Des nouvelles du front synthpop. L’année dernière, un ami très informé musicalement attire mon attention sur Ray Moore. “Ray Moore ?” Non, non : Reymour, un duo suisse, établi à Bruxelles, affublé d’un nom qui pourrait être celui d’une ville en Wallonie. Un album intitulé Leviosa est sorti en 2021 sur le label hollandais Knekelhuis, et je me passe beaucoup le morceau De ma tour : “De mon toit, J’regrette un peu les jours pluvieux, et les adieux.”
Une chanson mystérieuse : il fait beau, puisqu’on regrette les jours pluvieux, mais on cherche la mélancolie dans une flaque d’eau. L’ambiance est minimal wave, années 1980, avec le spleen d’un disque des Beach Boys imaginé par Taxi Girl. Elli et Jacno, mais moins dansant.
Des jeunes gens touchés par la grâce
En 2018, un premier EP était sorti : Enigme. Des boîtes à rythmes et des synthés, quelques échos dub, un tempo exténué qui s’emballe à la fin, des atmosphères qui nous cajolent. Les moyens du bord. Il fait froid, mais il fait chaud. Lou Savary chante d’une voix cristalline et rassurante, nous enveloppe. Elle est parfois rejointe par Luc Bersier, qui fait tout ce qu’il peut pour ne rien laisser transparaître et rester factuel. À nous de décider si c’est de la joie ou de la tristesse. De l’ennui ou de l’excitation.
Comme tout ce qui semble minimaliste, romantique, confectionné avec ce que l’on s’imagine être du matos de récup, on a l’impression qu’on peut faire pareil. Essayez et vous vous casserez les dents. Ces jeunes gens sont touchés par la grâce.
Un deuxième album plus pop
NoLand, le deuxième album de Reymour, est sorti il y a quelques semaines. Il est un peu plus étoffé, plus pop. On pense parfois à Beach House époque Depression Cherry (2015). On a parfois envie de bouger. Les lignes de basse pourraient durer des heures, on ne s’en lasserait pas. Lou chante beaucoup en anglais, en français, elle chante l’odeur du tabac froid, la synesthésie, la banalité de ces petites choses qui nous relient à l’autre, aux autres, avec un désintérêt spectaculaire pour le spectaculaire.
On a l’impression d’avoir entendu 1 000 fois Reymour dans d’autres disques, 1 000 fois ces mêmes mots, 1 000 fois la même recette, et pourtant, c’est comme si Reymour avait tout inventé. Il existe deux types d’auditeur·rice : celui ou celle qui se raccroche inlassablement à ce qui lui est familier et celui ou celle qui est en perpétuelle quête de renouveau formel. L’idéal du second peut parfois sembler un peu vain quand le seul truc qui nous manque vraiment, c’est le souvenir d’une odeur de clope au lever du soleil.
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Author : François Moreau
Publish date : 2024-10-11 11:32:31
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