Donald Trump nous fait sortir du monde libéral du droit pour revenir dans celui, illibéral, du rapport de force. Ce recul civilisationnel aura une fin et restera comme une honte pour nos amis américains mais, pour l’heure, nous devons gérer le présent, un présent qui était d’ailleurs parfaitement prévisible pour ceux qui avaient écouté Trump pendant sa campagne présidentielle. Les Canadiens, aussi mal préparés que les Européens, ont été pris de court par l’annonce complètement folle du président américain de la mise en place de droits de douane de 25 % sur leurs exportations vers les Etats-Unis, officiellement pour lutter contre les importations de marchandises, de fentanyl et d’immigrants illégaux.Cette décision est désormais suspendue pour un mois, à l’image de celle menée à l’égard du Mexique. Ce protectionnisme se fait au mépris des traités. Et s’il est mis en pratique, il aura un impact négatif sur l’économie américaine et sur son soft power. Et puis soyons réalistes : après le Canada, viendra le tour de l’Europe. Nous, Européens, sommes désormais seuls. Pour ne pas le rester, nous avons tout intérêt à approfondir toutes nos relations commerciales, scientifiques, environnementales, énergétiques, diplomatiques, militaires… avec les Canadiens et les Britanniques.L’Europe doit privilégier les produits européensTrump est tout à sa folie protectionniste et nous devons nous préparer au pire : la mise en place effective de ces droits de douane. La bonne réponse à y apporter ne sera pas celle du “œil pour œil, dent pour dent” mais celle de la réponse chirurgicale. Par des droits de douane, le président républicain punit ses concitoyens de la classe moyenne (qui ont largement voté pour lui) en taxant leurs importations, c’est-à-dire une part de leur consommation. Ne répondons pas à une politique américaine stupide par une politique européenne stupide. En revanche, expliquons par exemple aux Américains que, désormais, nos achats de matériels militaires privilégieront les matériels européens et non plus américains. Espérons que nos amis allemands, quand ils auront enfin mis à la tête de leur pays un chancelier plus pro-business et plus courageux qu’Olaf Scholz, auront la lucidité et l’audace de nous suivre dans cette démarche.Dans ce contexte, le budget Bayrou-Lombard, qui a le mérite d’exister, n’en est pas moins complètement à contretemps économique. Les pays visés par le protectionnisme de Trump, du Canada à l’Allemagne en passant par le Royaume-Uni, vont répondre par une politique donnant davantage de compétitivité à leurs entreprises. Nous sommes en particulier au début d’un cycle mondial de baisse de l’impôt sur les sociétés couplée à une simplification de la bureaucratie à laquelle le secteur privé fait face. Il s’agit, pour les pays menacés par le protectionnisme, de répondre par une forme de dévaluation fiscale et normative compétitive. Même l’Union européenne semble enfin décidée, sous la pression des événements, à pondérer sa folie normative.La TVA, seul impôt qu’il est possible d’augmenterPendant ce temps, la France s’apprête à alourdir la fiscalité sur les plus grandes entreprises. Cette politique va diminuer l’attractivité de notre pays et réduire sa base fiscale. Ce plus d’impôts ne rapportera quasiment rien et on imagine même malheureusement assez bien qu’avec cette politique qui charge les entreprises au lieu de réformer l’Etat, notre déficit public fin 2025 sera quasiment aussi élevé que celui de 2024. On en reparlera. Bernard Arnault (LVMH), Eric Trappier (Dassault Aviation) ou Florent Menegaux (Michelin) ont eu mille fois raison d’alerter les Français sur les conséquences de cette politique et de ne pas laisser le monopole de la parole aux commentateurs et aux parlementaires qui donnent des leçons d’économie mais n’ont jamais tenu la comptabilité d’un stand à la kermesse de l’école.Le seul impôt qu’il soit aujourd’hui possible d’augmenter pour accompagner une stratégie de réduction des déficits publics et compléter la baisse de la dépense (qu’on attend toujours) serait la TVA. Seule la TVA affecte peu l’économie à long terme, ne pénalise pas notre compétitivité et ne réduit pas notre potentiel de croissance. Alourdir la TVA ne serait pas en soi une politique. Mais, si notre pays ne peut vraiment pas s’empêcher de toucher aux impôts, ce serait la moins mauvaise. Trop tard pour ce budget mais nos problèmes de déficits n’ont pas encore trouvé le début d’une solution.
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Author : Nicolas Bouzou
Publish date : 2025-02-06 07:00:00
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