellement très réussie, notamment dans sa radiographie fangeuse des bas-fonds de Gotham, elle peut aussi compter sur une galerie de personnages finement écrits. Outre son Pingouin éponyme, solidement incarné par un Colin Farrell qu’on sent néanmoins dangereusement attiré par les sirènes de la performance totale (la preuve, il disparaît derrière son personnage), on retrouve Cristin Milioti (How I Met Your Mother, Fargo) dans la peau de Sofia Falcone, fille de feu Carmine Falcone, bien décidée à régner sur son clan en cheffe de guerre inflexible, et dont la soif de vengeance avoisine la folie ; mais aussi Victor Aguilar (Rhenzy Feliz), ado hispano-américain issu des quartiers défavorisés de Gotham, pris sous l’aile du Pingouin qui deviendra pour lui une sorte de mentor autant respecté que craint.

Mais à l’inverse des Soprano, qui maniait subtilement l’art de l’ironie, scrutant avec ce mélange de surplomb et d’affection le quotidien d’une poignée de ploucs du New Jersey aussi attendrissants que capables du pire, The Penguin manque cruellement d’humour, et se rive à un premier degré un peu lourdingue. Un sérieux papal pour créditer le sérieux du projet, et le vœu pieux qui le conditionne  : créer une vraie série sur la mafia, et un pas un vulgaire spin-off de Batman.

Sous les postiches…

Finalement The Penguin est un peu à l’image de son acteur principal, une série qui cherche désespérément à se grimer en une autre, mais dont l’abus de postiches finit par trahir l’artificialité du procédé. Si elle demeure plaisante à regarder, et fort bien ouvragée, elle reste à des années-lumière du modèle qu’elle s’est elle-même imposée sans réellement en comprendre l’essence, et s’oublie tristement une fois ses 8 épisodes fleuves (plusieurs dépassent l’heure) engloutis.

The Penguin, à partir du 20 septembre sur Max.



Source link : https://www.lesinrocks.com/series/the-penguin-sur-max-nest-pas-les-soprano-qui-veut-629772-20-09-2024/

Author : Léo Moser

Publish date : 2024-09-20 08:54:24

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