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“Vivre, mourir, renaître” : un mélo vibrant où la fougue l’emporte sur le tragique

“Vivre, mourir, renaître” : un mélo vibrant où la fougue l’emporte sur le tragique



Vivre, mourir, renaître. La plupart des personnages qui constellent la filmographie de Gaël Morel traversent de leur vivant ces trois étapes, ils survivent au pire, âmes abîmées par le chagrin (une mère par la mort d’un fils dans Après lui, 2007), à la recherche de ce qui pourrait les réparer (le soleil du Maroc pour Sandrine Bonnaire dans Prendre le large, 2017 ; la fuite pour les amants criminels de Notre paradis, 2011).
Le paradis, justement, n’est paradoxalement jamais bien loin de Vivre, mourir, renaître, qui s’ouvre sur une rave planquée quelque part dans un hangar, la nuit, en bordure de Paris, à l’aube des années 1990.
L’air y est d’un bleu électrique aussi intense que l’alchimie qui circule entre Emma (Lou Lampros) et Sammy (Théo Christine). Leur rapport au monde, elle et lui le vivent sensuellement, érotiquement, car tout dans Vivre, mourir, renaître semble être bâti pour accueillir la grâce de leurs silhouettes, de leur fougue adolescente intacte, et observer leur beauté inépuisable, leur jeunesse éternelle. Une autre image capturée quelques minutes plus tard, cette fois-ci dans un club de la ville, matérialise une idée voisine de cette notion d’éternité : c’est le petit matin, seul·es quelques noctambules encore ivres errent dans la boîte déserte. Au sol, un garçon à moitié endormi est recouvert d’une mousse savonneuse dont les reflets miroitent, sous la lumière du jour, comme de petits diamants. L’écume fait office de cocon vaporeux mais également de linceul, figé comme un piège de cristal.
L’histoire d’Emma, Sammy mais aussi Cyril (Victor Belmondo), jeune photographe en vogue dont le studio se situe dans le même immeuble que le couple, est celle d’un trio amoureux que le cinéma sait si bien regarder, et c’est un peu de l’ombre funeste des Chansons d’amour de Christophe Honoré (collaborateur de Gaël Morel notamment sur Après lui, 2007), qui plane au-dessus de leurs têtes.
Beaux phénix
Emma et Sammy s’aiment, ont un enfant, s’installent ensemble. Quand Sammy rencontre Cyril, le coup de foudre est immédiat. Ensemble, ils forment les deux facettes d’une identité homosexuelle : exposée en pleine lumière pour Cyril, dont la séropositivité nourrit l’inspiration de ses photographies qui enregistrent, peut-être, ses derniers regards et s’annoncent un peu comme ses propres sépultures, et planquée pour Sammy, tel un vampire dans l’ombre du métro parisien où il officie en tant que conducteur. La révélation de leur adultère est quasi instantanée. S’engage alors une vie à quatre, une vie de famille agrandie, houleuse un temps, épanouie ensuite.
Et c’est toute la force tragique du film que d’opposer à ce sublime élan vital qui l’agite de part en part l’injustice et l’absurdité de la maladie, le sida. Son sens aigu du romanesque, cette densité de chaque instant donnée aux sentiments et à leurs infimes manifestations, cet apprivoisement progressif de chaque personnage qui se découvre à mesure que nous les rencontrons lui confèrent une puissance émotionnelle déchirante. Comme si Vivre, mourir, renaître avait la même impérieuse nécessité d’exister que celle de ses beaux phénix
Vivre, mourir, renaître de Gaël Morel, avec Lou Lampros, Théo Christine, Victor Belmondo (Fr., 2024, 1 h 49). En salle le 25 septembre. 



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Author : Marilou Duponchel

Publish date : 2024-09-23 07:00:00

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