Chacune de ses déclarations a de quoi inquiéter les Européens. Le président américain Donald Trump, lancé dans sa guerre commerciale après l’imposition de nouveaux droits de douane contre le Canada, le Mexique (finalement annoncés comme suspendus pour “un mois” par la Maison-Blanche ce lundi 3 février) et la Chine, ne compte pas épargner l’Union européenne. Fidèle à sa doctrine protectionniste et à son slogan de campagne – America first -, il compte enclencher dans les prochaines semaines une nouvelle offensive tarifaire dans les prochaines semaines contre les 27.Dimanche, en déplacement dans le Maryland, il a en tout cas répété cette volonté, qualifiant d’”atrocité” la position de l’UE à l’égard de Washington. “Ils ne prennent pas nos voitures, ils ne prennent pas nos produits agroalimentaires, ils ne nous prennent presque rien, alors que nous prenons tout d’eux. Des millions de voitures, d’énormes quantités de nourriture et de produits alimentaires…” Le milliardaire dit “ne pas avoir” de calendrier quant à la mise en place de droits de douane envers l’UE, mais a assuré réservé des annonces sur le sujet pour “très bientôt”.Excédent commercial favorable à l’UEConcrètement, à quoi peut s’attendre l’Union européenne ? Difficile de le savoir, les mouvements de Donald Trump étant parfois imprévisibles. L’ampleur de l’augmentation de ces taxes sera aussi à surveiller pour se faire une idée plus précise de leurs conséquences sur l’économie européenne. Dans tous les cas, de telles mesures pourraient produire une nouvelle augmentation de l’inflation des deux côtés de l’Atlantique. L’Union européenne a promis, dimanche, de riposter “fermement” si le locataire de la Maison-Blanche venait à mettre à exécution ses menaces.Les 27 redoutent ces potentiels nouveaux droits de douane, tant leurs liens économiques avec Washington sont importants. Les Etats-Unis et l’Union européenne constituent chacun le principal partenaire économique de l’autre. La Commission européenne fournit des chiffres détaillés sur les échanges entre les deux puissances. En matière de commerce de biens, l’UE sort bel et bien gagnante de sa relation avec les Etats-Unis. Ainsi, en 2023, elle a exporté outre-Atlantique pour 504 milliards d’euros, contre 347 milliards d’euros de biens américains. Après cet exercice, l’Europe s’en est donc sortie avec un excédent de 187 milliards d’euros.Un chiffre qui ne prend toutefois pas en considération les échanges de services entre les Etats-Unis et l’Union européenne. Sur cet aspect, la configuration est inversée : les Européens importent bien plus du marché américain (396,4 milliards d’euros en 2023) qu’ils n’exportent de l’autre côté de l’Atlantique (292,4 milliards d’euros). Au total, en incluant biens et services, les échanges commerciaux ont donc représenté la manne énorme de plus de 1540 milliards d’euros sur l’année 2023.L’Allemagne premier exportateur vers le marché américainL’Europe, qui consacre 16,7 % de ses exportations hors UE aux Etats-Unis, peut légitimement craindre une redéfinition de sa relation commerciale avec Washington. Mais les Américains, qui exportent 18,6 % de leurs produits vendus à l’étranger vers l’UE, ne sont pas non plus à l’abri des conséquences de mesures de rétorsion probablement décidées par l’UE si Donald Trump passait aux actes. Selon un rapport du cabinet de conseil Roland Berger, l’annonce de nouveaux droits de douane couplés aux taxes de riposte de l’UE – mais aussi de la Chine – pourrait coûter aux Etats-Unis 749 milliards de dollars d’ici à 2029, contre 533 milliards de dollars pour les Européens.Qu’importent les effets pervers d’une telle mesure sur le marché américain, les 27 membres de l’UE se soucient avant tout des répercussions sur leurs propres économies. Certains pays seraient bien plus touchés que d’autres, en raison de leurs connexions plus ou moins importantes avec les Etats-Unis. D’après les statistiques d’Eurostat, l’Allemagne, qui a exporté vers le pays plus de 157 milliards d’euros de biens en 2023, notamment dans le secteur automobile, a de quoi appréhender la “muraille douanière” voulue par Donald Trump. Suivent ensuite l’Italie (67 milliards d’euros de biens exportés vers les Etats-Unis), l’Irlande (51 milliards) et la France (43 milliards).Mais, en se penchant sur d’autres données, plus que la quantité de biens expédiés vers les consommateurs américains, leur part dans les échanges commerciaux de chaque pays doit aussi être prise en compte. Certaines nations européennes, de taille plus réduite, pourraient pâtir d’une trop grande dépendance aux Etats-Unis. Ainsi, près de la moitié (45,8 %) des exportations de l’Irlande hors Union européenne est à destination du marché américain. Pour la Finlande, second pays européen en la matière, c’est plus du quart (25,5 %).Face à la pression commerciale américaine, l’Union européenne pourrait être tentée d’entreprendre la mise en place d’attaches économiques plus fortes avec d’autres grandes puissances économiques. C’est en substance la volonté exprimée vis-à-vis de la Chine par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors du Forum économique de Davos (Suisse), le 21 janvier dernier. “Il est temps de rééquilibrer notre relation avec la Chine, dans un esprit d’équité et de réciprocité”, avait alors appelé la dirigeante, au moment où Pékin s’est également fait infliger de nouveaux tarifs douaniers par Donald Trump.Automobile et pharmaceutique menacésMalgré tout, y a-t-il une part de vérité dans le discours de Donald Trump lorsqu’il vise plus spécifiquement les échanges européano-américains en matière d’automobile et d’agroalimentaire ? Concernant le premier domaine cité, l’UE exportait hors de ses frontières en 2022 23 % de ses voitures produites vers les Etats-Unis. Toujours selon Eurostat, elle importait dans le même temps vers l’Union 14 % d’automobiles américaines (hors UE). Pour les produits agroalimentaires, le constat est peu ou prou le même. Le marché américain constitue en effet le deuxième plus important pour les Européens, avec 27 milliards d’euros d’exportations en 2023, soit 12 % du total de celles-ci. En revanche, l’UE n’importe que 11,7 milliards d’euros d’aliments américains, ce qui en fait le 4ᵉ importateur sur le territoire après le Brésil, le Royaume-Uni et l’Ukraine.Enfin, certains secteurs pourraient s’attendre à être encore plus concernés par l’incidence de droits de douane américains plus importants. En plus des géants de l’automobile, l’industrie pharmaceutique européenne, importante exportatrice vers les Etats-Unis, pourrait s’attendre à des conséquences importantes sur son activité. Lors de son premier mandat, Donald Trump avait d’ailleurs fait part de sa volonté de réduire les liens sur ce domaine, notamment en matière de recherche médicale, afin de favoriser les patients américains, face aux patients européens.Les dirigeants européens, réunis ce lundi à Bruxelles en présence du secrétaire général de l’Otan Mark Rutte et du Premier ministre britannique Keir Starmer pour un sommet informel sur la défense européenne, se disent prêts à répliquer face aux menaces de Donald Trump. “Si nous étions attaqués sur les sujets commerciaux, l’Europe, comme une puissance qui se tient, devra se faire respecter et donc réagir”, a ainsi exposé le président français Emmanuel Macron. Le chancelier allemand Olaf Scholz a pour sa part répété que ces nouveaux droits de douane seraient “mauvais pour les Etats-Unis, mauvais pour l’Europe”.
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Publish date : 2025-02-04 06:45:00
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