“Cher.es ami.es. Je me permets de répondre à une interrogation très légitime sur le processus de désignation.” Yannick Jadot a pourtant horreur des tambouilles dont raffolent son parti et ses adhérents. Pour qu’il utilise les boucles internes aux écolos – leur incarnation paroxystique – concluons que l’heure est grave… Mardi 28 janvier, 15h13, dans un mail à destination des écolos franciliens consulté par L’Express, le frais candidat à la succession d’Anne Hidalgo à Paris se voit contraint d’expliquer les modalités de sa candidature. “Il ne s’agit aucunement de contourner le vote des militant.es, ni de changer le calendrier adopté le 17 décembre, ni de casser les règles comme je peux le lire ici ou là. A la fin, c’est bien les adhérent.es qui votent et qui décident !”, précise-t-il dans le courrier. Et d’ajouter : “Ce que je propose à notre réflexion et décision, au regard du contexte très particulier de cette élection municipale à Paris (fin de cycle Hidalgo, droite unie…), c’est de changer l’esprit de la désignation : une équipe plutôt qu’une compétition soumise au vote. On peut être d’accord – ou pas. Je ne vois pas matière à procès.”Une clarification bienvenue ? “Personne ne comprend…”, souffle un camarade écolo, lui aussi en quête de lumières. L’entourage de Yannick Jadot tente de décrypter : “Il ne veut pas outrepasser la primaire ni le vote. Il souhaite que les adhérents se prononcent sur une candidature où les candidats initialement déclarés seraient ralliés à lui.” Une primaire à candidature unique : malin !“Jadot à Paris, ça serait une bonne option, non ?”La formule, certes alambiquée, a le mérite de lever quelques ambiguïtés. Car le sénateur écolo avait semé le trouble lors de sa déclaration de candidature, exprimant dans le même temps sa relation contrariée aux primaires internes – “parfois à couteaux tirés, pour ensuite faire campagne chacun dans son couloir” (disait-il récemment au Parisien) – et proposant un “autre chemin : le rassemblement des écologistes immédiatement”, derrière lui évidemment. Problème : une primaire est pourtant fixée pour le mois de mars, avec date limite de dépôt de candidature prévue au 31 janvier, et déjà trois candidats (David Belliard, Fatoumata Koné et Anne-Claire Boux) comptent bien se présenter. Le candidat Jadot est certes le plus connu parmi ses pairs, mais dispose de faibles troupes à Paris. Enfin, l’ancien postulant à l’Élysée rumine encore la primaire de 2022, davantage traumatisante que victorieuse. “Je sors de la primaire, je suis à 7 % dans les sondages et ne remonte plus, alors qu’avant j’étais à 10 %, confiait-il encore en novembre 2024. Entre la radicalité de Sandrine Rousseau et la décroissance de Delphine Batho, nous nous sommes décrédibilisés. La primaire écolo ne m’a pas aidé pour la suite.” Déjà, il l’annonçait : “Les municipales parisiennes ne peuvent être réglées par une primaire.” Bougé (artificiel) ou refus d’obstacle, qu’importe ; rien ne change pour que tout change.Enfin… Ce même mardi 28 janvier, tout a changé chez les Verts de la capitale. Dans un courrier interne, la direction a appelé les militants parisiens à se rassembler derrière la candidature du sénateur pour briguer la mairie de Paris. “Nous nous retrouvons dans la perspective portée par Yannick Jadot d’un rassemblement dès maintenant des écologistes – qui sera évidemment soumis au vote des militant.es parisien.nes – pour porter un rassemblement des écologistes et de la gauche dès le premier tour”, affirment les signataires, dont les deux présidents de groupes parlementaires Cyrielle Châtelain et Guillaume Gontard, l’ancien patron EELV David Cormand et… Marine Tondelier. Et la crème de la crème écolo d’ajouter : “Nous n’avons plus que quelques jours – d’ici le 31 janvier – pour changer de braquet.” Un secret de polichinelle ne l’est plus : la secrétaire nationale soutient officiellement l’ancien candidat à la présidentielle. L’année dernière, déjà, Marine Tondelier conversait avec une écolo parisienne : “Jadot à Paris, ça serait une bonne option, non ?”Certains pointent l’incohérence de la direction : Yannick Jadot prône l’union avec la majorité municipale sortante – à laquelle n’appartiennent pas les Insoumis – alors même que les Verts parisiens avaient voté pour un Nouveau Front populaire sauce parisienne dès le premier tour. “Tondelier défend l’union avec LFI autour de Lucie Castets et, dans le même temps, prend position pour Yannick et l’union sans LFI… Où est la logique ?”, s’interroge un écolo anonyme. Alexis Braud, ancien conseiller politique de Jadot, le défend : “Depuis dix-huit mois, j’exprime le souhait d’une liste de premier tour de la majorité sortante parisienne, élargie à ceux qui le souhaitent, et considère qu’à l’évidence ce qui se passe à Paris comme dans les autres grandes villes de gauche concerne toute la France ensuite.”Inutile de préciser que l’initiative suscite une volée de bois vert chez les écolos, qui accusent la direction de s’asseoir sur le processus adopté par les militants parisiens. Dans un parti du règne de l’horizontalité, voilà Yannick Jadot et la direction EELV dépeints, d’un même coup de pinceau, en césaristes. “Yannick Jadot, comme à son habitude, aimerait bien enjamber tout scrutin interne dans la mesure où, selon lui, son nom et sa réputation le placeraient au-dessus de ces contraintes, pour lui, insupportables et indues”, s’indigne une écolo francilienne. Et un autre de rétorquer : “Yannick Jadot propose de sortir les canots de sauvetage. Et qu’est-ce qu’on lui objecte ? ‘Désolés mais le protocole maritime numéro 652 bis dispose qu’on ne doit pas sortir les canots de cette manière !'” L’intéressé est, par ses adversaires, parfois décrié en mâle blanc, prompt à demander à des femmes, parfois de couleur, de s’effacer derrière sa candidature.Bref, tout va pour le mieux au pays des Verts. David Belliard, Anne-Claire Boux et Fatoumata Koné, sollicités à de multiples reprises par Jadot, n’ont toujours pas bougé d’un iota. Il faut dire que même ses amis ont des doutes… “S’il avait au moins fait les choses bien…”, souffle l’un de ses soutiens. Éphémère candidat à la primaire (moins de deux semaines) ou futur duelliste de Rachida Dati (à quelques étapes près) ? Attention au claquage.
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Author : Mattias Corrasco
Publish date : 2025-01-29 12:16:20
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