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“After” d’Anthony Lapia, un beau premier film sur la teuf parisienne

“After” d’Anthony Lapia, un beau premier film sur la teuf parisienne



Si la fête est évidemment un sujet à la mode depuis quelques années dans le cinéma français, il n’est pas dit qu’elle ait déjà été à ce point assumée comme seule et unique matière d’un film, à l’épure, sans s’encombrer du moindre ornement de récit, ou presque.

Cherchant comme à épouser le clubbing sauvage des années 2020, se confondre avec lui, et disparaître dans le même petit matin aveuglant, After démarre des profondeurs du monde, dans un parking souterrain désert. La caméra nous accompagne dans ce vide, par de longs plans silencieux des lieux, comme si l’univers n’était plus qu’un espace liminal dépeuplé, si ce n’est la soirée techno dont nous nous rapprochons, tenant lieu de trésor au fond de la grotte.

Anthony Lapia développe une ethnographie du milieu

Une fois introduit, le film s’accroche d’abord aux visages en très gros plan, scrutant les effets de la transe de la musique et des drogues ; quelques personnages naissent dans le vacarme et la foule, des couples, un groupe d’amies, un drôle de type venu seul ; une chillzone vient rapidement les préciser, Anthony Lapia recueillant alors des bribes de conversations, développant une ethnographie du milieu, sans maquiller le glauque, les échanges irrationnels, les comateux·ses zombifié·es par les excès, mais en s’attachant surtout à la tendresse : les légers débordements de douceur dus à la MD, impeccablement captés, loin d’un certain cliché parodique tout en câlins grossiers, plutôt comme une sorte de cajolerie indicible planant dans l’air, intensifiant légèrement les sourires, saupoudrant des marques de soin (“Tu passes une bonne soirée ?”) dans les dialogues.

L’after qui donne son titre au film est celui que partagent Félicie (Louise Chevillotte), avocate, et Saïd (Majd Mastoura), chauffeur VTC. Le film est alors attendu sur le terrain d’une expérience de stratification sociale, où un couple formé dans l’espace anonyme et égalitaire du club serait confronté à des différences de classe plus difficiles à surmonter dans la conversation.

Sans repère temporel

L’idée n’est pas mauvaise mais quelque peu plaquée, et surtout noyée dans un salmigondis de considérations sur le néolibéralisme et la soumission des masses, qui manque d’annihiler ses personnages en les réduisant au rôle de véhicules de leur propre méditation, qui semble surtout celle du cinéaste, et s’avère bien verbeuse.

Fort heureusement, on s’adapte à cette donne – au fond une avocate teuffeuse qui monologue des élucubrations politiques, ça n’a rien d’irréaliste –, tandis que le film continue de ménager des allées et venues sur la fête qui se poursuit, sans repère temporel. Sa réussite vient alors beaucoup de tout ce que ses surprises de montage parallèles créent de diffraction du temps : la brisure du rythme du jour et de la nuit, des notions de début et de fin, ménageant peu à peu cette impression très juste que la fête ne répond pas à un principe d’intensification allant vers un apex, mais est plutôt comme un organisme qui respire, s’endort, se réveille, se rendort, suspendu dans un temps engourdi, ou comme une boucle, qui semble infinie mais tend irrémédiablement à une forme d’autodestruction.

After d’Anthony Lapia, avec Louise Chevillotte, Majd Mastoura, Natalia Wiszniewska. En salle le 25 septembre.



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Author : Théo Ribeton

Publish date : 2024-09-24 15:04:09

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