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80 ans de la libération des camps : quatre ouvrages à lire sur la Shoah

Le camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, le 5 décem be 2019 à Oswiecim, en Pologne




En ce 80e anniversaire de la libération des camps par les Alliés, du 27 janvier (Auschwitz) à début mai 1945 (Gusen II), de nombreuses publications ravivent la mémoire de la Shoah. En voici quelques-unes, aussi passionnantes que tragiques. A commencer par Les Filles de Birkenau (Les Arènes), du cinéaste David Teboul, l’auteur, avec Simone Veil, du passionnant récit L’Aube à Birkenau (2019), Pour un documentaire, diffusé en mai 2024, il avait réuni lors de deux déjeuners quatre rescapées, quasi-centenaires, d’Auschwitz-Birkenau, Isabelle Choko (décédée depuis lors), Judith Elkan-Hervé, Esther Sénot et Ginette Kolinka, bien connue des lecteurs pour ses déclarations percutantes (Retour à Birkenau et Une vie heureuse). Teboul nous livre aujourd’hui la version écrite de ces témoignages à vif. Pour s’être tues durant longtemps, les survivantes du génocide ont à cœur de parler, aussi s’interrompent-elles souvent, avec véhémence parfois. Avant de s’accorder sur le principal.Chaque cas est unique. Judith est née dans une famille bourgeoise de Transylvanie, Isabelle est fille de pharmaciens polonais, Esther, fille de cordonnier polonais installé à Belleville, Ginette, seule native de Paris, est également de condition modeste. La mémoire tangue parfois, mais toutes se souviennent avoir vécu l’enfer (la faim, le froid, la soif, l’odeur des fours crématoires, les coups, la dysenterie, la peur, la déshumanité…) du camp de la mort – Isabelle et Judith avec leur mère. Découpé en chapitres, Enfances, L’arrestation, L’arrivée à Birkenau, Survivre, etc., l’ouvrage révèle l’étonnante fraîcheur d’esprit de ces survivantes.Sauvé par miraclePendu à Auschwitz, c’est sous ce titre choc que Sim Kessel (après avoir longtemps “lutté contre l’obsession du souvenir”) relatait en 1970 chez Solar son incroyable calvaire, réédité ces jours-ci par les Editions du Crieur Public. Un choc que l’autobiographie de ce “bagnard d’Auschwitz” qui aura totalisé vingt-trois mois de camps, auxquels il faut ajouter un an de prison. Arrêté à Dijon par la Gestapo en juillet 1942 à l’âge de 23 ans, le résistant Kessel (et boxeur professionnel) aura dû sa survie, après des mois de sévices, à sa… judéité. Au lieu de le torturer jusqu’à la mort, on l’envoie en déportation via Drancy. Auschwitz-Birkenau, la mine de charbon de Jaworzno, le camp central d’Auschwitz, Mauthausen, Gusen II… par trois fois, il échappe aux chambres à gaz. Inscrit à deux reprises sur la liste des condamnés, il est sauvé par miracle : une fois en raison d’une fiche égarée et l’autre, grâce à la “mansuétude” d’un ancien boxeur S. S. “J’ai, moi aussi, le nez cassé. Entre nous deux, le courant mystique s’est établi”, écrit-il. Puis vient sa condamnation à la potence pour cause d’évasion : la corde casse et son kapo bourreau, encore un ancien boxeur, lui laisse la vie sauve.Sim Kessel ne cache rien de la déshumanisation des prisonniers, de l’opposition des nationalités, des luttes pour un morceau de pain, de la froideur devant les morts ou encore de la solitude sauvage qui s’empare de lui. Son témoignage, palpitant de bout en bout, devrait être inscrit dans les programmes scolaires.Incroyable dialogueLes Mémoires de la Shoah (Dupuis), lui aussi, est un ouvrage à méditer en classe. La journaliste du Monde Annick Cojean a obtenu le prix Albert Londres en 1996 pour une série de cinq articles publiée à la veille du 50e anniversaire de la libération des camps, fruit d’une enquête fouillée qui l’a menée des Etats-Unis (notamment à l’université de Yale, où des enseignants rescapés avaient enregistré en vidéo les récits de survivants) à l’Allemagne, et cela à une époque où l’on parlait encore très peu de la Shoah. Aujourd’hui adapté en BD avec Théa Rojzman au scénario et Tamia Baudouin au dessin, son reportage renaît de façon on ne peut plus pertinente. Justesse du découpage, finesse du trait, l’album enseigne, émeut, passionne.”Parler guérit, oui, mais seulement si on est écouté, explique à Annick Cojean un psychiatre américain, le récit non écouté est un traumatisme aussi grave que l’épreuve initiale.” D’où le silence de nombreux rescapés après la guerre. Des années plus tard, la parole est venue, hésitante, douloureuse. Puis la journaliste est allée à la rencontre des enfants des rescapés, à l’inconscient traumatisé par l’Holocauste, et des enfants des nazis qui, à l’exception de quelques-uns (Edda Goering, Wolf Rudiger Hess), ont honte de leur parentèle. Enfin, elle nous raconte l’incroyable dialogue organisé par un universitaire israélien entre descendants des bourreaux et enfants des victimes.Douze mois d’horreurOn terminera cette brève sélection par Le Crématorium froid (Stock, 2024), publié pour la première fois en hongrois en 1950, et jusque-là jamais traduit en français. Son auteur, József Debreczeni, de son vrai nom József Bruner, est né à Budapest en 1905. Romancier, poète et journaliste, il est déporté au printemps 1944 après l’invasion du pays par l’Allemagne nazie. Il y relate son voyage d’horreur de douze mois à travers ce qu’il appelle “le Pays d’Auschwitz”, jusqu’au camp final de Dörnhau. Il passera sept mois, de novembre 1944 à mai 1945, dans ce “crématorium froid”, où les Nazis envoient les prisonniers à bout de forces.



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Author : Marianne Payot

Publish date : 2025-01-26 10:00:00

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Tags : L’Express

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