L’année 2025 s’annonce comme le tournant historique de la démographie française. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, le nombre de naissances risque d’être inférieur au nombre de décès. En 2024, le solde naturel de notre pays est ressorti à peine positif, à 17 000 personnes. Les naissances ne cessent de reculer, passant de 850 000 par an environ au milieu des années 1970 à moins de 660 000 aujourd’hui. Les décès, eux, augmentent fortement depuis 2005 où on en comptait autour de 520 000, contre près de 650 000 aujourd’hui, pour une raison mécanique : le vieillissement de la population. La génération du baby-boom approche des 80 ans, âge déjà dépassé par 6,7 millions de personnes.Cette tendance n’est pas propre à la France. C’est le monde dans son ensemble qui subit un grand vieillissement, ce qui devrait rassurer nos écologistes décroissants qui voient dans tout être humain un pollueur en puissance. Leur triste rêve est en passe d’être exaucé : nous faisons de moins en moins d’enfants et nous mourrons de plus en plus. Formidable ! Mais on voit mal l’intérêt de lutter contre le réchauffement climatique si l’humain déserte notre planète. C’est même franchement démotivant.Aucune politique ne parvient à inverser la tendanceAutre motif qui devrait réjouir les décroissants : aucun pays n’a trouvé la martingale pour augmenter la natalité. Baisser les impôts des familles nombreuses, ouvrir des crèches, construire des logements sont censés “permettre” aux adultes d’enfanter. Cela ne signifie en rien qu’ils le font. Julien Damon (Les batailles de la natalité, Editions de l’aube, 2024) propose avec humour de faciliter l’accès aux applications de rencontre en se fondant sur un argument imparable : de plus en plus, ce sont les couples recomposés qui font des enfants, une façon de célébrer un nouvel amour après une précédente union. L’argument est stimulant mais Damon lui-même n’est pas dupe : faire de Tinder un service public gratuit ne suffira pas à inverser le déclin démographique français. Prenons donc acte du fait qu’aucune politique n’a jamais réussi à contrecarrer cette tendance et réfléchissons aux adaptations nécessaires pour que nos entreprises restent dynamiques et notre Etat-providence soutenable.Concernant nos finances sociales, puissent ces données de l’Insee faire comprendre aux syndicats de salariés, à la gauche et au Rassemblement national que toute tentative de faire reculer l’âge moyen de départ à la retraite serait un crime contre l’intérêt du pays. On peut toujours rêver, mais la réalité est crue. Malgré la réforme de 2023, le régime de base est déjà en déficit. François Bayrou a eu raison de souligner que le déficit “réel” du régime était beaucoup plus important que les chiffres annoncés, dans la mesure où l’Etat mobilise chaque année des milliards d’euros pour soutenir à bout de bras la répartition, sous forme de surcotisations ou de subventions. La vérité, c’est que la démographie nous oblige à introduire le plus vite possible une dose de capitalisation, afin de faire en sorte que le régime des retraites de notre pays ne repose plus uniquement sur la démographie mais aussi sur le rendement des marchés financiers.L’avènement des humanoïdesDu côté des entreprises, la problématique démographique est double. Elle est d’abord managériale. En 1975, l’âge médian en France était de 32 ans et demi. Il est aujourd’hui de 42 ans. C’est un changement d’univers. Les entreprises qui sont réticentes à l’idée de recruter des personnes âgées de plus de 50 ans vivent paradoxalement dans le passé. La firme du futur est celle qui fera cohabiter dans ses équipes des salariés de 25 ans et de 65 ans. Magnifique défi humain, qui disqualifie les dirigeants accrochés à l’idée que les seules personnes valables au travail ont moins de 45 ans.La deuxième problématique est technologique. 2025 sera l’année de la montée en puissance commerciale des humanoïdes, produits de l’hybridation de l’intelligence artificielle et de la robotique. Dans les pays qui refusent l’immigration, les secteurs qui peinent à recruter seront obligés d’investir dans ces nouvelles machines. Jeunes, vieux et humanoïdes vont devoir apprendre à travailler ensemble.Nicolas Bouzou, économiste et essayiste, est directeur du cabinet de conseil Astères
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Author : Nicolas Bouzou
Publish date : 2025-01-23 04:45:00
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