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Loi martiale en Corée du Sud : le coup de trop d’un président au style “bulldozer”

Des gens se rassemblent devant l'Assemblée nationale à Séoul, en Corée du Sud, le 4 décembre 2024, après que le président Yoon Suk Yeol a déclaré la loi martiale




Il y a des manières plus soft de se suicider politiquement. Le président conservateur sud-coréen, Yoon Suk-yeol l’a fait de façon pour le moins spectaculaire. Sa tentative de coup de force, en déclarant la loi martiale ce mardi 3 décembre, a été balayée par l’Assemblée nationale, quelques heures plus tard. Les députés, y compris de son camp, ont rejeté sa décision, témoignant au passage de la solidité de la démocratie sud-coréenne et du rejet de toute idée d’un retour aux dictatures en place jusqu’en 1987. Les manifestations organisées dans la foulée et le projet de destitution déposé à l’Assemblée nationale pourraient bien avoir raison d’un président élu en 2022 mais qui n’a jamais pleinement convaincu.Depuis son arrivée au pouvoir, l’ancien procureur peine à imposer ses vues. La faute à une Assemblée dominée par l’opposition démocrate mais aussi à son style “bulldozer”. Le bras de fer avec les parlementaires, durci après la défaite de son parti, le PPP (Parti du Pouvoir Populaire) aux législatives d’avril, n’a fait que renforcer l’antagonisme, le président n’hésitant pas à qualifier les voix critiques de “forces pro-nord-coréennes et antiétatique”. C’est d’ailleurs cet argument qu’il a utilisé pour justifier sa loi martiale.Accusations de trafic de sondagesLes tensions se sont aussi nourries des multiples scandales impliquant aussi bien lui que son épouse, Kim Keon-hee. Cette dernière a dû s’expliquer en juin devant les procureurs sur le don d’un sac Dior par un pasteur et sur une affaire de manipulation boursière.Depuis près de deux mois, le couple présidentiel fait également face à des accusations de trafic de sondages. Aujourd’hui en détention, le sulfureux Myung Tae-kyung distille dans la presse des messages échangés avec le dirigeant et son épouse, dont il était autrefois proche. Cet intrigant aurait trafiqué des enquêtes d’opinions pour permettre la victoire de Yoon Suk-yeol à la primaire du PPP pour la présidentielle de 2022. Le chef d’Etat a balayé l’ensemble des critiques et accusations, les qualifiant de “fake news”.Ces tensions se sont accompagnées d’une dérive autoritaire. En mars, l’institut Varieties of Democracy (V-dem) de l’université suédoise de Göteborg déplorait “une régression de la démocratie” en Corée du Sud, en raison notamment de multiples actions en justice intentées contre les opposants. La Corée du Sud a plongé de la 47e à la 62e place dans le classement 2024 de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse.Le durcissement de l’administration s’est aussi traduit par des nominations controversées, comme celle, en septembre, de Kim Yong-hyun, un général à la retraite, au poste de ministre de la Défense. L’opposition démocrate y a vu une volonté de l’administration Yoon de renforcer sa mainmise sur l’armée, voire de préparer la mise en place d’une loi martiale. Un sentiment conforté par le placement, aux postes clefs de l’armée, de proches du président.Lâché par son camp ?Ce contexte a provoqué des protestations dans l’opposition. Le 30 novembre, un rassemblement massif au cœur de Séoul a appelé à la démission de Yoon. Les manifestants brandissaient des bougies, comme un rappel de la “révolution des chandelles” à l’origine de la destitution, en 2016, de la présidente conservatrice, Park Geun-hye (2013-2016).L’imbroglio de la loi martiale donne un nouvel élan aux critiques de Yoon, dont les principaux collaborateurs, à commencer par son chef de cabinet, Chung Jin-suk, et son conseiller à la sécurité nationale, Shin Won-sik, ont présenté leur démission après l’échec de l’initiative présidentielle. La puissante Confédération coréenne des syndicats (KCTU) a entamé une grève illimitée “en soutien au peuple dans son combat pour la démission immédiate du président”. A l’Assemblée nationale, une motion de destitution a été déposée. Pour être adoptée, il faut que les deux tiers des députés, soit 200, l’adoptent. L’opposition ne dispose que de 175 sièges mais pourrait bénéficier de l’appui du PPP, dont le président, Han Dong-hoon, a déclaré que le président avait eu “tort” de déclarer la loi martiale.



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Publish date : 2024-12-04 08:45:00

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Tags :L’Express

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