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Au centre Pompidou, Apichatpong Weerasethakul nous immerge dans sa nuit magique

Au centre Pompidou, Apichatpong Weerasethakul nous immerge dans sa nuit magique



Largement courtisée par l’industrie du jeu video et celui de l’art contemporain, la technologie VR, consistant à simuler une expérience sensorielle par l’entremise d’un casque générant un environnement numérique artificiel, peine depuis son apparition à trouver son prolongement dans le champ cinématographique. Si la Mostra de Venise s’est dotée depuis 2017 d’une section compétitive, Venice Immersive, présentant des films en VR, peu de réalisateur·rices déjà reconnu·es dans le champ du cinéma (Darren Aronofsky, Alfonso Cuarón, Gaspar Noé…) ont investi ce territoire souvent dévolu aux visites muséales (la Chapelle Sixtine comme si vous étiez).

Avec Conversations With the Sun, performance en VR donnée en ce moment au centre Beaubourg, Apichatpong Weerasethakul s’est emparé du média le temps d’une œuvre absolument prodigieuse. L’immersion dans un environnement entièrement virtuel n’y est pas immédiate. On s’y glisse par paliers. Le premier temps de la performance tient de l’installation. Le·la visiteur·se pénètre dans une longue pièce sombre où trône en son centre un immense écran biface, projetant des images différentes sur chacune de ses parois. Différents protagonistes de son cinéma (la tante Jen d’Oncle Boonmee, Sakda de Tropical Malady…) y apparaissent en situation de sommeil ou de rêverie. On tourne pendant une vingtaine de minutes autour de ce mur d’images. Les spectateur·rices errant·es sont comme l’émanation de la vie onirique des personnages sur l’écran.

Dans une grotte magique

Lorsque, soudain, une escouade de jeunes gens missionnés par le musée nous rejoint et dépose au pied de l’écran des casques de VR. Après avoir soigneusement vérifié leur état de marche dans une chorégraphie quasi burlesque, le personnel les ajuste avec précision sur la tête des visiteur·ses. Dès lors, les autres humain·es dans la pièce n’apparaissent plus que sous la forme de petites balles de ping-pong blanches phosphorescentes, telles des âmes migrantes qu’il convient d’esquiver pour ne pas entrer en collision. Peu à peu, un paysage se compose. Lentement, des roches poussent du sol, un immense soleil prend place au centre de la pièce, un totem simiesque démesuré apparait dans un angle. On arpente une grotte magique, où, détail sublime, de petits insectes vibrants papillonnent autour de soi. Et soudain, le sol se dérobe, on flotte en apesanteur, et des astres solaires déploient leur orbe autour de nous.

Le cinéma d’Apichatpong Weerasethakul a toujours su, à l’intérieur du format centenaire du long métrage de cinéma, produire des effets de sidération et d’émerveillement propres au cinéma forain des origines. C’est peu dire qu’en investissant le champ en friches de la VR, le réalisateur nous conduit avec une grâce illusionniste peu commune vers une nouvelle aube de la vie des images.

A Conversation with the Sun, au centre Pompidou, Paris, jusqu’au 14 octobre (plusieurs horaires disponibles, réservation obligatoire)



Source link : https://www.lesinrocks.com/cinema/au-centre-pompidou-apichatpong-weerasethakul-nous-immerge-dans-sa-nuit-magique-631367-09-10-2024/

Author : Jean-Marc Lalanne

Publish date : 2024-10-09 12:34:18

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