Les élections professionnelles aux chambres d’agriculture attirent rarement l’attention des médias. Pourtant, celles qui viennent de se tenir en janvier mériteraient plus d’attention. Pour la première fois, la FNSEA – plutôt proche de la droite de gouvernement – voit son hégémonie contestée. Face à elle, la Coordination rurale, filiale assumée du RN, sans parvenir à devenir le premier syndicat du secteur, s’impose comme une force incontournable en devenant majoritaire dans 14 départements. Des territoires où les crises sanitaire et climatique pèsent lourdement sur les productions et viennent aggraver les nombreux maux auxquels doivent faire face les agriculteurs : faibles revenus, raréfaction des services publics, normes souvent absurdes, contraintes environnementales imposées par la PAC… mais aussi – reconnaissons-le – fortes réticences au changement et à la modernisation de beaucoup d’entre eux !En réalité, ce scrutin, bien plus qu’un simple rapport de force syndical, est surtout le reflet d’une colère exponentielle qui se focalise sur un seul homme : le président de la République. Ces élections se sont tenues un an après les grandes manifestations agricoles qui avaient paralysé une partie du pays. A l’époque, la FNSEA avait mené les négociations avec le gouvernement, obtenant de premières avancées très concrètes pour la profession. Mais douze mois plus tard, rien ou presque n’a été mis en œuvre.Des initiatives irresponsables du RNParmi les principaux responsables de cette situation, les députés du RN qui ont voté la censure. Le dégrèvement sur la taxe foncière, la réforme du calcul des retraites agricoles ont dû attendre un nouveau vote. Sans oublier la loi d’orientation agricole, promise par Gabriel Attal il y a un an et décalée à la suite de la chute du gouvernement, qui n’arrive que maintenant au Sénat. Paradoxalement, les électeurs du monde agricole n’auront donc pas tenu rigueur à la Coordination rurale des initiatives irresponsables du RN, bien au contraire. D’abord parce que pour eux comme pour l’immense majorité des Français, Emmanuel Macron reste le seul responsable du chaos politique en provoquant la dissolution.Ensuite, parce qu’il n’a jamais su incarner une politique agricole lisible. Il y a un an, face à la colère paysanne, il avait laissé son Premier ministre, Gabriel Attal, monter au front. Résultat : une feuille de route ambitieuse pour sauver l’agriculture… mais désormais plus personne pour la mener à bien. Plus de cap, plus d’incarnation, plus d’effort pour renouer le dialogue avec un monde agricole qui ne se sent plus écouté. Enfin, ce vote sanctionne aussi un président de la République déconnecté des réalités agricoles. La preuve en a été faite l’an dernier, lors du Salon de l’agriculture. Alors que la colère grondait, l’Elysée a cru bon d’organiser un énième “grand débat”… en y conviant des associations dont la seule obsession est l’agrobashing.Ce rejet est d’autant plus inquiétant qu’il s’accompagne d’une montée croissante de radicalisation bien loin du cycle traditionnel “manif-négo-accord”. Le syndicat n’hésite plus à employer des méthodes anormalement violentes pour faire parler des enjeux agricoles. Il y a quelques semaines, le secrétaire général de la Coordination rurale ne menaçait-il pas de “brûler sur place” tout véhicule de l’Office français de la biodiversité entrant dans une exploitation ? Une déclaration choc dans le style gilets jaunes, révélatrice d’un pays sous tension.Un an après les blocages, la colère ne cherche plus d’interlocuteur, elle ne demande plus de solutions comme s’est toujours efforcée de le faire la FNSEA. Elle rejette. Et elle rejette un homme qui symbolise désormais l’impuissance du pouvoir. Ces élections consulaires sont une nouvelle preuve que désormais chaque scrutin, chaque mouvement social, chaque mobilisation devient un référendum contre le président de la République et l’occasion de le sanctionner sans nuance, ni indulgence. Autant dire que prétendre tenir ainsi sans bouger jusqu’en mai 2027 lorsque l’on est à la tête d’un peuple qui en d’autres temps fut régicide, relève d’une très grande inconscience.
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Author : Jean-François Copé
Publish date : 2025-02-10 12:00:00
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Elections agricoles : une nouvelle alerte ! Par Jean-François Copé
![Des membres de la Coordination rurale de Gironde lors d'une mobilisation contre l'accord entre l'UE et le Mercosur, le 19 novembre 2024.](https://www.mondialnews.com/wp-content/uploads/2025/02/1739191766_Elections-agricoles-une-nouvelle-alerte-Par-Jean-Francois-Cope.jpg)