Clap de fin pour 2024. On oublie tout et on mise sur le meilleur pour 2025, avec des vœux. Cet effacement symbolique de l’année précédente est même nécessaire pour poursuivre sa route sans s’appesantir sur son passé. Mais certains, tellement convaincus de la nécessité de ne s’encombrer de personne ou de ne pas s’embourber dans des souvenirs, rompent les amarres en un instant, et s’éclipsent. Plus jamais ils ne donnent signe de vie : ils “ghostent”, mettant ainsi fin brutalement à cette relation, et en laissant l’autre s’époumoner numériquement à envoyer des messages, jusqu’à ce qu’il comprenne enfin qu’il n’aura plus de nouvelle. Douloureux en amour, ce comportement s’est désormais “infiltré dans les interactions professionnelles, créant de véritables défis organisationnels”, souligne Laurent Tylski, directeur général du cabinet Acteo Consulting. “Le phénomène s’est accéléré depuis juin dernier”, précise-t-il.Cette nouvelle “tendance” dépasse les frontières françaises. Selon le dernier rapport de la plateforme américaine de recrutement Greenhouse publié le 10 décembre 2024, 61 % des demandeurs d’emploi n’ont plus jamais de nouvelle d’un employeur après un entretien, en hausse de 9 points par rapport à avril de la même année. Toutefois, pour Laurent Tylski, ne pas répondre aux candidatures n’est pas forcément une façon de “fantômiser” le postulant car il n’y a pas de relation suivie. Cela n’en demeure pas moins regrettable de la part du recruteur, en raison du manque de considération envers les intéressés.Il existe en revanche d’autres situations qui constituent des cas de “ghosting” particulièrement problématiques. Dans le contexte B2B [NDLR : business to business] par exemple : cela se traduit par des clients qui cessent brutalement toute communication et qui ne répondent plus aux textos ou aux e-mails après avoir sollicité une offre ou un devis. Laurent Tylski les appelle les “clients Houdini”, du nom du célèbre illusionniste qui disparaissait à volonté. Leur attitude est d’autant plus déroutante que ce sont des personnes que l’on tutoie et avec lesquelles on a déjà travaillé. Pour le “ghosté”, c’est-à-dire la personne qui subit cette mise à l’écart, cette rupture soudaine est déstabilisante. Elle peut être mal vécue et conduire parfois à se remettre en cause. “Cette tendance à l’évitement n’est pas sans conséquences : elle plonge les fournisseurs dans une incertitude paralysante”, ajoute le DG du cabinet Acteo Consulting. Un chef d’entreprise peut ainsi en subir les répercussions financières quand un contrat est en jeu. De même, pour le DRH ou le manager qui attend un candidat qui ne se présente pas – 57 % des personnes déclarent avoir déjà “ghosté” un recruteur – “cela représente une véritable perte de temps, d’argent et d’énergie, qui auraient pu être consacrés à d’autres postulants”, indique ainsi une étude Indeed-OpinionWay publiée en janvier 2024.Maintenir un lien personnelL’ère du tout numérique n’arrange rien. “Les outils digitaux déshumanisent souvent les échanges, facilitant ainsi le retrait discret et la coupure des communications”, analyse Laurent Tylski. Mais ce n’est pas la seule raison pouvant expliquer ce comportement de désertion : l’accumulation d’e-mails et de relances peut pousser à opter pour la solution la plus simple : l’ignorance. Une économie instable, un manque de moyens incitent aussi à une forme de lâcheté calculée, car ce non-choix donne la possibilité de reprendre contact si besoin.Afin de contourner le “ghosting” qui pourrait être la tendance 2025 dans le milieu professionnel, Laurent Tylski met sur la table quelques pistes : établir des règles de communication pendant les négociations afin de réduire les risques de silence prolongé. L’expert suggère ensuite de diversifier les canaux de communication – réseaux sociaux, courriers physiques, appels téléphoniques – en vue de relancer un dialogue bloqué. Passer par un tiers ou recontacter la personne sous un autre prétexte peut également s’avérer utile. Par ailleurs, comprendre les contraintes propres à chaque secteur – surtout si le budget n’est pas bouclé, que l’entreprise se réorganise ou encore que le donneur d’ordres est débordé – aide à prévoir les périodes de silence et à accompagner les processus sans pression. Enfin, “le maintien d’une relation humaine par des rencontres périodiques et un lien personnel renforcent la confiance et limitent les comportements d’évitement”, conclut Laurent Tylski.
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Author : Claire Padych
Publish date : 2024-12-31 10:45:00
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