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YouTube a un nouvel algorithme pour les 13-17 ans : pourquoi c’est une excellente nouvelle

Le géant américain YouTube, propriété de Google, a assoupli ses règles limitant l'utilisation de grossièretés dans ses vidéos en français et en anglais




Les réseaux sociaux sont-ils nocifs pour la santé mentale ? Si YouTube ne répondra probablement pas “oui” à cette question, la plateforme a en tout cas ajusté son algorithme de recommandation pour les adolescents de 13 à 17 ans après avoir été alertée par son comité consultatif d’experts en santé, ainsi que de nombreux chercheurs depuis plus de trois ans. YouTube a donc décidé de limiter l’exposition à des contenus potentiellement délétères, tels que ceux valorisant des idéaux corporels irréalistes ou montrant des scènes de violence, d’agression ou d’intimidation. Cette mesure de prévention, mise en place en septembre au Royaume-Uni puis progressivement étendue au reste du monde, est une bonne nouvelle car elle devrait réduire le risque d’effet spiral de l’algorithme chez les jeunes.Pour saisir l’importance de cette décision, il est essentiel de comprendre le fonctionnement de l’algorithme de YouTube. Celui-ci s’appuie sur cinq indicateurs pour recommander des vidéos aux utilisateurs. Le premier est l’historique des recherches et des vidéos visionnées. Le deuxième se fonde sur la pertinence du contenu vidéo par rapport aux mots-clés utilisés dans la recherche, incluant le titre, les tags, les descriptions et le contenu lui-même. Le troisième repose sur l’engagement des utilisateurs avec les vidéos précédentes, comme la durée de visionnage et le nombre de “j’aime”. Le quatrième concerne les signaux indiquant la qualité d’une chaîne pour évaluer son expertise et sa fiabilité sur un sujet donné. Le dernier englobe des facteurs tels que la zone géographique, la saisonnalité et la temporalité.L’algorithme propose ainsi des recommandations personnalisées basées sur les intérêts et l’historique de chaque utilisateur. De plus, ces suggestions sont ajustées en fonction de la performance et de la qualité des vidéos. Cette méthode vise à maximiser la rétention de l’attention des utilisateurs tout en collectant des données personnelles à des fins publicitaires, conformément aux principes de la captologie [NDLR : l’étude des technologies numériques comme outil d’influence et de persuasion des individus].L’algorithme, un accélérateur de difficultés chez les ados vulnérablesMais comment le fonctionnement de l’algorithme de YouTube peut-il provoquer des problèmes de santé mentale ? Le nœud du problème réside dans le fait que cet outil est conçu pour trier des millions de vidéos et proposer les contenus jugés les plus utiles et pertinents pour l’utilisateur. Néanmoins, la manière dont cette technologie est perçue, interprétée et utilisée peut entraîner des externalités à la fois positives et négatives.Des chercheurs britanniques proposent d’analyser ce paradoxe en expliquant l’impact du design des applications (et logiciels numériques), non plus à travers ce que ce design est supposé faire, mais à travers la manière dont il est perçu, interprété et utilisé par les utilisateurs. Par exemple, l’algorithme est programmé pour adapter les contenus en fonction de l’identité, des préférences et des attentes de l’utilisateur, faisant de cette personnalisation une des fonctionnalités clés du site. L’utilisation qui en découle est de permettre de consulter des contenus très pertinents pour les adolescents, ce qui va participer au développement du concept de soi, c’est-à-dire la croyance que l’on a de ses qualités et de ses traits.Mais ce fonctionnement peut aussi venir exploiter des vulnérabilités autour de l’estime ou de l’image de soi. Ce qui peut amener les individus à avoir accès à des contenus qui entrent en résonance avec des difficultés préexistantes. Par exemple, il suffit qu’un adolescent vulnérable passe un peu trop de temps sur un contenu en lien avec ses fragilités pour se voir proposer une multitude de vidéos similaires. On parle alors d’un effet spiral négatif.Le problème est que l’adolescence est une période charnière du développement où il se produit beaucoup de changement au niveau comportemental, cognitif et neurobiologique. Les adolescents sont en plein développement du concept de soi, ils sont aussi plus sensibles à ce que pensent leurs pairs et en particulier aux jugements négatifs de ces derniers. Ils ont peur d’être rejetés par les autres et sont plus sensibles au stress. Autant de spécificités développementales qui les rendent plus fragiles du point de vue de leur santé mentale.Quand les médias sociaux amplifient l’exposition à des idéaux corporelsDans ce contexte, l’algorithme de recommandation de YouTube et plus spécifiquement la manière dont ce dernier est perçu, interprété et utilisé, peut interagir avec les changements développementaux des adolescents et amplifier leur vulnérabilité en matière de santé mentale.Des chercheurs américains avancent par exemple que les réseaux sociaux pourraient interférer avec une période sensible d’apprentissage social et de formation des amitiés, créant une “tempête parfaite” exacerbant les préoccupations des filles concernant leur image corporelle et conduisant à des problèmes de santé mentale. En d’autres termes, des jeunes filles avec des préoccupations corporelles fortes peuvent, en raison du fonctionnement de l’algorithme, être soumises à une prolifération d’images ou de vidéos faisant la promotion du “corps idéal”, ce qui pourrait influencer la perception de leur propre corps.La promotion des idéaux corporels n’est pas un phénomène récent. Elle existait déjà bien avant Internet, dans les magazines féminins et à la télévision. Toutefois, le problème des algorithmes de recommandations personnalisées comme celui de YouTube est qu’ils intensifient l’exposition à des standards corporels irréalistes et peuvent rapidement enfermer les utilisateurs dans un effet spiral. Cela entraîne une augmentation des situations où les jeunes femmes se comparent aux images qu’elles voient sur ces plateformes.En se comparant de cette manière, les jeunes femmes encourent plus de risques pour leur santé mentale comme la dépression, les émotions négatives et l’insatisfaction corporelle, c’est-à-dire des pensées et des sentiments négatifs sur son apparence physique réelle. Actuellement, les chercheurs émettent l’hypothèse qu’une utilisation intensive des réseaux sociaux hautement visuels pourrait être un facteur de risque majeur pour l’insatisfaction corporelle et contribuer au développement de troubles du comportement alimentaire. Toutefois, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour clarifier ces liens.Les failles des nouvelles mesures de l’algorithme de YouTubeLes nouvelles mesures mises en place par YouTube pour protéger les jeunes semblent donc constituer une excellente avancée. Cependant, il est regrettable que cet ajustement de l’algorithme ne concerne que les adolescents de 13 à 17 ans disposant d’un compte sur la plateforme. Cette protection devrait être étendue à l’ensemble des utilisateurs de YouTube, afin de contourner au moins deux obstacles : d’une part, les contenus ne seront pas filtrés pour les jeunes ayant menti sur leur âge, d’autre part, un effet spiral négatif restera possible avec les jeunes non identifiés. Par ailleurs, les adultes – hommes ou femmes – peuvent également être vulnérables face à l’effet spiral de contenus sur le corps idéal, notamment ceux qui se préoccupent de leur poids et qui présentent aussi des fragilités psychologiques. Ces derniers ne bénéficieront pas de la protection mise en place par la plateforme YouTube.Enfin, une question se pose : comment identifier précisément des recommandations problématiques ? Si les contenus pro-anorexie sont facilement repérables, il est plus difficile de distinguer des recommandations sur une routine sportive saine des recommandations valorisant excessivement la perte de poids par le sport. Cet ajustement de l’algorithme de recommandations reste néanmoins un grand progrès pour la santé mentale des adolescents. Les autres plateformes de réseaux sociaux hautement visuels comme Instagram ou TikTok devraient largement s’inspirer de ces dispositions. Car il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour que les réseaux sociaux deviennent des espaces sûrs pour nos ados.



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Publish date : 2024-10-24 06:00:00

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